Archive for May, 2008

faut-il être de droite pour être de gauche?

Wednesday, May 28th, 2008

On critique depuis longtemps les gauchisss’ qui -paraît-il- font le jeu de la droite en
-se présentant aux élections (et donc en favorisant la droite, fatalement)(1);
-critiquant les partis “soc-dem”;
-manifestant à tout bout d’champ, voire, les salauds, encourageant des grêves qui ne seraient même pas justifiées par des licenciements-Vilvoorde;
-pire, prétendant que le marxisme, l’anti-capitalisme, l’anarchisme, l’anti-libéralisme ne sont pas morts et méritent d’être encore défendus.

On trouvera des traces de cela ici, mais aussi sur le site d’Un homme et ici, et puis encore dans le discours de la Sego.

Ça me rappelle de loin une conversation que j’avais eue avec un imbécile fier de sa carte PS et qui me lançait des “il faut bien se battre pour que certains ne meurent pas de faim” et des “Toi, évidemment, tu n’assumes rien, c’est lâche.”

Il est clair qu’après tous les renoncements du PS en matière sociale et toutes ses compromissions guerrières, tout va mieux.

Mais au fond, c’est vrai, je suis de mauvaise foi: il doit y avoir beaucoup moins de gens qui meurent de faim aujourd’hui en Afghanistan, en Irak (où, si, si, en un sens nous intervenons, puisque des soldats belges ont remplacé des Amerloques en Afghanistan, ce qui a permis à ses derniers d’aller en Irak).

Et donc, je pose la question:
Faut-il être de droite pour être de gauche?

Et je vous entends déjà poser la vôtre: Mais qu’est-ce qu’il veut dire par là?

Justement…


(1) les soc-dem n’ont qu’à s’en prendre au système électoral, et puis voilà…

avec les tripes du dernier communicant

Saturday, May 24th, 2008

Le Soir, journal indépendant, mais également fun, décalé et impertinent, comme le sous-entend l’article ci-lié, parvient à se faire une petite auto-promo tout en faisant de l’info, et ce sur un sujet, “ô combien d’actualité”, comme on dit quand on est décalé, fun et surtout impertinent:

La pub.

Et ses awards…

Le Creative Club of Belgium, dont je découvre l’existence, a tenu sa remise des prix annuelle (d’après le site, c’est la 5e, cette année), récompensant le meilleur cru en matière de pub.

(Malheureusement, au moment où je tape ces lignes, le palmarès n’est pas encore affiché sur le site, ce qui montre que le webmaster ne connaissait pas les résultats au moment où le jury en délibérait. Mais ceci est pure supposition de ma part et je ne voudrais pas être attaqué pour diffammation: je ne sais pas si c’est de la distraction ou de l’ignorance de la part du webmaster).

Le Soir se réjouit -en passant, presque négligemment- d’un succès qu’il ne doit qu’à son choix de la bonne boîte de créatifs, ce qui lui permet d’espérer de rester indépendant, fun et toute cette sorte de chose pendant, oh, au moins un an encore.

Indépendant de la profondeur d’investigation, de l’esprit critique et de la bataille des idées, tout au moins. Mais c’était ça ou ne pas être fun. Et donc.

C’est à coups de “chapeaux”, puisqu’il s’agit des prix remis par le “Cri-yé-tif cleub off Belgioum” à Knokke –A real short festival of creativity in Knokke-Heist, ´comme à Cannes´, je ne plaisante pas-, que l’on saluera notamment la campagne de pub d’Eurostar qui a -fort intelligemment- fait comprendre au chaland que “Londres est au coin de la rue”.

Quand on pense qu’il y a encore des cons qui prennent l’avion ou le bateau pour y aller, on se dit que la communication a encore des progrès à faire:

PUISQU’ON VOUS DIT QUE C’EST AU COIN DE LA RUE! ALLEZ-Y EN TRAIN!

-Ah ben justement, mon boulanger aussi, il est au coin de la rue, chérie, je prends vite le Thalys, je prends une demi-baguette et je reviens. Je te prends quelque chose?

Pleine d’humour, l’association des créatines a encore offert un award à la boîte de crayons qui a trouvé la géniale idée de la campagne Braille de cette année, encourageant les “Blind calls” (appels aveugles) sur les gsm pour qu’ils soient dirigés vers un appel payant en faveur de ladite association caritative. Je vous épargne les détails, ça n’a pas dû vous échapper.

