Archive for the ‘Brésil’ Category

Brésil, terre de contradictions

Wednesday, October 15th, 2008

Aujourd’hui, 15 octobre, au Brésil, c’est la saint-Prof’…

Bon, en réalité, c’est le “jour des professeurs”, et, malgré mon statut de “technicien en langue”, je ne travaille pas, ainsi que tous mes collègues du privé et du public (à l’exception de certaines facultés privées).

Ce métier de faignants (c’est bien connu) bénéficie sur le sous-continent brésilien d’une curieuse considération. Payés certes au-dessus du SMIC (heureusement, vu qu’il est quand même à moins de 150 euros), les profs sont généralement peu estimés en tant qu’individus, malgré les discours sur les nécessités d’une amélioration générale de l’éducation. Mais nous avons quand même droit à un jour de congé qui nous est propre…

Truc bizarre…

Enfin…

Pas de geulante aujourd’hui: repos annuel… 😀

L’homme de Del Monte

Sunday, August 31st, 2008

Ma belle-mère, hier, va acheter un poulet dans la boulangerie1 au coin de la rue principale de mon quartier. Comme elle est hyper-sociable, elle ne peut s’empêcher de demander au Portugais2 qui tient la caisse: “Et, ils sont bons vos poulets?”

(pour le cas où le type te répond “non, je vous conseille plutôt d’aller l’acheter à la superette en face”)

Le gars lui répond, paraît-il (je n’étais pas là):
“Ah, oui, même qu’il y a un gringo qui vient en acheter régulièrement.”

Rire de ma belle-mère:
“Oui, le gringo3 , c’est mon beau-fils.”

J’aurai été fiché aussi vite dans mon quartier qu’à la préfecture de police…

  1. C’est logique, réfléchissez un peu. []
  2. Ici les boulangeries sont NÉCESSAIREMENT tenues par des Portugais. C’est un lieu commun. Je ne discute même plus. L’idée que je puisse un jour rencontrer une boulangerie tenue par un Suédois ne m’effleure même pas.
    Enfin, si, pour ce post, mais bon… []
  3. au cas où Del Monte ne vous dit rien, je vous invite à jeter un oeil ici. []

Le féminisme est passé de mode, mon cul

Tuesday, August 26th, 2008

Brésil, août 2008.
Maintenant.

La Cour Suprême va (enfin) débattre sur un sujet qui a été interdit de discussion pendant quatre ans sur pression de la gente macho et catho du coin.
Il s’agira d’admettre ou non l’avortement -on dit ‘l’accouchement anticipé’- de foetus sans cerveau.

Les femmes auront-elles enfin le droit de ne pas mener leur grossesse à terme si leur enfant n’a pas de cerveau?

Réaction de la Conférence épiscopale nationale du Brésil:

“Quant à la position éthique qui interdit l’élimination (quel joli mot, ndt) d’un être humain innocent, il ne saurait y avoir d’exception. Les foetus anencéphales ne sont pas écartables.”

C’est clair que plus innocent que ça…

D’aprés ce site (qui a cependant tout l’air d’une bondieuserie sans fin), près d’un quart des bébés nés sans cerveau décèdent durant l’accouchement (ici c’est un tiers), ceux qui y survivent ont une espérance de vie de quelques heures à quelques jours.

Il n’y a pas de vie après la naissance pour des bébés nés sans cerveau.

Rien…

Quelques jours…

Pleins d’amour, certes, pour ceux qui désirent investir dans cette situation terrible… Et c’est leur choix…

Mais que de la tristesse, neuf mois dedans, maximum dix jours dehors pour les autres, parce qu’ils ne peuvent pas choisir…

Une grossesse entière à patienter en étant sûre que l’enfant va mourir. Vite…

À part ça, le féminisme ne sert plus à rien.
Qu’ils disent…

L’Amazonie est à nous

Tuesday, August 5th, 2008

Je ne sais pas trop à qui elle est exactement, mais apparemment pas à ceux qui y ont enterré leurs pères et les pères de leurs pères et les pères des pères de leurs pères (thank you Loretta).

Je pensais à un argument qui pourrait sans doute, si on y réfléchit un peu, couper la chique aux glands çons impérialistes qui infantilisent en permanence les Brésiliens (dont, certes, les dirigeants le méritent, mais ceci est un autre débat).

