“la saison de reproduction des cols blancs…
… coïnciderait-elle enfin avec celle des cols bleus aux USA.”
Non, il ne s’agit pas de canards (déchaînés), mais de l’expression utilisée par les médias US pour parler des employés de bureaux supérieurs (cols blancs) et des ouvriers (cols bleus). C’est mignon, non?
Or, jusqu’il y a peu, constate cet article du magazine plus-ou-moins-mais-pas-trop progressiste-genre-pro-Obama The Nation, les luttes syndicales des uns et des autres ne correspondaient guère. Mais il semble que le vent tourne (il y a d’ailleurs un joli “manifesto” comme on dit en italien, en tête d’article, qui rappelle les plus belles heures de la propagande maoiste, ce me semble): les cols blancs, eux aussi, sont maltraités par les patrons (grrr). Alors ils rouspètent. Enron, la crise des subprimes, les “permatemps“, c’en est trop!
Notons que des problèmes comme celui de faillites plus ou moins arrangées ou de crise sur les emprunts, lorsqu’elles ne concernaient que les (très) bas revenus, n’intéressaient pas le politique, mais comme ils commencent (enfin!) à toucher de plein fouet cette classe sociale normalement privilégiée que sont les employés de bureau de type “upper middle professional class” -comme les appelle l’article- alors, évidemment, ça change tout.
Que les ouvriers se prennent des délocalisations par milliers dans la gueule, c’est normal: c’est la preuve que le libéralisme fonctionne, ça a été le cas pendant deux cents ans, pas de raison de changer.
Que les employés, mais aussi petits actionnaires via leur fond de pension, d’une grosse compagnie énergétique se prenne une faillite et mette des milliers de pavillonards sur le carreau, retraite (privée) comprise, et tout à coup les mass-medias se disent que, tiens, c’est pas juste, dis donc, et que, quand Wall Street pique du nez et que surgissent des “petits propriétaires emprunteurs de tous les États, unissez-vous”, même les très républicains congressistes en appellent à un allègement des dettes -alors que les ouvriers expulsés depuis la fin des trente glorieuses, eux, sont toujours en train de graisser leurs riot-guns dans leurs caravanes avec l’espoir de liquider un de ces sales petits Coréens qui leur ont piqué leur boulot au cas où ces sales jaunes venaient à visiter une ville sinistrée pour rigoler.
Dans l’article, c’est, semble-t-il, dans le giron de Microsoft(1) que des employés maltraités (permatemps: permanents temporaires) se sont réveillés parmi les premiers et ont commencé la révolte.
Ira-t-elle jusqu’à la lutte finale? Les “Dilberts of the world” iront-ils, tous, mug dans le mug, jusqu’à la grève générale de la souris?
Pousseront-ils le bouchon jusqu’à détruire leurs ordinateurs portables à la manière des ouvriers des siècles précédents qui manifestaient par là (eux détruisaient leurs machines, pas leurs portables, camarade) leur mécontentement (au risque d’abandonner leur droit à naviguer sur la Toile)?
Les verra-t-on signer des pétitions en masse on-line (auquel cas il leur faudra éviter l’action précédente)?
La révolution technologique tournera-t-elle à la révolution tout court?
On n’ose y croire -avec un n’, hein…
(1) Et ce malgré Akhtar Badshah, directeur des programmes communautaires globaux, qui, dans un interveiw accordé à CartaCapital, ici, affirme que Microsoft a toujours été à la pointe du souci social depuis 1983, et que, même que, dis donc, c’est dans l’ADN de la société, ce n’est pas du tout intéressé, cette fibre sociale et philanthropique. Dis donc.