À se demander si cette campagne n’a pas été aussi soutenue par l’un des trois opérateurs de téléphonie en sus -ou deux -ou les trois…

Je m’abstiendrai de divaguer sur le goût légèrement douteux de l’utilisation du terme “blind call” dans le cas qui nous occupe… Puisque la Ligue Braille a trouvé ça drôle, c’est que nous pouvons en rire aussi.

Enfin, gros regret de l’auteure de l’article (à qui je me refuse de faire du tort en lui faisant de la pub -sic!) sur la faible quantité de prix obtenus par les médias dits classiques (presse, télé, radio -ça y est, la télé est devenue un “classique”).

“Ce serait vraiment dommage (que la pub s’éloigne de ces trois médias) parce (qu’ils) restent de très beaux canaux de communication”

estime Jens Mortier, président du “Cicibi” et fondateur de l’agence Mortierbrigade -et, accessoirement, vainqueur d’au moins un prix mentionné par Le Soir, mais, c’est curieux, il ne fait pas le lien -un oubli, certainement, c’est con, il aurait pu le féliciter.

Et le même Jens de poursuivre:

“Tout l’art est de les renouveler.”

Car, oui, mauvais sujet que je suis, j’oublie d’insister sur le fait que les artistes d’aujourd’hui sont les publifères, égaux en qualité, sens, vitalité, créativité, audace, anticonformisme avec les Cézanne, Satie, Villon, Franquin (qui, reconnaissons-le, a commis quelques pubs pour arrondir ses fins de mois à Charleroi, mais il y a des hommes à qui on pardonnerait tout, ‘spas?) et autres Niemeyer (qui a fêté l’an dernier son centenaire et doit se réjouir de cette comparaison s’il me lit). Les communicants, publicitaires, designers et petites mains du marketing sont les membres d’une nouvelle grande famille d’artistes pour qui il conviendrait, c’est évident, de créer une appellation genre “10e art” ou “11e”, peut-être, je ne sais pas trop où on en est…

Et enfin, le même créatif:

“Une chose est sûre : les annonceurs commencent à prendre très au sérieux tous les nouveaux supports de communication.”

Jens fait donc de l’info, tout à coup, et est repris par le Soir qui ne savait plus trop comment terminer son article…

Et donc, au cas où tu ne l’aurais pas remarqué, toi qui, avec ta connexion à 100 unités par seconde, te colle des dizaines de zolies petites images en mouvement te prenant des plombes à charger alors que tu veux juste lire tes mails tranquille (Ça t’apprendra aussi à choisir un fournisseur gratuit, tiens),
toi qui, si tu possèdes un firewall, un anti-spam, six anti-virus et une douzaine d’autres protections, te coltinera encore des messages publicitaires sur ta boite e-mail parce que, nom de dieu, c’est de l’info, la pub, et qu’on ne rigole pas avec la liberté d’être informé, surtout quand c’est du gratuit,
toi qui espérais depuis dix minutes recevoir le sms de ton/ta petit(e) chéri(e) et qui, à la place, apprends que, si, si, si tu réponds dans les huit secondes, tu peux recharger ton compte pré-payé de 78 unités sans payer la dernière tranche -mais, et ça c’est nouveau, tu vas commencer à payer ce genre de message-,
toi qui te prends pour la troisième fois ce matin la tête dans un panneau JCDecaux sponsorisant généreusement des informations locales souvent vieilles de dix ou douze ans (and more) et accessibles parfois à ceux qui savent lire à une distance d’un escalier,
toi qui aimais à regarder les paysages sur la route, toi qui aimais encore naveter un peu, parce qu’il y avait moyen de compter les vaches et les poteaux téléphoniques entre Louvain-en-Brousse et Bruxelles-sur-l’Égoût, mais qui maintenant, parce qu’on les distingue parfois mal entre les panneaux d’infos gratuites, préfères dormir ou faire le Sudoku du… tiens, du Soir, pourquoi pas,

réjouis-toi, et apprends que les annonceurs “commencent” à prendre ces nouveaux supports au sérieux, et que donc ça ne fait guère que commencer,

tout ça…

Mais heureusement, il nous reste la résistance passive.