Imaginons que l’on propose aux Brésiliens de les rétribuer pour ne pas déboiser le poumon de la Terre, comme on dit…

Hein?

Après tout, les USA et l’Europe ont bien détruit une bonne partie de ce poumons dans les siècles précédents et c’est aussi en partie à leur profit que les arbres du Brésil sont actuellement sacrifiés sur l’autel de la croissance locale.

Et puis c’est une tactique employée quelques fois avec succès dans le Premier Monde: je te paie pour que tu t’arrêtes de planter, de pêcher et de faire du lard.

Donc, au lieu de faire croire à tout le monde que les Brésiliens sont plus idiots que les autres, et sachant qu’ils ont un revenu par habitant dix fois inférieur à celui des Français, il me semblerait juste que, afin de continuer à bénéficier des bienfaits du poumon de la terre -qu’ils disent-, les acteurs du Premier Monde devraient pouvoir aider ceux du Troisième dont l’Amazonie est une des principales richesses à accrocher le wagon de la croissance sans le détruire.

Bon, évidemment, cela s’appelle de la solidarité. Et c’est un gros mot, ces derniers temps. En plus la croissance, dans ce cas, risque de se prendre quand même une grosse branlée.

Mais sinon, je suis contre l’internationalisation de l’Amazonie, parce que je ne vois pas pourquoi je ferais confiance dans les institutions internationales (ONU? OCDE? OMC? Z’êtes pas bien?)

(Note: si on applique ce truc, va falloir diminuer la consommation de papier, de meubles, de viande gonflée aux hormones et de pas mal de saloperies cultivées de manière intensive et au round-up… Ce qui ne serait pas plus mal… Sans compter qu’une des raisons de l’exploitation de l’Amazonie, ce sont aussi pas mal de mines sacrément importantes. Bref, si on veut compenser tout ça, va falloir casquer et se serrer la ceinture à la croissance…)

Ils sont encore de plus mauvaise foi que les nôtres

Tuesday, June 17th, 2008

“La police nie avoir utilisé des matraques” (appelée casse-tête en portugais)

Lors d’une manif “tous nus à vélo

Regardez la deuxième photo surtout. La première c’est un casse-couilles…

Les plus avisés d’entre vous reconnaîtront aussi le gaz au poivre sur la deuxième photo…

Vive la fête

ceci est un mouvement (etc)

Monday, May 19th, 2008

Ciel! Ceci est la suite de ça.

Au début de l’année 1985, le MST (Mouvement des Sans-Terre) voulut entériner sa fondation en organisant un grand congrès auquel Tancredo Neves, l’alors élu président pas encore en fonction, avait promis de venir. Il ne vint pas et mourut d’ailleurs juste avant de prendre sa charge.

Entre le 29 et le 31 janvier eurent tout de même lieu ces trois jours de congrès au cours desquels le MST décida un paquet de trucs. Voici donc un nouvel extrait,

Un réflexe libertaire qui s’ignorait peut-être

d’après Sue Branford et Jan Rocha, Rompendo a cerca, a história do MST, Casa Amarela, São Paulo, 2004, p. 55-56:

