Le hérisson révolutionnaire Le monde selon thitho

juillet 9, 2010

Le-du jour

Filed under: Uncategorized — tito @ 6:22 am

Il y a quelques années, je publiais pour un petit comité une espèce de mini-rapport d’informations plus ou moins pertinentes trouvées plutôt moins que plus au hasard dans la presse, italienne, française ou belge en général.

Voici ce que ça donnait (en prenant ce 8 juillet comme référence):

Le logique du jour
Les frais bancaires vont-ils bientôt baisser, demande Libé.
Allons donc: on voudrait que les banques cessent de nous faire payer pour leur prêter notre argent afin qu’ils nous le prêtent? C’est du communisme, madame!

Le Simplet du jour:
Christine Lagarde «fait confiance aux banques pour prendre des engagements et les respecter».
Comme il faut leur faire confiance pour ce qui est de surveiller leurs propres troupes en matière financière…

Le Gardien-chef du jour:
Obama (ce n’est jamais que la douzième menace qu’il balance dans le vide depuis le début de la fuite) donne 24 heures à BP pour dresser un plan de sauvetage du Golfe embourbé dans la marée noire.
Sinon, tare ta gueule à la récré.

Le Joue droite du jour:
Le cardinal Danneels dépose une plainte concernant les fuites (encore? oui, mais pas les mêmes, attends) qui ont fait suite à la perquisition que vous savez.
C’est l’hôpital qui se moque de la quoi déjà?

Le Guerre froide du jour:
Gérard Deprez accusé (par un autre décérébré) de miner le MR après avoir détruit le PSC.
Il serait acheté par Moscou-in-Hainaut que ça ne m’étonnerait pas…

Le Courageux du jour:
Berlusconi demande un vote de confiance à sa majorité « sans quoi, je retourne à la maison ».
On s’attend à une surprise, mais on ne sait pas encore si elle sera blonde, rousse ou brune.

Le Brabançonne du jour:
Deux députées européennes dont nous tairons les noms pour ne pas leur faire de la pub ont sauvé l’honneur de la Belgique, d’Yves Leterme et d’Hermann Van Rompuy au Parlement européen.
Était-ce bien la peine?

Le Pipe (ceci n’est pas une) du jour:
L’une de ces deux bravardes a réveillé les manes de Magritte et de Peyo pour revendiquer surréalisme et fantaisie belges.
La naissance dans un certain périmètre géographique ne suffit malheureusement pas pour assurer le génie. Ça se saurait…

Le Démocratie du jour:
Le parlement européen se félicite d’avoir lui-même offert à la CIA les clés de nos comptes bancaires et de ne pas avoir laissé cet honneur à un quelconque haut fonctionnaire.
Vive l’Europe populaire, horizontale et démocratique!

Le Révolution du jour:
Trop contrôler sa colère peut mener à des explosions soudaines, selon de récentes études (même si j’ai l’impression d’avoir déjà lu ça quelque part).
Prochainement dans les aéroports: des émotico-tests.

juillet 8, 2010

souvent star varie

Filed under: la vie comme elle vient — tito @ 9:32 pm

« Il n’y a pas de problème Domenech (…). Quand tu le côtoies et que tu n’es pas journaliste, c’est une personne très simple avec qui tu peux parler tranquillement. »

Ça alors? Mais qui a dit cela? Estelle, sa femme? Son meilleur ami? Son animal favori?

Non, c’est Nicolas Anelka, le 16 mai dernier, qui avait aussi évoqué coupe du monde, suite à la défaite en amicale face à l’Espagne:

« On aurait dit des pros contre des amateurs. Il va falloir trouver autre chose, sinon ce n’est pas possible, on va partir au bout de trois matches. »

Quelle prescience! Par contre, il n’avait probablement pas prévu son propre coup de gueule contre son entraîneur.

Rien à dire, le sport professionnel, ça rend adulte, mature…

(Source: Le Canard Enchaîné du 19 mai dernier et le site lavoixdessports.com)

juillet 4, 2010

Chronique des élections présidentielles locales IV

Filed under: Brésil,politopics — tito @ 9:53 pm

Résumé des épisodes précédents1 :
Trois candidats principaux se disputent la présidence du Brésil à partir de 2011. Marina Silva a déjà été présentée.

troisième partie: José Serra.

