Archive for the ‘discussions piquantes’ Category

Si j’étais yéménite, je serrerais les fesses…

Monday, January 11th, 2010

« Je n’ai pas l’intention d’envoyer des bottes américaines dans ces régions », dit le président nobélisé étatsunien…

Aïe, aïe, aïe…

Entre parenthèses, je me demande ce que dirait l’opinion publique si le président, disons, au hasard, autrichien, disait le même genre de trucs…

Explosion à Oslo…

Tuesday, December 15th, 2009

Pourquoi s’étonner que le Prix Nobel de la Paix fasse pratiquement l’éloge de la guerre lors de la remise de son prix?
Lorsqu’on regarde certains des précédents lauréats, on peut souvent s’interroger sur l’idéologie qui soustend la fondation de l’inventeur norvégien.

Théodore Roosevelt, prédécesseur illustre de l’actuel président des USA, et militariste notoire, pour son intervention dans un conflit qui ne le regardait a priori pas;

Menahem Begin, Anouar El-Sadate, puis Shimon Peres, Yitzak Rabin et Yasser Arafat, figures bien plus marquées par leurs capacités à guerroyer que par celles à faire la paix -d’ailleurs, le résultat de leurs “concertations”, bien des années plus tard, heu…, parle pour lui;

Henry Kissinger, âme damnée de la politique extérieure pendant la majeure partie de la Guerre du VietNam, pour avoir finalisé une paix qu’il était bien forcé d’accepter, également responsable ou co-responsable d’interventions criminelles au Chili ou au Timor;

Andrei Sakharov, co-inventeur de la bombe à hydrogène (il fallait le faire) et redécouvreur de la bombe atomique en URSS;

Mère Teresa, militante anti-avortement, anti-contraception;

Lech Walesa, on ne voit pas très bien pourquoi;

Les casques bleus, en tant que force de maintien de la paix -certes, c’était sept ans avant le Rwanda, mais ne fallait-il pas s’y attendre?;

Le Dalaï Lama, dernier des grands féodaux, inspiré par la théocratie, peu suspect de féminisme;

Jimmy Carter, l’un des artisans de la théocratie iranienne, mais surtout soutien du gouvernement génocide indonésien;

Al Gore, vice-président à l’époque des bombardements en Irak de 1992 à 2000…

Alors pourquoi pas Barack Obama, qui va envoyer 30.000 de renforts en Afghanistan? Il n’y a aucune contradiction…

un État de droit, c’est moi

Sunday, December 13th, 2009

C’est ce que doit se dire un certain Silvio, mais probablement qu’un Jacques autrefois ou un Nicolas aujourd’hui ne sont pas loin de penser pareil. Les différences sont minimes: changer la constitution à son gré pour éviter un procès, déplacer des juges ou faire modifier les principes de droit dans le même but, prétendre à la transparence d’un côté pour ensuite empêcher une commission parlementaire sur ses propres dépenses de fonction…

Par exemple.

Il ne vous reste plus ensuite qu’à invoquer le choix des urnes (comme le fait Alvaro Uribe, d’ailleurs, de bien mauvaise foi) pour rappeler que la démocratie vous a mis là où vous Êtes (à l’instar d’Hitler, notez), et vous êtes blindé en république…

Silvio, lui, enfonce le clou: les juges sont tous des rouges, surtout quand ils cherchent à appliquer une constitution née de l’après-deuxième-guerre-mondiale des mains des très mafieux et très conservateurs démocrates-chrétiens.

Il ne s’embarrasse pas de précautions pour hurler à la conspiration ((Ça ne va pas s’améliorer maintenant qu’il s’est pris une gifle.)). GianFranco parie sur sa décrédibilisation -peut-être est-ce encore trop tôt: il n’y a pas d’alternative électorale au personnage, tant les politiques italiens semblent nuls… Umberto reconnaît que son allié a “des couilles“… Ça suffit ((Le peu suspect de sympathie rouge Di Pietro a lancé un “E che si aspetta per dire che siamo nel fascismo?” Mieux vaut s’en apercevoir tard que jamais.)).

En France, on a pour la première fois l’occasion de voir un ex à la barre, mais on en est encore loin sans doute. On arguera l’âge, la respectabilité, l’ancienneté des faits, des principes de… droit, qui s’appliquent essentiellement aux puissants, pas aux misérables…

Dans un État de Droit, comme les USA, celui qui provoque une panne de courant générale pour obliger un pays entier à payer plus cher sa propre énergie, panne de courant qui provoquera tous les incidents, blessés et morts que l’on peut imaginer, tombera éventuellement sous le coup d’accusations de fraude financière ou de constitution de trust ou de monopole; dans le même temps, en France, celui qui vole sans léser ni blesser quiconque, conmme dans un abus de confiance, risque trois ans de prison -il y a clairement une faille dans le processus…

D’un autre côté, et c’est assez remarquable, si la peine de prison est plus lourde pour qui a commis un abus de biens sociaux, (5 ans, pour 3 ans d’abus de confiance), la prescription est bien plus rapide dans le premier que dans le second cas (3 ans contre 5 ans). Or, l’abus de biens sociaux sera avant tout le fait de personnes bien placées qui auront le temps de faire courir les choses… Tout s’explique…

Le principe de l’État de droit repose donc essentiellement sur l’intérêt de celui qui maîtrise l’État, à travers son législatif, son exécutif ou son judiciaire.

