Archive for the ‘lectures dispensables’ Category

The Last Valley (1970)

Monday, September 13th, 2010

J’ai revu récemment un “bon vieux film”…

Dirigé par James Clavell (Monsieur “Shogun”), avec des acteurs à l’époque jeunes et brillants: Omar Sharif et Michael Caine, parmi bien d’autres. En pleine guerre de Trente Ans, les mercenaires passent la saison chaude à faire la guerre, tantôt pour un camp, tantôt pour l’autre, au gré des décisions des capitaines, que Michel Onfray appelle avec admiration Condottiere, et qui ne sont rien d’autre que des aventuriers, le plus souvent sans aucune compassion.

Quand l’hiver approche, ils pillent les sédentaires pour ravitailler les campements. il vaut mieux ne pas être sur leur passage.

Au début du film, Vogel, un instituteur en fuite (Omar Sharif), tente d’échapper à une meute d’une vingtaine de ces loups menés par un capitaine froid, athée (Michael Caine). Il arrive dans un village qui semble en paix et parvient à convaincre le capitaine de ne pas raser le village et de l’occuper pour survivre.

Les villageois, menés par le plus riche d’entre eux (Nigel Davenport, impressionnant dans son rôle d’exploiteur local, mécontent de se retrouver un étage en dessous) et un prêtre pur et fanatique (Per Oscarsson, convaincant), vont devoir subir l’occupation. Les mercenaires, partagés entre catholiques, protestants et cyniques nihilistes, vont avoir du mal à rester calmes. Les négociations sont périlleuses et Vogel est au milieu, détesté par -presque- tous.

Tout l’intérêt du film réside dans ces dialogues, brefs, saccadés, voire stylisés, mais peut-être plus proches pour cela de la réalité, quand on songe à la rapidité avec lesquelles des hommes et des femmes doivent souvent prendre des décisions cruciales, impératives, dans des situations précaires.

Il n’y a pas de paroles fortes, résumant une réalité, ou de phrases saisissantes. Les vérités sont prosaïquement posées, les points de vue changeants, en fonction des intérêts, les esprits alternativement froids et chauds travaillent la psychologie du prochain au corps, avec le sens de la mesure, de la conscience qu’un coup trop loin mène le fou dans la gueule du cheval et que la reine peut tomber devant n’importe quel pion. C’est une partie d’échecs où il y a autant de joueurs que de pièces et où il n’y a pas de camp bien établi.

La morale est battue en brèche, l’éthique écrasée, l’individu mis à mal -mais défendu-, sous le poids de la nécessité. Vogel devient l’intermédiaire indispensable de tous, à l’origine pour préserver sa propre vie -et peut-être motivé par un dernier soupçon d’humanité-, et il est haï pour cela.

Ne vous attendez pas à des scènes d’action remarquables. L’action, elle, est là, mais, malgré l’excellente qualité des acteurs, elle manque de vigueur et de vraisemblance. Qu’importe, ce n’est pas ça qui motive le film, mais une longue interrogation sur ce qui peut encore faire qu’un homme reste un homme quand tout ce qui le construisait disparaît dans les décombres d’un massacre. Et plutôt qu’un film de guerre, il s’agit d’une réflexion sur ce qu’il reste de l’homme au coeur de la guerre. Un Platoon avant la lettre, en somme.

Quelques critiques:
http://movies.nytimes.com/movie/review?res=9C0CE7DC163BE53BBC4151DFB766838A669EDE

http://thisislandrod.blogspot.com/2010/02/last-valley-1970.html

http://www.in70mm.com/news/2008/valley/index.htm

Marius Alexandre Jacob

Monday, July 26th, 2010

ou Alexandre Marius Jacob, suivant son goût, était un anarchiste illégaliste. Cela signifie qu’il se contentait de trouver un moyen illégal pour exproprier les riches en faveur des plus pauvres. Robin des Bois, sans le souci du roi Richard. Sa correspondance est passionnante. Je vous en livre un extrait:

août 1905: il vient d’être condamné à 20 ans de bagne, qu’il ne terminera qu’en 1927. À sa mère:

“Si la loi était juste, elle n’aurait pas besoin de tout son attirail de gendarmes, de policiers, de soldats armés de fusils, de sabres et de revolvers pour la faire observer: tous les hommes s’y soumettraient sans contraintes, comme l’on se soumet aux lois naturelles. Ai-je besoin qu’un gendarme me dise de ne pas mettre la main dans le feu (…). Or si le juge s’entoure de tant de précautions, c’est parce que sa justice, ses lois ne sont que des droits usurpés par la force et la victoire. C’est te dire enfin que c’est une atroce plaisanterie de parler d’impartialité dans ces sortes d’affaires où la force et la violence décident seules du droit.”