À l’image de l’ancien président Fernando Henrique Cardoso, José Serra, qui a été son ministre de la santé jusqu’en 2002, pourrait dire « Oubliez tout ce que j’ai écrit. » Leader étudiant en 1964, de gauche, il s’exile au moment du coup d’état, va rejoindre le Chili d’Allende, pour ensuite, après bien des années hors de son pays, rentrer et se ranger dans un parti conservateur, américanophile et largement à la bonne avec les médias de droite et les milieux économiques.

Son discours est empreint de contradictions inhérentes à sa position: il vante le système de santé qu’il a contribué à mettre en place et critique ce qu’il est devenu, alors que Lula n’y a pratiquement pas touché (à tort d’ailleurs); il se dit plus à gauche que Lula mais milite dans un parti de droite; il prétend que la Bolsa Familia2 est une invention de Fernando Henrique Cardoso, mais son parti passe son temps à en critiquer le principe et les pratiques; il est issu de la résistance (passive) à la dictature alors que son parti en est pratiquement issu3.

Maire de São Paulo, ministre de la Santé, puis gouverneur de l’État de São Paulo, José Serra n’a pas exactement la fibre négociatrice dans la peau. Pendant les trois dernières années de son exercice4, il a envoyé la police contre les étudiants, refusé de discuter avec les enseignants tant qu’ils étaient en grève et envoyé un corps de police contre un autre qui réclamait des ajustements de salaire promis. Son souci de la sécurité l’empêche de condamner les plus de mille morts par an provoquées par la police et la police militaire parmi les « civils » des favelas, un grand nombre d’entre elles ressemblant plus à des exécutions qu’à des actes de légitime défense. Comme candidat à la présidentielle, il a décidé de s’approprier ce thème, alors qu’il ne fait pas partie des prérogatives du président. C’est son petit côté Johan Vande Lanotte: j’étais de gauche, mais j’appuie sur la gachette en direction du peuple.

Économiquement, Serra prétend faire la même chose que Lula en mieux. Voilà un argument qui signifie tout et son contraire. Il n’y a pas grand’chose à en tirer de positif.

Prochain épisode: Dilma Rousseff.

  1. Un, deux et trois. []
  2. Programme de soutien aux familles les plus pauvres comparables à un minuscule RMI attribué principalement aux mères de famille. []
  3. Jusqu’à certains de ses membres qui ont reproché à Dilma Rousseff, sa concurrente, d’avoir fait partie des « terroristes » durant la période « militaire » et d’avoir menti sous la torture. []
  4. Il vient de « renoncer » à sa charge pour se présenter aux présidentielles. []

juin 29, 2010

Comme il elbow!

Filed under: la vie comme elle vient — tito @ 6:08 am

J’ai beau aimer le tennis et le regarder quand je peux, il y a de temps en temps des réflexions de joueurs de tennis professionnels qui me laissent avec un goût amer dans la bouche.

Il y a quelques années, Justine Henin avait décidé d’arrêter, parce que, disait-elle, elle avait perdu la motivation. Elle n’avait pas 25 ans.

J’essaie de me mettre à la place de son père, qui a travaillé toute sa vie à la poste. D’imaginer où il devait trouver sa motivation…

Ah, et puis, hier, Andy Roddick, généralement correct dans ses réflexions, après avoir perdu son match à Wimbledon, au 4e tour, a sorti celle-là:

« Of course I’m going to be pissed off when I wake up tomorrow. If you got fired from your job, you probably wouldn’t wake up the next day in a great mood. »

On ne peut pas trop en vouloir à ces gamins gâtés par le sort, qui ne connaîtront jamais un formulaire de licenciement. Mais, quand même, comparer l’humeur qui suit une défaite dans un tournoi avec la perte de son boulot… fallait le faire…

juin 27, 2010

Chronique des élections présidentielles locales III

Filed under: Brésil,politopics — tito @ 3:32 pm

Résumé des épisodes précédents:
Trois candidats, principalement, se disputent le siège de la présidence à partir de l’an prochain, au Brésil: José Serra, Dilma Rousseff et Marina Silva. Beaucoup d’intérêts s’entrechoquent autour d’eux.