“Après les trois jours de débat de Cascavel (voir le post précédent), on établit une liste de principes du mouvement, repris sous forme de quatre objectifs. Les deux premiers engagements -selon lesquels “la terre appartient à qui travaille dessus” et le mouvement s’engage dans la création d'”une société sans exploiteurs ni exploités”- possède un fort relent de socialisme. Les autres principes étaient moins utopiques et exprimaient des décisions prises plus tôt: le mouvement devrait être indépendant, ouvert à tous et dirigé par les travailleurs eux-mêmes.
Une fois établis ces principes, le congrès s’attaqua à la tâche principale de la réunion: la construction d’un mouvement national. Le premier problème était celui de la structure. Les Sans-Terre étaient inquiets à l’idée qu’un petit groupe de leaders puissants ne s’emparent du mouvement et, de ce fait, décidèrent de ne pas créer de charges individuelles telles que président, trésorier ou secrétaire-exécutif, mais, au contraire, de diriger le mouvement, tant que c’était possible, de manière collective, comme une administration décentralisée. Une autre bonne raison pour ne pas nommer un président national était qu’un leader en charge deviendrait une cible facile pour les balles des assassins. On décida d’élire des collectifs (qui existent jusqu’à ce jour) pour s’occuper de charges spécifiques, comme par exemple du recrutement, de l’entraînement et de l’administration financière. On insista encore sur la nécessité de la construction d’une démocratie interne. Les leaders et les coordinateurs devaient rester en permanence liés aux échelons inférieurs, dit-on, et chaque membre devrait participer au processus de prise de décisions, au travers de réunions et de discussions en plus petits groupes. Les informations devaient circuler à tous les niveaux.
On créa un comité de coordination nationale, avec des représentants des douze États où le mouvement était déjà organisé ou en voie d’organisation (ndt: le Brésil compte 26 États en plus du District Fédéral de Brazilia). Comme le comité déterminerait des “principes généraux” pour le mouvement, les délégués décidèrent de ne pas établir de politiques spécifiques. Celles-ci seraient décidées, dans les diverses régions, par ceux qui étaient directement engagés dans la lutte pour la terre. Dans le futur, cette décentralisation allait aider le mouvement à survivre dans les moments difficiles et devint l’une de ses caractéristiques permanentes. Le MST affronta la pire des crises de son existence lorsqu’il tenta, pour un bref moment, d’imposer une politique unique -le collectivisme de production agricole- à tout le mouvement.”

Ce n’est toujours qu’un extrait, histoire de vous donner un aperçu. Toujours en traduction copyleft, mais, cela dit, je dois préciser que je n’ai pas (encore) demander leur permission aux auteurs pour la réaliser.
Aide de lusitophones et assimilés toujours bienvenue.

Ceci n’est pas une maladie sexuellement transmissible (svp)

Thursday, May 15th, 2008

Je découvre progressivement (et je traduis au fur et à mesure des extraits de) la vie des Sans-terre brésiliens… Je découvre notamment que leur mouvement est plutôt jeune. Il n’est que lointainement apparenté à celui des Ligues Paysannes des années 50, par exemple, même si, hein, bon, mais quand même…

Et donc, premier extrait, pour vous, en primeur en français:

La rencontre de Cascavel, fondation du Mouvement des Travailleurs Sans-Terre (MST) au Brésil, 1984,

d’après Sue Branford et Jan Rocha, Rompendo a cerca, a história do MST, Casa Amarela, São Paulo, 2004, p. 42-43.

“Après trois jours de débat intense (après avoir notamment parlé avec les représentants de l’Église et ceux des syndicats et du PT, dont le jeune Lula, ndt), les principes du nouveau mouvement furent établis: il sera conduit par les travailleurs sans-terre eux-mêmes, indépendamment de l’Église, des syndicats et des partis politiques; il sera ouvert à toute la famille; il sera un mouvement de masse. Quatre objectifs furent définis: lutter pour la réforme agraire; lutter pour une société juste, fraternelle et pour la fin du capitalisme; inclure les travailleurs ruraux, locataires, métayers et petits agriculteurs de la catégorie des travailleurs sans terre; et garantir que la terre soit à qui travaille dessus et à qui vit d’elle.
“Prises en commun, les décisions de la rencontre de Cascavel montrèrent que, même à ce stade si précoce, les sans-terre essayaient, consciemment, de créer une organisation différente de tout ce qui existait alors au Brésil. À la différence des mouvements ruraux antérieurs (comme les fameuses Ligues Paysannes, qui dans les années 50’ avaient lutté pour les droits des travailleurs ruraux pauvres du Nordeste dans le contexte du mouvement syndical), les sans-terre voulaient fonder une organisation totalement indépendante. Ils croyaient encore être différents des Occupants (posseiros *) de l’Amazonie, qui luttaient exclusivement pour le droit de rester sur la terre qu’ils occupaient depuis plusieurs années. Les sans-terre se voyaient comme un nouveau type de travailleurs exploités –des personnes expulsées de leurs champs par la modernisation de l’agriculture- et, ceci étant, estimaient avoir besoin d’un mouvement qui leur soit propre, avec des objectifs spécifiques. Ils pensaient que la lutte pour la terre faisait partie d’un mouvement révolutionnaire plus large, pour en finir avec l’exploitation et garantir une justice pour tout le monde. Une vision utopique qui motivait principalement son appel vers les pauvres et les exclus.”