(D’après: A. M. JACOB, Écrits, éd. L’insomniaque, Quincy-sous-Sénart, 2004, p. 127)

presse satyrique

Friday, July 23rd, 2010

Non, non, le titre est voulu…
Oui, je sais, on dit “satirique”. C’est juste un jeu de mots, comme sait si bien les faire mon hebdo favori, auto-qualifié d’ailleurs tel. C’est qu’on en parle beaucoup ces derniers temps, de la presse satirique, dans la presse normale et dans les couloirs du pouvoir. Pour avoir dénoncé plusieurs ministres du gouvernement et divers scandales à plusieurs échelons, le Canard enchaîné est l’objet des foudres des dirigeants français. Lui et Mediapart, un organe (prétendument) indépendant en ligne, commis par Plenel, de sinistre mémoire, puisqu’il s’agit du Monsieur-Téléachat du Monde, comme le dénonçaient en son temps à juste titre le Plan B et CQFD.

Si je sais pourquoi le Canard s’auto-intitule “journal satirique paraissant le mercredi”, consacrant ainsi le droit à la satire en France, peu limité, il faut le reconnaître, je regrette amèrement que, lorsqu’il est évoqué par des tiers, il ne soit pas plus souvent qualifié de “journal d’investigation”, ce qu’il est, même s’il l’est sous une forme particulière.

Il faut reconnaître et regretter que le journalisme d’investigation est devenu une denrée très rare en francophonie1. À dire vrai, à part ceux que j’ai nommés plus haut2, je serais curieux de savoir quels autres journaux peuvent revendiquer décemment ce qualificatif.

Certes, le Monde Diplomatique peut y prétendre par moments, mais c’est surtout ce que j’appellerais un “journal sérieux de gauche”. C’est-à-dire un mensuel qui fait état de constats clairs sur base de faits connus ou connaissables aisément. Il fait un travail extrêmement important et naturellement indispensable, nous proposant de réfléchir avec un oeil de gauche sur des phénomènes accessibles à nos yeux et nos oreilles. En outre, si on peut parfois trouver des infos intéressantes dans l’Express, le Nouvelobs ou d’autres revues du même tonneau, au moins dans le Monde Diplo est-on certain du sérieux et du point de vue de gauche qui parcourt tout le journal.

Je pensais à cela d’ailleurs en lisant le dernier livre de Joseph Stiglitz (Freefall), dans lequel l’auteur est en possession de toutes les informations suffisantes pour dénoncer le capitalisme dans son essence même et ne le fait pas, tentant de rattraper l’irrattrapable en le saupoudrant de keynésianisme. Mais bon, je laisserai ça pour une autre fois, c’est promis (comme mon traité d’économie depuis des années, je sais). Ce que je veux dire, c’est que le Monde Diplo, proposant par exemple à Frédéric Lordon une colonne régulière pour analyser l’économie avec les mêmes informations, parvient à te me descendre en beauté le capitalisme in se et à proposer des idées véritablement de gauche, que même Mélenchon il paraîtrait un dangereux défenseur des marchés à côté.

Non, des journaux d’investigation (en papier), il y en a peu. Je veux dire, des journaux qui proposent de véritables enquêtes sur le terrain, des révélations qui nous éclairent sur ce qui se trouve en dessous du tapis et qui en tirent des faits qui permettent de généraliser l’existence d’un système, c’est l’exception. Certes, sur internet, ils sont légion. Mais nous sommes encore rares à nous documenter véritablement en ligne. Alors, un journal d’investigation papier, évidemment, ça revient très cher. Le Canard a la chance (qu’il s’est construite) de reposer sur une réputation et un capital indépendant (pas de pub, pas de parti, pas de proprio) qui en fait l’astre le plus remarquable de la sphère médiatique (à ma connaissance) en matière d’investigation journalistique.