Troisième partie: Marina Silva, actuellement créditée de 8 à 12% des voix au premier tour.

Membre du PT de la première heure, ex-ministre de l’environnement du Président Lula pendant près de six ans, Marina Silva a un parcours pour le moins atypique.

Originaire d’Acre, elle a grandi dans une famille très pauvre, dépourvue de droits scolaires pendant toute son enfance et n’a appris à lire et à écrire -contre le désir de son père- que… grâce à une maladie qui a failli la tuer et l’a clouée au lit suffisamment longtemps pour lui laisser le loisir de s’instruire. Elle ira ensuite jusqu’à l’université; à son crédit, malgré sa réussite, de refuser de servir d’exemple pour montrer que, même partant de rien, on peut arriver à tout: pour elle, être une exception ne permet pas de déterminer une règle. Et de continuer de réclamer un meilleur enseignement public.

Ensuite, elle a failli entrer au couvent. C’est un mariage qui l’en empêchera (elle a divorcé depuis). Plus tard, de catholique, elle virera évangéliste -c’est-à-dire membre d’une secte religieuse protestante. Entretemps, elle aura rencontré Chico Mendes, LE militant seringueiro des années 80′, assassiné pour avoir été une véritable épine dans le pieds des gros propriétaires terriens. Elle se consacrera à corps perdu à la cause de Chico Mendes.

Militante historique du PT depuis ses origines ou presque, Marina sera longtemps derrière Lula. Aujourd’hui, elle a quitté son parti, rejoint le PV (parti prétendument vert) et se présente aux élections sous cette couleur. D’aucuns estiment qu’elle pique des voix à Dilma Rousseff, la candidate de Lula, et qu’elle risque de soutenir indirectement José Serra. Sachant qu’il y a deux tours d’élections, ce raisonnement est pour le moins sujet à caution. Mais soit.

Revenons à la personne de Marina Silva.

Elle a la réputation de défendre exactement ce qu’elle dit, ce qui semble corroboré par sa sortie du gouvernement deux ans avant les élections; jusqu’au début de l’année, elle ne semblait pas destinée à se présenter. Ministre, elle a tenté de défendre, dit-elle, les intérêts de la nature, des peuples indigènes, elle était internationalement reconnue comme ZE militante écologiste. Ce qui ne l’a pas empêchée de participer -six ans!- à un gouvernement qui a poursuivi les programmes d’expansion de l’agriculture et de l’élevage sur les terres de l’Amazonie et de réalisation de gros ouvrages tels des barrages et des usines à gaz, sans compter le programme nucléaire local soutenu par la France: ses luttes avec le ministère de l’énergie et celui de l’agriculture se sont généralement soldées par des échecs. Elle a, semble-t-il, avalé pas mal de couleuvres sous le couvert du « réalisme » économique.

Même si l’on devait supposer une sincérité brimée et frustrée dans son chef, on ne peut s’empêcher de retoquer Marina Silva sur une récente déclaration qu’elle a faite dans le magazine Istoé: à la question « accepteriez-vous le financement de l’entreprise Vale? », elle a répondu qu’elle estimait que cette entreprise respectait le droit social et l’environnement et que, oui, s’ils la contactaient, elle accepterait leur soutien.

Or, Vale est largement critiquée dans la presse de gauche (Caros Amigos, Brasil de Fato1) précisément pour son mépris pour les droits du travail et l’environnement dans l’ensemble des régions du monde où elle est active. De Marina, on craint une ignorance maladroite ou une tolérance coupable… Et ce n’est qu’un exemple qu’on pourrait multiplier.