Si, si…

Et le Soir… Journal impertinent, fun et décalé…

À défaut du Grand Soir…

Et merde…

ceci est un mouvement (etc)

Monday, May 19th, 2008

Ciel! Ceci est la suite de ça.

Au début de l’année 1985, le MST (Mouvement des Sans-Terre) voulut entériner sa fondation en organisant un grand congrès auquel Tancredo Neves, l’alors élu président pas encore en fonction, avait promis de venir. Il ne vint pas et mourut d’ailleurs juste avant de prendre sa charge.

Entre le 29 et le 31 janvier eurent tout de même lieu ces trois jours de congrès au cours desquels le MST décida un paquet de trucs. Voici donc un nouvel extrait,

Un réflexe libertaire qui s’ignorait peut-être

d’après Sue Branford et Jan Rocha, Rompendo a cerca, a história do MST, Casa Amarela, São Paulo, 2004, p. 55-56:

“Après les trois jours de débat de Cascavel (voir le post précédent), on établit une liste de principes du mouvement, repris sous forme de quatre objectifs. Les deux premiers engagements -selon lesquels “la terre appartient à qui travaille dessus” et le mouvement s’engage dans la création d'”une société sans exploiteurs ni exploités”- possède un fort relent de socialisme. Les autres principes étaient moins utopiques et exprimaient des décisions prises plus tôt: le mouvement devrait être indépendant, ouvert à tous et dirigé par les travailleurs eux-mêmes.
Une fois établis ces principes, le congrès s’attaqua à la tâche principale de la réunion: la construction d’un mouvement national. Le premier problème était celui de la structure. Les Sans-Terre étaient inquiets à l’idée qu’un petit groupe de leaders puissants ne s’emparent du mouvement et, de ce fait, décidèrent de ne pas créer de charges individuelles telles que président, trésorier ou secrétaire-exécutif, mais, au contraire, de diriger le mouvement, tant que c’était possible, de manière collective, comme une administration décentralisée. Une autre bonne raison pour ne pas nommer un président national était qu’un leader en charge deviendrait une cible facile pour les balles des assassins. On décida d’élire des collectifs (qui existent jusqu’à ce jour) pour s’occuper de charges spécifiques, comme par exemple du recrutement, de l’entraînement et de l’administration financière. On insista encore sur la nécessité de la construction d’une démocratie interne. Les leaders et les coordinateurs devaient rester en permanence liés aux échelons inférieurs, dit-on, et chaque membre devrait participer au processus de prise de décisions, au travers de réunions et de discussions en plus petits groupes. Les informations devaient circuler à tous les niveaux.
On créa un comité de coordination nationale, avec des représentants des douze États où le mouvement était déjà organisé ou en voie d’organisation (ndt: le Brésil compte 26 États en plus du District Fédéral de Brazilia). Comme le comité déterminerait des “principes généraux” pour le mouvement, les délégués décidèrent de ne pas établir de politiques spécifiques. Celles-ci seraient décidées, dans les diverses régions, par ceux qui étaient directement engagés dans la lutte pour la terre. Dans le futur, cette décentralisation allait aider le mouvement à survivre dans les moments difficiles et devint l’une de ses caractéristiques permanentes. Le MST affronta la pire des crises de son existence lorsqu’il tenta, pour un bref moment, d’imposer une politique unique -le collectivisme de production agricole- à tout le mouvement.”

Ce n’est toujours qu’un extrait, histoire de vous donner un aperçu. Toujours en traduction copyleft, mais, cela dit, je dois préciser que je n’ai pas (encore) demander leur permission aux auteurs pour la réaliser.
Aide de lusitophones et assimilés toujours bienvenue.

Ceci n’est pas une maladie sexuellement transmissible (svp)

Thursday, May 15th, 2008

Je découvre progressivement (et je traduis au fur et à mesure des extraits de) la vie des Sans-terre brésiliens… Je découvre notamment que leur mouvement est plutôt jeune. Il n’est que lointainement apparenté à celui des Ligues Paysannes des années 50, par exemple, même si, hein, bon, mais quand même…

Et donc, premier extrait, pour vous, en primeur en français:

La rencontre de Cascavel, fondation du Mouvement des Travailleurs Sans-Terre (MST) au Brésil, 1984,

d’après Sue Branford et Jan Rocha, Rompendo a cerca, a história do MST, Casa Amarela, São Paulo, 2004, p. 42-43.