Pour s’en convaincre, il suffit de lire sur wikipedia la liste des dossiers révélés par lui au cours de son histoire et de s’apercevoir que, dans ce monde de canards, ce vilain petit était en fait un grand beau cygne…

Quel dommage qu’il ne soit pas resté noir, comme à ses débuts…

  1. A part sur internet, comme par exemple dans lejim.info, tenu par mes potes. []
  2. Mais le plan B a disparu []

Le jour des fous (1)

Wednesday, June 23rd, 2010

(première partie d’une nouvelle écrite il y a déjà quelques années. À suivre par épisode)

Il était une fois une région du monde qui, comme presque toutes les régions du monde, était soumise à des dieux puissants qui se foutaient en réalité de ce qui pouvait bien s’y passer. Cette région du monde, comme la plupart des régions du monde habité, abritait des terres cultivables, des rivières, des puits, des murs, des maisons, des places, des statues, des temples…
Comme dans toutes les régions du monde habité d’hommes et d’images de dieux, on y retrouvait une petite quantité de personnages, plus puissants, qui faisaient office de prêtres.

Dans cette région du monde, les dieux les plus puissants s’appelaient Poséidon, Hadès, Zeus, Heraklès, Arès… Il y avait bien aussi quelques déesses, mais, comme souvent, elles servaient de faire-valoir à leurs conjoints. Et plus aucun habitant ne se souvenait d’un vieillard qui aurait raconté aux enfants comment, avant, bien avant, Athéna, Artémis, Héra ou quelqu’autre avait organisé la vie des familles…

Dans cette région du monde, comme dans beaucoup de régions du monde, les dieux les plus importants étaient arrivés dans les bagages de puissantes castes dominées par les pères, montés sur des chevaux, accompagnés de légendes toutes neuves et d’armes en fer, de rites impérieux et d’une certaine révérence pour le droit de conquête et de richesse qui jusque là n’avait pas été une priorité…

Il était une fois, donc, une région du monde comme beaucoup d’autres. Celle-ci se trouvait au bord de la mer, une mer magnifique, sans marée, une mer où les histoires de dauphins le disputaient aux récits de sirènes, une mer qui fournissait aux hommes une nourriture illimitée et apportait les commerçants d’autres régions du monde, mais aussi l’angoisse des naufrages et des attaques barbares. Une région du monde où l’autre, l’étranger, était considéré avant tout comme un danger, et ce n’était qu’ensuite, s’il avait fait ses preuves, qu’on pouvait envisager de le laisser entrer pour montrer ce qu’il avait à vendre.

Une région du monde assez commune, au fond, où les hommes étaient heureux de faire partie du bon sexe, où les femmes qui survivaient à leurs premières couches se félicitaient d’avoir choisi les bonnes divinités, les bons rites, les bonnes prêtresses, où les enfants qui passaient 7 ans se réjouissaient de pouvoir jouer une ou deux heures après avoir travaillé au champ, au port ou dans l’atelier de leurs pères -quand ceux-ci vivaient encore…

Une région du monde où le soleil était généreux, régulier, peu changeant, où les neiges étaient rares et où les pluies venaient presque toujours lorsqu’il le fallait pour combler les puits et les citernes -et sans doute était-ce la raison pour laquelle les pères des pères de ses habitants l’avait choisie pour demeurer. Une région du monde dure et exigeante, comme toutes les régions du monde, où les hommes travaillaient du matin au soir pour permettre à leurs enfants de faire plus tard comme eux, et ainsi de suite. Une région où, comme dans toutes les régions du monde, on s’arrêtait de travailler avec la nuit tombée…

Une région où, de temps en temps, une canicule, une tempête, une maladie peu connue, une attaque imprévue, emportaient la moitié des richesses et des vies de la cité. Où les survivants avaient pris l’habitude de remercier les dieux d’avoir épargné l’autre moitié, et l’on rebâtissait les murs, les temples, on réparait les bateaux, les filets, on réapprenait à vivre sans les morts, on se dépêchait de se remarier, de refaire des enfants, on veillait à ce que les patrimoines parviennent aux héritiers, et on engraissait un peu les prêtres afin d’assurer leur médiation entre le pauvre profane ignorant et le sacré inconnu…