Dans un autre registre, qu’on pourrait peut-être plus aisément lui pardonner, Marina Silva est hautement mystique, mélange allègrement les mérites de la science et de la foi2, s’oppose à l’avortement, par exemple, et n’accepterait de traiter des questions dites « éthiques » que via des réferendums. Il est clair que l’allusion à la démocratie directe devrait nous plaire3, mais l’on sait parfaitement que l’influence conjuguée de toutes les sectes locales au Brésil amènerait fatalement plutôt à un recul des idées laïques qu’à des avancées.

Au total, même si, des trois candidats principaux, elle est la moins pire, Marina Silva, de jeune militante infatigable, est devenue, comme tous les autres, une jeune (elle a plus ou moins 50 ans) candidate infatigablement opportuniste.

Prochain épisode: José Serra

  1. Caros Amigos: le site se trouve ici, mais vous devez naviguer dessus pour trouver la référence dans le numéro de mai 2010 de l’article Vale, a mineradora com as mãos sujas de sangue de Tatiana Merlino; et Brasil de Fato: Vale est une transnationale dont les pratiques sociales et environnementales sont combattues dans le monde entier. []
  2. Elle estime notamment que, si elle a été guérie de sa grave maladie étant jeune, c’est grâce à Dieu et à la médecine. []
  3. Encore qu’elle critique fortement le régime vénézuélien pour son système participatif, allez comprendre. []

juin 23, 2010

Le bookmaker et son tueur

Filed under: économie mon amour,discussions piquantes — tito @ 10:51 pm

La Société Générale réclame 4,9 milliards d’euros à Jérome Kerviel.

Par souci, paraît-il, de « simplicité » et de « compréhension ».

Un bon libéral est un libéral mort, disait le Colonel Custer.
et Henri IX lui répondit « Tuez-les tous, qu’il n’en reste pas un seul pour me le reprocher après. »

Deux grands penseurs qu’il faudrait peut-être enseigner plus souvent à nos petits…

Le jour des fous (1)

Filed under: lectures dispensables — tito @ 5:56 pm

(première partie d’une nouvelle écrite il y a déjà quelques années. À suivre par épisode)

Il était une fois une région du monde qui, comme presque toutes les régions du monde, était soumise à des dieux puissants qui se foutaient en réalité de ce qui pouvait bien s’y passer. Cette région du monde, comme la plupart des régions du monde habité, abritait des terres cultivables, des rivières, des puits, des murs, des maisons, des places, des statues, des temples…
Comme dans toutes les régions du monde habité d’hommes et d’images de dieux, on y retrouvait une petite quantité de personnages, plus puissants, qui faisaient office de prêtres.

Dans cette région du monde, les dieux les plus puissants s’appelaient Poséidon, Hadès, Zeus, Heraklès, Arès… Il y avait bien aussi quelques déesses, mais, comme souvent, elles servaient de faire-valoir à leurs conjoints. Et plus aucun habitant ne se souvenait d’un vieillard qui aurait raconté aux enfants comment, avant, bien avant, Athéna, Artémis, Héra ou quelqu’autre avait organisé la vie des familles…

Dans cette région du monde, comme dans beaucoup de régions du monde, les dieux les plus importants étaient arrivés dans les bagages de puissantes castes dominées par les pères, montés sur des chevaux, accompagnés de légendes toutes neuves et d’armes en fer, de rites impérieux et d’une certaine révérence pour le droit de conquête et de richesse qui jusque là n’avait pas été une priorité…

Il était une fois, donc, une région du monde comme beaucoup d’autres. Celle-ci se trouvait au bord de la mer, une mer magnifique, sans marée, une mer où les histoires de dauphins le disputaient aux récits de sirènes, une mer qui fournissait aux hommes une nourriture illimitée et apportait les commerçants d’autres régions du monde, mais aussi l’angoisse des naufrages et des attaques barbares. Une région du monde où l’autre, l’étranger, était considéré avant tout comme un danger, et ce n’était qu’ensuite, s’il avait fait ses preuves, qu’on pouvait envisager de le laisser entrer pour montrer ce qu’il avait à vendre.