Traduction copyleftée du Hérisson

À suivre, donc… Bientôt un nouvel extrait.

PS: * posseiros: si quelqu’un a une meilleure traduction, je suis preneur.

Le monde à l’envers

Wednesday, April 16th, 2008

En 1988, un des pays les plus libéraux du monde abandonnait la constitution dictatoriale qui était la sienne depuis 1964. Le pays redevenait démocratique (rions deux fois). Et se dotait d’une nouvelle constitution avec des élections où on pourra élire même des gens pas cultivés, même des métallurgistes, je te jure, même qu’ils ont été cap’, et que maintenant il y a un paquet de cons qui le regrettent amèrement…

Dans la constitution, les Brésiliens (car c’est bien d’eux qu’il s’agit au cazou tu ne l’avais pas remarqué) ont introduit la création d’un système de santé payé par l’État pour tous les Brésiliens indistinctement. Jusqu’en 1988, les Brésiliens se divisaient en trois catégories: les riches qui avaient souscrit une assurance privée; les travailleurs qui cotisaient pour un service public; les pauvres et les clandestins (y compris les ennemis du régime, ces sales communistes) qui pouvaient toujours aller se brosser…

Étonnant non? En pleine vague reaganienne, un pays dont les politiciens sont en général des adeptes du libéralisme pur et dur va figer dans sa constitution le droit à tous les Brésiliens de bénéficier d’une médecine minimale

Et ça ne marche pas si mal. Certes, c’est pas encore le “premier monde”, mais, bien que les mêmes éternels imbéciles pleurent après ces gaspillages, ces dépenses inconsidérées de l’État et veuillent qu’on privatise tout, la mortalité infantile a baissé de moitié en vingt ans, les épidémies les plus fréquentes ont été freinées ou éradiquées et il ne reste plus que deux catégories de personnes, maintenant: ceux qui bénéficient du SUS (Système Unique de Santé) et ceux qui bénéficient d’une assurance privée… et accessoirement du SUS qui prend encore en charge pas mal de trucs même pour ceux qui paient des commerçants de la santé (dont je suis, puisque mon école m’en fait bénéficier…).

Mais au moment où les logiques marchandes de nos pays civilisés (je parle de la Belgique, de la France, etc.) nous forcent à reconnaître, qu’il serait temps pour le bien de tous de liquider les collectivités et favoriser les grosses boîtes d’assureurs, les cliniques privées et les usines à psychotropes légaux, le Brésil poursuit sur sa lancée, renchérit: l’ancien ministre de la santé, Adib Jatene, actif sous le gouvernement Cardoso, pourtant de droite, estime que la santé avance dans le bon sens au Brésil: plus de gestion collective, plus d’argent (et il en manque selon lui). L’actuel ministre, José Gomes Temporão, membre du parti très droitiste PMDB, ne dit pas autre chose.

Aujourd’hui, la couverture publique permet à 100 millions de Brésiliens de bénéficier des services de santé et prévention de 216 mille agents, le tout avec un budget de santé de 50 milliards de reais (moins de 20 milliards d’euros). En 1994, seuls 16 millions de Brésiliens étaient couverts et il n’y avait que 30 mille agents.

(Notons que le nombre de praticiens par habitants ferait pâlir d’envie les maniaques des quotas d’étudiants en médecine de nos chers pays soc-dém… Il y a bien des jeunes qui reviennent diplômés de Cuba pour tenter de pallier aux manques, mais on ne leur reconnaît pas la validité de leurs diplômes. Notons aussi que les homéopathes ne sont pas conventionnés et que nous payons donc le médecin de notre bébé plus de 100 euros la séance… Si, si…)

Les deux serviteurs de l’État avouent (pas sous la torture) que la médecine publique assure même des opérations dans les cliniques privées. Et donc, les riches privilégiés (et les salariés aussi) sont également soignés parfois par l’État vampire… Ce qui bénéficie d’autant plus à l’image des assureurs privés qui se font ici des bénéfices gigantesques et ont accru également leur… patientèle… (ceci ne les empêche pas d’être en tête des réclamations de consommateurs…)

Le Brésil, libéral, gouverné par un gros bien laid inculte et prétendument gauchiste(1), c’est le monde à l’envers…

Source: CartaCapital du 16 avril 2008 et Caros Amigos spécial Cuba (2007).