“Après trois jours de débat intense (après avoir notamment parlé avec les représentants de l’Église et ceux des syndicats et du PT, dont le jeune Lula, ndt), les principes du nouveau mouvement furent établis: il sera conduit par les travailleurs sans-terre eux-mêmes, indépendamment de l’Église, des syndicats et des partis politiques; il sera ouvert à toute la famille; il sera un mouvement de masse. Quatre objectifs furent définis: lutter pour la réforme agraire; lutter pour une société juste, fraternelle et pour la fin du capitalisme; inclure les travailleurs ruraux, locataires, métayers et petits agriculteurs de la catégorie des travailleurs sans terre; et garantir que la terre soit à qui travaille dessus et à qui vit d’elle.
“Prises en commun, les décisions de la rencontre de Cascavel montrèrent que, même à ce stade si précoce, les sans-terre essayaient, consciemment, de créer une organisation différente de tout ce qui existait alors au Brésil. À la différence des mouvements ruraux antérieurs (comme les fameuses Ligues Paysannes, qui dans les années 50’ avaient lutté pour les droits des travailleurs ruraux pauvres du Nordeste dans le contexte du mouvement syndical), les sans-terre voulaient fonder une organisation totalement indépendante. Ils croyaient encore être différents des Occupants (posseiros *) de l’Amazonie, qui luttaient exclusivement pour le droit de rester sur la terre qu’ils occupaient depuis plusieurs années. Les sans-terre se voyaient comme un nouveau type de travailleurs exploités –des personnes expulsées de leurs champs par la modernisation de l’agriculture- et, ceci étant, estimaient avoir besoin d’un mouvement qui leur soit propre, avec des objectifs spécifiques. Ils pensaient que la lutte pour la terre faisait partie d’un mouvement révolutionnaire plus large, pour en finir avec l’exploitation et garantir une justice pour tout le monde. Une vision utopique qui motivait principalement son appel vers les pauvres et les exclus.”

Traduction copyleftée du Hérisson

À suivre, donc… Bientôt un nouvel extrait.

PS: * posseiros: si quelqu’un a une meilleure traduction, je suis preneur.

septante

Monday, May 12th, 2008

Histoire de se faire une idée de mes lectures récentes…

On notera qu’aussi bien Boris Vian (qui compte dans l’Écume des jours le nombre de musiciens -septante-trois- au mariage de Chloé et Colin) que Proust (dans À l’ombre des jeunes filles en fleurs) utilisent le terme de septante plutôt que soixante-dix en certaines occasions. Peut-être chez Proust cela a-t-il un rapport avec un décompte biblique. Dans le chapitre “Autour de Mme Swann”:

“Mme Verdurin n’en était pas encore à la période d’incubation où on suspend les grandes fêtes dans lesquelles les rares éléments brillants récemment acquis seraient noyés dans trop de tourbe et où on préfère attendre que le pouvoir générateur des dix justes qu’on a réussi à attirer en ait produit septante fois dix.”

(phrase courte du sieur Marcel)

Dans le sketch “Le douanier“, Fernand Reynaud fait dire à l’étranger du village: mille neuf cent septante-deux.

D’après le site Wikipedia, les mots septante et nonante ont une histoire française également.

“C’est au XVIIe siècle, sous l’influence de Vaugelas et de Ménage, que l’Académie et les autres auteurs de dictionnaires ont adopté définitivement les formes soixante-dix, quatre-vingts, quatre-vingt-dix au lieu de septante, octante, nonante. Pourtant, les mots septante, octante, nonante figurent dans toutes les éditions du Dictionnaire de l’Académie française. Encore conseillés par les Instructions officielles de 1945 pour faciliter l’apprentissage du calcul, ils restent connus dans l’usage parlé de nombreuses régions de l’Est et du Midi de la France, ainsi qu’en Acadie.”

C’est intéressant, hein?

100.000 morts par jour… jusqu’à hier

Thursday, May 8th, 2008

Ils appellent ça les commodities

Ça fait plus chic. Ou alors, et je crois que c’est la bonne explication, ça permet d’éviter de se prendre la tête avec la conscience au moment de poser ses ordres de vente et d’achat, à trop penser que ce sur quoi on spécule et fait du profit, c’est des matières premières agricoles, autrement dit les trucs bizarres qui sortent du sol et qui empêchent les Haïtiens, les Camerounais et les Afghans de mourir de faim… d’habitude.