En attendant la déportation

Monday, May 24th, 2010

“Si la loi était juste, [un juge] n’aurait pas besoin de tout son attirail de gendarmes, de policiers, de soldats armés de fusils, de sabres et de révolvers pour la faire observer: tous les hommes s’y soumettraient sans contrainte, comme l’on se soumet aux lois naturelles. […] Or, si le juge s’entoure de tant de précautions, c’est parce que sa justice, ses lois ne sont que des droits usurpés par la force et la victoire.”

J’adore ces phrases…

Elles sont de Alexandre Marius Jacob, un anarchiste illégaliste du début du XXe Siècle. Il écrivait cela à sa mère quelques jours avant sa déportation pour le bagne de Guyane, en 1905. Elle aussi était en taule… C’était l’époque où tout ce qui était trop proche d’un anarchiste était fatalement suspect.

(Alexandre Marius JACOB, Écrits, Nouvelle édition revue et augmentée, éd. l’Insomniaque, Quincy-sous-Sénart, 2004, p. 127)

égalité et liberté ou liberté et égalité?

Tuesday, April 27th, 2010

Une des critiques qui nous tombent régulièrement sur le râble, libertaires, anarchistes, anti-autoritaires, anarcho-communistes et autres zigotos aux appellations les plus diverses, c’est que nous serions incapables de faire un choix entre la liberté et l’égalité quand le cas se présente. Dit autrement, on nous demande, en fait, de nous prononcer quant à celle de ces deux valeurs que nous mettrions en premier sur une échelle.

Étant entendu dans le piège que si nous choisissons la liberté, nous sommes d’infâmes capitalistes qui nous cachons derrière de prétendus nobles idéaux et que si nous choisissons l’égalité, nous ne sommes que des staliniens qui tentons de nous cacher sous une couette noire et rouge.

Le piège est grossier et nous ne devons pas nous y laisser prendre, car en fait ce sont les deux positions prétenduement antagonistes et classiques qui s’avèrent contradictoires.

Il n’y a pas de liberté sans égalité et il n’y a pas d’égalité sans liberté. Je le dis et l’affirme de la manière la plus absolue, sans me référer à des limites du genre “égalité des droits”, “égalité des chances”, “liberté d’entreprise” ou toute autre chose.

Il est évident qu’une telle affirmation comporte des conséquences que ni les socialistes autoritaires, ni les sociaux-démocrates, ni les capitalistes libéraux n’accepteront d’assumer.

Premièrement, la liberté ne peut se satisfaire d’aucune limite en dehors de celles que possède la nature humaine, mortelle et corporelle. Notre liberté ne se pose pas en terme de capacité à accumuler les biens et les richesses, mais à défendre temporairement contre nos propres limites physiques nos capacités à penser, agir, créer, fabriquer, enseigner, apprendre, produire et reproduire, aimer et rechercher le bonheur, la satisfaction et le contentement en attendant la mort.

Toute autre liberté est fictive, à commencer par la liberté d’entreprendre, par exemple, qui est régie par des principes tellement complexes et qui, surtout, implique automatiquement des limites dans le champ des voisins de celui qui entreprend, qu’en réalité ce type de liberté s’avère être une prison. La propriété elle-même, par beaucoup considérée comme la plus importante des libertés, tant d’une personne que d’un État, est en fait la propre cage de l’individu qui a accepté de se transformer en personne, c’est-à-dire en titulaire des titres de biens matériels et immatériels qui lui serviront de limites et l’encercleront par opposition aux autres qui seront encerclés aussi, à la fois par les limites de cette première personne, par celles de toutes les autres personnes et par les leurs propres.

La liberté, cependant, implique bien d’autres choses, comme par exemple celle du choix intellectuel de ses propres valeurs, de sa métaphysique, de sa définition de la vie, choix qui doit absolument être individuel et ne peut être limité par une autre notion comme celle de la “liberté du père à choisir la religion ou l’éducation de ses enfants”. Tout doit être fait, dans une société libertaire, pour que la famille ne soit que le lieu privilégié, mais aussi éventuel, non forcé, du partage de l’affection et de l’apprentissage de bases de vies dans la société libertaire, non dans un esprit sectariste, élitiste, corporatiste, patriarcal, ou autre chose du même goût.