(1) c’est le genre de réflexions très élevées que j’entends très souvent à son endroit…

São Paulo -où les rues portent de ces noms…

Thursday, April 3rd, 2008

Il m’arrive de me dire que la ville est vivable…
J’ai une espèce de crise genre “amélipoulanisme”, je suppose, dans ces moments…

Je vois la ville comme elle pourrait être dans un décor de pub, avec des couleurs chaudes, des voitures lentes, des pentes de trottoirs douces et des maisons architecturalement acceptables.

Puis, je me réveille.

La ville de São Paulo est une de ces cités dont on ne sait même plus très bien où elle commence et où elle finit. Généralement, ses habitants n’en connaissent qu’une partie infinitésimale et il semble bien que j’en ait visité plus que beaucoup d’entre eux -parce que je marche, je conduis et je prends les transports en commun pour aller dans des endroits très différents. Alors que beaucoup de Paulistes se contentent de trajets réguliers et limités, même s’ils sont longs, durs et étalés sur des distances parfois démentielles.

Certains d’entre eux ont jusqu’à quatre heures de trajet pour aller au boulot -et quatre heures, naturellement, pour en revenir.

Je vous rassure: ce sont les plus pauvres. Ceux qui se tapent des autobus fatigués, aux chauffeurs audacieux, aux amortisseurs insuffisants, sur des routes horribles, dont j’ai souvent voué les ingénieurs aux gémonies -dont j’ai souvent cru, en fait, qu’elles n’avaient pas bénéficié du travail d’ingénieurs, même incompétents…

En ce moment, la discussion préférée des journaux locaux concerne le trafic congestionné et les records de pollution et de bouchons qui rendent la ville encore plus difficile à vivre. Au moins, la plupart des riches n’y échappent pas… La plupart, car certains survolent la ville en hélicoptère pour échapper à la populace et son “inexplicable violence”… Comme dirait Julien, il y a des lectures de Bourdieu qui se perdent…

Les trottoirs trop étroits desservent des rues commerciales par centaines, et pourtant nous sommes toujours les uns sur les autres, à se bousculer, se percuter -jamais méchamment, notez-, à nous croiser par centaines de centaines tous les jours, sur des pavements aléatoires, posés par les propriétaires des maisons, immeubles et magasins attenants. De cinq en cinq mètres, suivant l’investissement du “dono da casa”, la qualité de la chaussée pour piétons varie d’impeccable, et même jolie, à horrible et pratiquement impraticable. Ce qui ne me dérangerait pas si je n’avais pas mon bébé à transporter.

Les avenues qui portent les noms des dictateurs militaires sont plus nombreuses que celles qui rappellent les présidents démocrates (enfin, disons, élus). Je suis même tombé sur une petite rue Monsanto… Enfin… Si ça pouvait augurer de la mort prochaine de la compagnie…

Deux des artères les plus importantes de la capitale économique du Brésil sont également dénommées d’après les “Bandeirantes”, ces troupiers plus ou moins assimilables aux conquistadores espagnols, dont une des fonctions principales était de pourchasser les esclaves en fuite et d’exterminer les petites communautés que ces derniers construisaient dans l'”Interior”. Sans parler des populations originaires…

L’habitant de São Paulo, à mon sens, est d’une patience remarquable. Il supporte des choses invraisemblables, il tolère des situations opposées au simple bon sens et qui impliqueraient chez nous le retour de la pendaison comme une juste rétribution accordée aux édiles incapables et malveillants.

D’une patience remarquable sauf lorsqu’il est au volant de sa voiture…

Voiture dont les dimensions tendent à exploser de tous les côtés -poids, taille, blinquant…

Voitures dont les aspects anti-écologiques ont déjà été évoqués dans ces pages.