Une région du monde assez commune, au fond, où les hommes étaient heureux de faire partie du bon sexe, où les femmes qui survivaient à leurs premières couches se félicitaient d’avoir choisi les bonnes divinités, les bons rites, les bonnes prêtresses, où les enfants qui passaient 7 ans se réjouissaient de pouvoir jouer une ou deux heures après avoir travaillé au champ, au port ou dans l’atelier de leurs pères -quand ceux-ci vivaient encore…

Une région du monde où le soleil était généreux, régulier, peu changeant, où les neiges étaient rares et où les pluies venaient presque toujours lorsqu’il le fallait pour combler les puits et les citernes -et sans doute était-ce la raison pour laquelle les pères des pères de ses habitants l’avait choisie pour demeurer. Une région du monde dure et exigeante, comme toutes les régions du monde, où les hommes travaillaient du matin au soir pour permettre à leurs enfants de faire plus tard comme eux, et ainsi de suite. Une région où, comme dans toutes les régions du monde, on s’arrêtait de travailler avec la nuit tombée…

Une région où, de temps en temps, une canicule, une tempête, une maladie peu connue, une attaque imprévue, emportaient la moitié des richesses et des vies de la cité. Où les survivants avaient pris l’habitude de remercier les dieux d’avoir épargné l’autre moitié, et l’on rebâtissait les murs, les temples, on réparait les bateaux, les filets, on réapprenait à vivre sans les morts, on se dépêchait de se remarier, de refaire des enfants, on veillait à ce que les patrimoines parviennent aux héritiers, et on engraissait un peu les prêtres afin d’assurer leur médiation entre le pauvre profane ignorant et le sacré inconnu…

juin 22, 2010

M. Michel n’est pas prof’ d’histoire

Filed under: politopics — tito @ 10:39 pm

… et par respect pour mes collègues de germanique, je m’abstiendrai de rappeler de quoi il est gradué…

Dans cet article, Louis Michel se permet de saluer la figure du vieux tyran, Léopold, roi des Belges, mais surtout souverain de l’État Indépendant du Congo.

« Un camp de travail? Certainement pas. En ces temps-là, c’était simplement la façon de faire. »

Ben tiens. L’esclavage est une si jolie tradition qui venait à peine d’être interrompue.

En réalité, le grand homme à la barbe de Saint-Nicolas s’était attribué une fraction importante d’un continent au potentiel économique énorme. Il n’a jamais accompli que le rêve de tout entrepreneur: fonder une start-up qui décoiffe. C’est comme ça qu’il faut le voir, n’est-ce pas, M’sieur Michel?

Ah et puis, l’argument massue: tout le monde faisait ça… C’est beau comme de l’antique… Pourquoi ne pas justifier tous les crimes de masse, dans l’histoire, dans ces conditions? « Tout le monde tuait du protestant », « C’était la mode de taper sur du juif », « Qu’est-ce que vous voulez, on avait tous un nègre à la maison », « Ben, ouais, c’était une sorcière, tout le monde brûle les sorcières »,…

Louis Michel, vous êtes vraiment un imbécile. Tous les historiens un peu sérieux et qui n’ont pas le progrès à la sauce libérale dans la tronche vous le diront.

juin 18, 2010

Chronique des élections présidentielles locales II

Filed under: Brésil,politopics — tito @ 6:55 pm

Résumé de l’épisode précédent:
Petit topo sur les élections présidentielles brésiliennes.
En lice (officiellement à partir de ce week-end):
José Serra, du PSDB, qu’on dit ici du centre, mais que je verrais bien fort à droite, surtout question dialogue social;
Dilma Rousseff, du PT, chouchou de Lula, ex-coco, mais vouée à la Realpolitik et à la méritocratie;
Marina Silva, du PV, ex-ministre de l’environnement de Lula, très populaire, mais qui s’est fait plein d’ennemis aussi, et dont le côté mystique me gène.
-et quelques autres mandaïs, mais disons que, pour parler électoralement, il s’agit de quantités négligeables.

2e Partie: les forces en présence.