L’égalité est indispensable à cette forme de liberté individuelle, et cela signifie qu’en aucun cas l’expression de la liberté d’un individu puisse être soumise au prétendu droit d’une personne, morale ou physique, à détenir en sa propriété, temporairement ou définitivement, les moyens qui permettraient à un ou plusieurs individus de se prémunir contre le froid, la chaleur, la faim, la soif, la maladie, l’inconfort ou toute autre chose qui accélère la mort. Par personne morale, j’entends aussi ici un État ou une administration “publique”.

L’égalité est donc indispensable à la liberté, et la “liberté d’entreprendre”, tout comme la propriété, ne doivent pas créer l’illusion du contraire.

Par ailleurs, il doit être évident que l’égalité ne saurait se prévaloir d’une première place par rapport à la liberté, car, si cela était, l’exercice même de l’égalité s’en trouverait empêché. En effet, comme l’égalité doit être l’égalité devant la recherche du bonheur, de la satisfaction et du contentement, si elle devait être soumise à un appareil qui prétendrait la garantir (comme un État, un syndicat, un parti ou tout autre appareil d’un type ou d’un autre), elle perdrait aussitôt son essence, puisque son objectif devrait être de permettre aux individus de choisir précisément chacun selon ses envies et en fonction de sa propre individualité ce qu’il estime être sa propre quête comme vue ci-dessus, dans les limites de sa mortalité. Aucun appareil ne peut prétendre savoir légitimement ce qui est bon ou non pour chaque individu.

L’égalité ne saurait non plus se soumettre à une autorité spirituelle (religieuse, nationale, communautaire, scolaire, autre) quelconque -et fatalement patrimoniale, mais imaginons un instant que ceci n’entre pas en compte, même si nous savons que c’est impossible-, car, ce faisant, elle se réduirait d’autant et cette égalité disparaîtrait au profit d’une uniformité qui ne signifie pas du tout la même chose.

En définitive, donc, liberté et égalité, loin d’être antinomiques ou en concurrence (ce qui serait un comble), sont correlées et, j’oserais le dire, les deux manifestations d’une seule et même chose: le droit de tout individu dans son humanité et de toute l’humanité exprimée dans chacun de ses individus à poursuivre temporairement -c’est-à-dire jusqu’à sa mort- sa propre recherche du bonheur, de la satisfaction et du contentement, dans les seules limites que nous avons dites ici plus haut.

Pour que ce droit puisse se manifester pleinement, deux entraves doivent en être écrasées impitoyablement, comme diraient les anars les plus historiques, de Goodwin jusqu’à Debord, c’est l’État et la propriété. L’un d’ailleurs n’allant pas sans l’autre, et vice versa.

Proust, ma chère

Monday, April 19th, 2010

De la politique étrangère comme illustration de la relation possessive.

Et vice versa:

“les préparatifs de guerre, que le plus faux des adages préconise pour faire triompher la volonté de paix, créent au contraire, d’abord la croyance chez chacun des deux adversaires que l’autre veut la rupture, croyance qui amène la rupture, et quand elle a eu lieu cette autre croyance chez chacun des deux que c’est l’autre qui l’a voulue.”

C’est déjà pas mal comme citation, mais la suite vaut la peine également;

“Même si la menace n’était pas sincère, son succès engage à la recommencer. Mais le point exact jusqu’où le bluff peut réussir est difficile à déterminer; si l’un va trop loin, l’autre qui avait jusque-là cédé s’avance à son tour; le premier, ne sachant plus changer de méthode, habitué à l’idée qu’avoir l’air de ne pas craindre la rupture est la meilleur manière de l’éviter (ce que j’avais fait ce soir avec Albertine), et d’ailleurs à préférer par fierté de succomber plutôt que de céder, persévère dans sa menace jusqu’au moment où personne ne peut plus reculer. (…)”

(La Prisonnière, Garnier Flammarion, 1984, p. 471-472)