Je ne parlerai pas trop des motocyclistes, qui sont pour une bonne partie comme une espèce de réseau de circulation sanguine de la ville, livreurs de toute sorte qui traversent les quartiers à une vitesse exubérante, haïs par les automobilistes et les piétons pour leur imprudence et la façon qu’ils ont de se solidariser au moindre geste de mauvaise humeur d’un de leurs adversaires. Ils sont en réalité majoritairement exploités honteusement par leurs patrons qui exigent d’eux des performances démoniaques -ceci expliquant cela… Ils prennent dès lors des risques énormes pour leur propre vie -et aussi parfois pour celles des piétons…

Et puis il y a ces agglutinements.

Devant les bars trop petits pour accueillir une population jeune, avide d’amusement collectif, de bouteilles de bière vendue en taille 600 ou 750 ml, groupes qui évidemment débordent sur les trottoirs, voire sur les rues. Et à la nuit tombée, ça devient sans doute dangereux (cela dit, heureusement, je n’ai pas encore assisté à un accident dans ces circonstances).

Devant les arrêts de bus ou ceux des autocars qui opèrent des liaisons formidables tous les jours (comme cette ligne qui part du centre-ville pour aller se perdre dans une cité dortoir à quatre heures de là), et dont les clients (les compagnies sont privées) se retrouvent souvent en bonne partie sur la chaussée carrossable.

Dans les stations de métro, en attente de rames innombrables, dans des conditions telles qu’il est souvent difficile de sortir du wagon, que l’on met parfois plusieurs minutes pour parvenir à s’exhiber d’une station, que nombreux sont ceux qui laissent passer plusieurs convois afin de pouvoir voyager plus confortablement, ce que je comprends, même si je ne pratique pas -encore…

Dans les magasins de tous types (du supermarché pour riches au supermarché pour pauvres, en passant par les shoppings, les restaurants, les postes, les banques, les hôpitaux -oui, bon, mais ils sont souvent privés-, les petites galeries à bas prix), où les dimensions des rayons, des tablées, des couloirs ont été pensées au plus étroit pour permettre l’exposition de stocks, l’enchevêtrements de pièces ou de places les plus nombreux possibles -et par voie de conséquence les bouchons se reproduisent dans les temples de la consommation.

Je ne vous parle même pas des flics, des barrières de sécurité, des caméras, des systèmes de contrôle, du nombre de fois que j’ai été photographié à l’entrée d’un immeuble, et combien d’autres choses qui me font parfois penser qu’en ces matières, le tiers-monde, c’est encore l’Europe… Et que ça fait peur, en fait, de constater que le véritable laboratoire de la sécurité à outrance, c’est probablement ici qu’il se fait…

Et je n’arrive pas à comprendre où je pêche encore -parfois- que cette ville est vivable…

Les arbres…?

Les gens…?

Giuliano…?

Je ne sais pas… Il doit y avoir quelque chose…

En voilà une idée qu’elle est bonne

Sunday, February 24th, 2008

Histoire de consoler France Télévision qui va perdre son droit à des coupures publicitaires (et comment ne pas s’en réjouir, même si le premier bénéficiaire va être tf1 -et comment ne pas s’en foutre, quand on constate le niveau de la télévision actuel?), permettez que je vous narre comment ça fonctionne ici au pays des cariocas et des sambas…

Parmi les produits télévisés populaires, les telenovelas (feuilletons) sont sans doute les plus -économiquement, mais aussi idéologiquement- fiables; ça marche comme c’est pas possible et, en plus, ils ont trouvé un truc que France2 et France3 devraient utiliser: la pub n’est plus dans des coupures, mais bien dans le feuilleton lui-même(1)…

Bon, je tire cette info d’un article, mais c’est promis je vérifierai un de ces jours…

Donc, je ne peux qu’inviter tous mes lecteurs français à se réjouir de la perspective future: les chaînes publiques vont pouvoir se financer intelligemment sans coupure de pub: ils ne feront plus QUE de la pub, voilà…

Tant qu’à faire, je propose aux Belges qui suivent ces lignes de faire la même proposition à la retebef…

(1) Publicité commerciale, mais aussi idéologique, comme dans ce feuilleton où l’un des personnages assumait une charge publique tout en étant un parfait analphabète, référence on ne peut plus claire à l’actuelle président en fonction.