-le lobby financier et la banque centrale;
Patron de la Banque Centrale depuis la présidence (de droite) de Fernando Henrique Cardoso, Henrique Meirelles défend avec efficacité les intérêts des banques, grâce au taux d’intérêt régulièrement le plus élevé du monde. Sous prétexte de freiner une inflation qui était, jusqu’aux années 90′, l’un des fléaux du pays, le SELIC tourne toujours autour de 10% (Il est descendu à 8%, mais c’était un plus bas historique qui a été revu à la hausse suite à la crise), quand son homologue américain est virtuellement négatif (inférieur au taux d’inflation) et ceux des pays européens tournent autour de 1 à 2%. Les banques aiment ce taux, car il justifie leurs profits faramineux -sans bouger les oreilles-, alors que leur gestion a été reconnue régulièrement comme parmi les pires du mondes. La Banque Centrale fut et est l’un des cailloux constants dans les chaussures du PT au pouvoir depuis 2002: impossible de sortir de la dépendance des banques qui menacent constamment de replonger le pays dans le chaos pré-Lula. Ce dernier, en fait, a pactisé avec les banques afin d’établir ses grandes politiques de développement et de charité publique. Il a rejoint, ni plus ni moins, les mouvements « réalistes » des socio-démocrates européens.

-le lobby de l' »agronegocio » et les fazendeiros;

Ce lobby est à peu près partout au Congrès. Certains journalistes estiment à un tiers les congressistes qui y sont liés. Et tous les partis importants, ou presque, sont infiltrés par les tenants des grandes propriétés foncières. Leurs arguments sont connus: ils produisent une part majeure du PIB brésilien, sont responsables pour la plus grande partie des exportations du Brésil et nourrissent le peuple. Sauf que ces arguments tombent devant les défenseurs des droits sociaux et de l’environnement, et que les études les plus sérieuses montrent que le marché intérieur est surtout alimenté par l’agriculture familiale. Mais alors que celle-ci est très peu soutenue, l’agrobusiness, lui, reçoit la plus grande partie des subsides de l’état, paie peu voire pas d’impôts et bénéficie d’indulgences bancaires considérables. Leur influence est considérable dans le traitement de la réforme agraire -qui n’avance pas-, de la propriété de la terre -qui est entachée d’innombrables fraudes-, de la tolérance aux engrais chimiques et aux OGM, des droits du travail, des priorités en matière de déplacement des richesses et des capitaux.

-Les partis;
Les principaux partis sont presque tous nés après la dictature, mais deux d’entre eux, le PMDB (droite conservatrice) et le DEM (droite dure), sont les héritiers directs des deux seuls partis autorisés entre 1965 et 1985. Le PSDB (centre-droit genre MR ou UMP) est une dissidence du PMDB. Le PSol (plutôt gauche-extrême-gauche) et le PV (pseudo-écologistes) sont des dissidences du PT (ex-de gauche, genre PS) qui s’est déclaré le grand opposant à la sortie de la dictature. Il y a encore quelques partis, comme le PSB, le PDT, le PCdoB ou le PCB, qui sont des acteurs réguliers de la scène politique, mais plus petits. Leur importance est surtout liée au temps d’antenne à l’époque des campagnes électorales, car ce sont les alliances entre partis qui déterminent les quotas de chaque candidat ou de chaque cartel de partis. Ce qui donne une véritable enchère aux partis… Les défections des élus, qui passent d’un parti à un autre, sont légion, considérées comme un scandale par les uns, et un droit légitime par les autres. Je vous laisse deviner qui pense quoi.

-les mouvements populaires -le MST, et…;
Il faut être franc: les mouvements populaires au Brésil sont sous-considérés. Ils existent, au-delà du MST, mais ils sont terriblement faibles en raison de leurs relations soit au pouvoir en place, soit aux partis, soit aux syndicats. Le MST (avec le MTST) fait figure d’exception, ce qui explique l’extraordinaire campagne de diffamation dont il fait continuellement l’objet dans la presse générale (sauf évidemment dans la presse d’extrême-gauche, qui n’est pas négligeable). Ce mouvement gigantesque a certes des défauts (comme par exemple son aspect mystique prononcé), mais il n’est ni autoritaire, ni centralisé comme il a été parfois dépeint, même s’il suit des règles établies dès l’origine (il existe d’autres mouvements de sans-terre qui ne les suivent pas). Les différentes structures régionales jouissent d’une grande autonomie d’action et, si tout n’est pas horizontal, loin s’en faut, l’appui aux mouvements spontanés est systématique depuis les structures reconnues par les médias comme dirigeantes -et qui en fait suivent surtout les initiatives locales.