Proust continue à comparer sa “tendre guerre” de jalousie avec la politique étrangère de la France pendant quelques lignes…

Avouez qu’on ne saurait mieux dire…

Film catastrophe

Monday, April 12th, 2010

Caramba… J’en avais entendu parler, mais j’espérais encore que ce fût1 un hoax, un faux bruit ou… enfin, bref, je ne m’attendais pas à ce que Luc Besson fasse un film sur l’un des personnages de la Bande Dessinée que je préfère, Adèle Blanc-Sec. Me voilà à nouveau “forcé” d’aller me taper un blockbuster, tout ça parce que des cons aiment les mêmes choses que moi… Ah si seulement il pouvait aussi être anar… Mais il n’y a aucun signe de cela dans son oeuvre somme toute conventionnelle et faite pour plaire avant tout à un public d’adolescents attardés.

Désolé si vous aimez Besson…

  1. Élèves du cours de français, ici gît un subjonctif imparfait non nécessaire. []

Se taper un bon philosophe

Monday, March 29th, 2010

“Parfois, il faut faire un effort pour se taper un philosophe,” me disait récemment un ami dont les moeurs ne sont plus à vanter.

Je vous propose d’aller visiter le site de Normand Baillargeon qui, outre qu’il est hautement fréquentable (Normand, pas le site), fourmille de réflexions et d’exposés drôlatiques et pertinents (le site, pas Normand, rhooo)

en voici un exemple, piqué dans un post récent. Normand, j’espère que tu ne m’en voudras pas: c’est pour ta pub.

Comme nous l’avons vu plus haut, l’idée de Dieu a été jugée inconsistante par plusieurs philosophes, pour un bon nombre de raisons. En voici une, sous la forme d’un paradoxe concernant l’omnipotence. Il a été imaginée par C. Wade Savage et il a à ce point pénétré la culture populaire qu’il est même évoqué dans un épisode de la série Les Simpson.
Dans Weekend At Burnsie’s (diffusé en 2002) , on assiste en effet à l’échange suivant entre Homer et son pieux voisin, Ned Flanders :
Homer : — Hé! J’ai une question à te poser. (Il saisit un bout de papier) «Dieu pourrait-il réchauffer une tortilla au four à micro-ondes jusqu’à ce qu’elle soit tellement brûlante que lui-même ne pourrait pas la manger?»
Ned : — Mais bien sûr qu’il le pourrait … quoique … Wow! Pour un casse-coco, c’est tout un casse-coco!
Homer : Tu comprends maintenant tout ce que je dois endurer.
Ned : Heureusement, j’ai juste ici un livre tout plein de réponses. (Il sort une Bible et la tend à Homère, qui la feuillette).

Homer vient de retrouver, à sa manière bien particulière, l’intriguant paradoxe de Wade portant sur l’omnipotence divine de Dieu appelé le Paradoxe de la pierre.
Voici comment celui-ci le formulait en 1967 — X désignant ici n’importe quel être :
1. Ou bien X peut créer un pierre que X ne peut soulever, ou bien X ne peut pas créer une pierre que X ne peut pas soulever.
2. Si X peut créer une pierre qu’il ne peut pas soulever, alors il existe nécessairement au moins une tâche que X ne peut accomplir, à savoir soulever la pierre en question.
3. Si X ne peut pas créer un pierre qu’il ne pourrait soulever, alors il existe nécessairement au moins une tâche que X ne peut accomplir, à savoir créer la pierre en question.
4. Il existe donc au moins une tâche que X ne peut accomplir.
5. Si X est omnipotent, alors X peut accomplir n’importe quelle tâche
6. Donc, X n’est pas omnipotent.

Tout un casse-coco!

Des consciences de ce monde

Friday, March 19th, 2010

Albert Einstein,
Hannah Arendt,
Noam Chomsky,
Emma Goldman,
Alexander Berkman,
Esther Benbassa,
Leonard Cohen,
Shlomo Sand,
Michel Staszewski,
Isaac Asimov,
Israel Finkelstein,
Neil Silberman,
Woody Allen,
Karl Marx,
Groucho Marx,
Rosa Luxembourg,
Gideon Levy,

et combien d’autres qui m’aident à me sentir humain…