Moins maintenant.

Jean Ziegler, rapporteur spécial de l’ONU pour les questions de faim dans le monde, tire depuis des années le cordon de la clochette d’alarme (y’a pas le modèle corne de brume à l’ONU) comme un frappé: ça va nous péter à la gueule, ça va nous péter à la gueule. Déjà, jusqu’à hier cent mille personnes décédaient tous les jours des suites de carence alimentaire ou de faim.
Cent mille.
Tous les jours.
Et ça, c’était hier.
(Et donc meurent 6 millions d’enfants de moins de 5 ans par an)

Aujourd’hui, sous prétexte que
1) les spéculateurs n’arrivent plus à faire du profit sur les marchés technologiques, sur l’immobilier (cf. le scandale des subprimes) et autres gadgets dont les conséquences ne sont finalement que secondaires (emploi, misère sociale, confort, pression salariale, expulsions) et qu’il y a du blé à se faire sur le froment;

2) les voitures doivent continuer à consommer leur ration journalière de carburant, mais qu’il est temps de passer à autre chose et, ô surprise, elles peuvent aussi s’enfiler des huiles de colza et du jus de maïs –ah ben oui, tant pis, c’est d’autant moins de bouffe pour Dilma, Youssouf et Mohammed, ou alors ils n’ont qu’à travailler plus pour gagner plus de fric, et puis voilà;

3) les ajustements libéraux promus par le FMI et la Banque Mondiale dans les pays en développement, si, si, c’était de bonnes choses (mais pour qui exactement? Pour le commerce qui merde de partout? Pour les États déresponsabilisés? Pour les anciennes métropoles, les propriétaires de terrains, les spéculateurs et les multinationales de vente de semence et de chimie amusante? en tout cas pas pour les agriculteurs du tiers-monde, et pas non plus pour leurs collègues du Premier Monde), même si maintenant ils s’en mordent un peu les doigts –mais juste un peu, et pas question de réclamer des renationalisations, oh, on n’est pas des communistes, quand même;

4) le dollar est si bas qu’il fait l’humilité;

5) les Chinois et les Indiens sont entrés sur le marché de la consommation internationales et que ces petits salauds, tels des Amerloques et des Britons, veulent manger de la viande trois fois par jour (enfin, on va commencer par trois fois par mois, mais ils sont tellement nombreux…), et que donc ça va diminuer d’autant les surfaces agricoles, sauf qu’en même temps ces sales bêtes, il faut bien qu’elles bouffent, donc ça va augmenter d’autant les surfaces agricoles, j’espère que vous avez suivi;

6) il faudra bien trouver d’autres raisons pour s’ingérer dans les politiques internes des pays qui prétendent ne plus être colonisés;

Pour toutes ces raisons, donc, 850 millions de personnes sont directement menacées par la faim en ce moment même.

Là.

Maintenant.

Quand vous lisez ces lignes.

Parce que spéculer sur les “commodities” est ce qu’ils ont trouvé de plus rentable, de plus sûr, en ce moment.

(Au passage, ça arrange super-bien le Brésil qui est exportateur net de ces trucs-là… C’est vous dire si on en parle, ici)

Le problème, c’est que les chiffres sont devenus tellement énormes qu’ils ne siginifient plus grand-chose dans l’esprit du francophone moyen qui a accès à internet. Surtout s’il pense aux difficultés qu’il va avoir ce mois-ci à payer sa facture de téléphone portable.

De même, on aura beau accumuler les différents émoluments, salaires, défraiements, appointements, traitements, honoraires, jetons de présence, et autres rémunérations que cumulent les élites de nos nations, aussi bien publiques que privées, quand on découvre les pointes icebergiennes de leurs frais de bouche, faux-frais, notes de frais et autres avantages plus ou moins frais, on ne peut s’empêcher de soupirer d’aise à l’idée que ce ne sera pas à nous de déclarer tout cela au fisc. Ni à eux, d’ailleurs, bien souvent…

Les chiffres devraient dire quelque chose pourtant.