-les syndicats;
Ça ne vaut presque pas la peine d’en parler. Les syndicats sont tellement dépendants des financements « publics » qu’ils sont corrompus dans tous les sens. En outre, les droits de grève et de manifestation ici sont tels qu’ils font passer les régions européennes comme de douces localités libertaires.

-le clientélisme;
Sans doute la plus importante des influences politiques au Brésil. Des villes, des régions, des États entiers fonctionnent uniquement sur base des faveurs obtenues auprès des élus qui paient en « paniers de base » le choix qui s’est porté sur eux. Les structures quasi-féodales sont appelées ici « colonélisme ». Il y a un véritable rapport de suzerains à vassaux entre les potentats les plus grands et les plus petits, allant jusqu’aux milices privées, aux rabatteurs, aux informateurs… Le clientélisme au Brésil ferait passer les partis wallons pour des amateurs.

-les médias.
Les principaux médias au Brésil sont
a) les télévisions, parmi lesquelles la Rede Globo fait figure de tf1 locale. Son influence est manifeste et a été dénoncée jusqu’ici sans grand succès en raison de la surprotection dont elle bénéficie au niveau politique, chacun sachant que celui qui l’attaque se retrouve persona non grata sur la chaîne et se prive d’une audience énorme. Deux autres chaînes totalement à la botte de sectes protestantes se partagent le principal du gâteau.
b) les journaux, dont les principaux sont, parmi les quotidiens, la Folha de São Paulo (droite décomplexée perçue de centre-gauche), l’Estado de São Paulo (plus sérieux, plus conservateur, pas plus fréquentable), Globo (lié au consortium de télévision susnommé -berk) et quelques autres quotidiens, dont beaucoup de sports; et parmi les hebdomadaires, on retrouve surtout la Veja (porte-parole de la droite sécuritaire la plus réactionnaire), Época (guère mieux, type Figaro Magazine), IstoÉ (prétendument plus indépendant, mais défendant surtout les intérêts de ses propriétaires et donc pas anticapitaliste du tout), CartaCapital (qu’on pourrait qualifier de Marianne local). Les journaux les plus à gauche sont surtout des bihebdomadaires (Brasil de Fato) ou des mensuels (Caros Amigos), mais n’ont que peu d’audience. Piauí est probablement le meilleur journal en tant qu’outil journalistique, mais il est désabusé et s’est démarqué de toute engagement politique. Les trois derniers que je vous cite ici sont les seuls dont je conseillerais la lecture, à ma connaissance.

Les grandes entreprises:
Vale (privatisée, transnationale, mines), Petrobras (encore nationale, énergie, présente dans le monde), Odebrecht (construction), Camargo Correa (construction) pour certaines des plus influentes nationales; Bayer, Monsanto, les monteurs automobiles, pour les principales étrangères… Ce ne sont que quelques-unes des grandes compagnies qui bloquent toute possibilité d’améliorer les choses au niveau de l’environnement, des impôts, du droit du travail… Une véritable gabegie; il y a vraiment peu à en tirer d’intéressant. On en reparlera dans un prochain numéro.

3e partie à suivre: Marina Silva

juin 17, 2010

En attendant la suite sur les élections locales

Filed under: politopics — tito @ 6:34 pm

Je lis qu’aussi bien le parti libéral que la reine des Pays-Bas étaient prêts à engager des discussions pour former une coalition libéraux-extrême-droite-chrétiens-démocrates. Ce sont les derniers qui refusent de discuter « pour l’instant »…

Qui faut-il encore convaincre de ce que les élections sont tout à fait aptes à nier ce que démocratie veut dire?

Et pourquoi? Parce que la raison a été remplacée par le capital. That’s all folks. I’ll never come back.

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