Jean Ziegler ne sera bientôt plus là (on ne le lui souhaite pas, mais il ne rajeunit pas, le pauvre) pour marteler qu’un gosse meurt toutes les cinq secondes –de faim. Et que demain, ce sera toutes les quatre secondes. Ou toutes les trois…

(À écouter encore ici, sacré Jean)

L’idée cependant que la résolution à court, moyen et long terme de ce problème serait que nous consommions moins d’à peu près tout (y compris de viande et de tabac, de vin, de bière et de fromage, de sauces, de truffes et de chocolat, et même de café… Non, pas de café… Ah ben, si de café aussi, merde…) pour que d’autres puissent s’empiffrer d’une poignée de grains de riz et d’un bol de gruau d’avoine en plus d’une papaye au dessert, cette idée ne fait pas encore son chemin dans l’esprit de la toute grande majorité –de la quase-totalité des gens du Premier Monde.

L’idée que nous devrions habiter plus près de notre travail, ou que nous devrions partager notre voiture, ou même l’abandonner (et non pas la revendre pour en acheter une moins polluante) et prendre le train et le bus, le taxi en cas de nécessité, plutôt que de penser à coupler notre moteur au gaz ou au biocarburant, l’idée que nous devrions mettre un pull quand il fait seize degrés et pas monter le chauffage (une idée qui m’avait marqué dans des petits tracts dessinés par Franquin quand j’avais dix ans), que nous devrions repenser à toute cette énergie que nous faisons voyager sur des milliers de kilomètres, plutôt que de transformer nos usines au charbon en usines au tourteau, ces idées-là non plus ne font pas encore beaucoup de petits dans nos têtes. Pourtant elles commencent à prendre de l’âge, ces idées.

Lorsque le Brésil est critiqué pour vouloir se faire un peu de beurre sur les bagnoles à l’éthanol (ici à la canne à sucre), on oublie un peu vite que, d’une part, c’est nous qui consommons l’énergie qu’ils vont produire, d’autre part, ce que fait le Brésil (déboiser, pâturiser, chimiser, rendementiser, irriguer, désertifier, exil-ruraliser, bidonvilliser, etc.), l’Europe et les USA l’ont déjà fait au cours des trois derniers siècles et qu’on devrait commencer à reboiser avant de les montrer du doigt, qu’enfin le plus gros brûleur de nourriture (du maïs), c’est déjà, c’est encore les USA…

De même que l’on craint l’arrivée sur le marché de deux milliards et quelque d’Indiens et de Chinois qui voudraient se gaver de filet mignon, de bordeau rouge et de Roquefort Société, mais ils sont encore très loin, en chiffres absolus comme en chiffres relatifs, de titiller les statistiques des héritiers dorés de l’ère de l’industrialisation. Je veux dire: nous…

Et youpie! Vive Adam Smith, vive von Mieses, vive Friedman!

Et puis vive Ricardo, un peu plus pessimiste, quand même

it’s christmas in heaven…

Saturday, May 3rd, 2008

Un jour,

Toutes les économies de tous les pays seront formidables.

Toutes les dettes seront remboursées ou stabilisées.

Le commerce sera vraiment libre et équitable.

La concurrence sera loyale, les prix conformes à la loi de l’offre et de la demande et la satisfaction de chacun rencontrée.

Chaque région du monde cultivera ses propres compétences et l’excellence de sa population.

Les entreprises pourront se développer harmonieusement et les travailleurs choisir leur emploi.

Les subventions et les taxes douanières auront disparu.

Le commerce aura apporté la paix dans tous les pays et toutes les balances commerciales seront positives.

Et même, les entrepreneurs, les actionnaires, les patrons associeront le souci de la rentabilité à celui des conditions de travail des employés et de l’impact environnemental de leur production.

Le rêve d’Adam Smith.

On échangera du vin du Portugal contre des draperies d’Angleterre, quoi…

Youpie…

Vous n’avez pas un peu l’impression qu’on se fout de votre gueule?

(Nota: Imaginez un instant, déjà, que toutes les balances commerciales soient positives, et revenez me voir après…)

Rome, ville fermée

Thursday, May 1st, 2008

C’est pas que la victoire de Rutelli aux élections municipales de Rome m’aurait plus réjoui que ça: je n’en aurais pas parlé.

Mais qu’Alemanno, vieux facho, se soit emparé des rênes de la “Ville ouverte” de Rossellini et qu’elle revienne entre les mains des héritiers de Mussolini, ça la fout un peu mal, quand même…

Décidément, la démocratie, ça marche du tonnerre de dieu, ces derniers temps…