Qu’importe le reste, et en particulier la justice…

État de droit, État de droite…

Friday, December 4th, 2009

Une polémique coupe la gauche en deux au Brésil, celle qui a rapport à Cesare Battisti, dont tout ce qu’on peut dire avec certitude aujourd’hui est qu’il fut condamné par contumace pour trois assassinats et pour avoir commandité un quatrième; que durant des années il put vivre sous des régimes différents (Mexique et France surtout, puis Brésil), bénéficiant notamment de la doctrine Mitterrand -celle-ci ayant été éteinte par le successeur de son titulaire; que cela fait trente ans qu’il n’a plus aucune activité violente, sinon illégale, et est devenu écrivain.

Bref, en dépit de la gravité apparente de ses crimes -qu’il nie avoir commis-, Battisti se retrouvait jusqu’à l’année dernière en situation de relative liberté.

Depuis un an maintenant, il est en prison à Brasilia et attend la décision finale du Président Lula pour savoir s’il sera finalement “rendu” aux autorités italiennes.

La discussion porte fortement sur la nature des crimes de Battisti: peut-on exercer des crimes politiques dans une démocratie, dans un État de droit, comme l’était l’Italie dans les années ’70? Ne sont-ce plutôt des crimes de droit commun? Mais alors, sachant que les cibles attribuées à Battisti sont, au moins dans trois cas, motivées par des raisons politiques -que celles-ci soient légitimes ou non n’est pas mon propos-, qu’est-ce qu’un crime politique?
Un crime politique. Un État de droit…

Un État de droit, l’Italie? Quand?

Pas pour Pinelli, en tout cas, que tous les anarchistes chantent, que Dario Fo a mis en scène dans sa “Mort accidentelle d’un anarchiste”.

Pas pour les milliers de victimes annuelles des organisations criminelles, qu’elles soient de la Mafia, de la ‘ndranghetta ou de la Camorra.

Pas pour les morts de la Piazza Fontana, de la Stazione di Bologna, d’Italicus, de Rustica, de la Freccia del Sud, de la Piazza della Loggia, etc., etc., etc. comme disait Giorgio Gaber.

Pas non plus pour bien des citoyens qui durent endurer un code pénal remontant à l’époque de Mussolini et qui ne fut que réformé au compte-goutte, et surtout ces dernières années.

Pas non plus pour les électeurs du lendemain de la IIe guerre mondiale, ni pour les administrés des maires installés par l’armée américaine et la mafia au cours de leur longue reconquête de la botte.

Pas pour Cossiga ou Andreotti, manifestement liés aux organisations Gladio et P2, et qui restent aujourd’hui sénateurs à vie; ni pour Silvio Berlusconi, d’ailleurs, mouillé jusqu’aux organes génitaux tout aussi manifestement dans plein d’affaires judiciaires qui n’aboutiront pas; et la liste des politiques dans ce cas est loin d’être close: il ne s’agit que des trois plus brillants.

Il y en eut un, d’État de droit, pour Bettino Craxi, condamné, exilé, mort au loin comme “au temps des Romains”, époque “phare” du père de l’État de droit par excellence…

Je n’ose dire qu’il y en eut un pour Aldo Moro, exécuté par les Brigades Rouges; complice, lui aussi, de l’État mafieux “democristiano”, il fut jugé par des militants qui se prenaient pour des justiciers et qui furent manipulés par les partisans de la politique de la tension. Sans doute que l’une des dernières pensées de Moro fut qu’il aurait fait pareil à leur place, et que son substitut n’aurait pas plus bénéficié de son appui s’il avait été à la place des négociateurs.

Pas un État de droit aux yeux de Giorgio Gaber, l’un des artistes les plus engagés de ces quarante dernières années, pour qui peu devraient échapper à la colère de son “Se fossi Dio”… Y compris Aldo Moro, co-responsable de 40 ans de gouvernement “democristiano e mafioso”.

L’Italie n’est un État de droit que par moments et dans certains endroits, à certaines occasions; quand il s’agit de traiter de petites affaires, de problèmes civils ou commerciaux, quand les juges sont honnêtes et dévoués à leur boulot, on peut parler d’État de droit -plutôt favorable à l’Establishment, au Contrat Social de Droite, mais au moins existe-t-il, ce fameux État de droit.

Cependant, il faut considérer que l’État de droit, c’est une vue de l’esprit plus qu’autre chose. L’État de droit est un ensemble d’exigences telles (un code de loi approuvé par la population ou ses représentants, une magistrature indépendante, des droits à la défense rigoureux, une justice gratuite et impartiale, une police sans préjugé) qu’il ne peut être qu’un concours de circonstances rare et ne bénéficiant que rarement à la justice elle-même.

Même au Brésil, sous la dictature, l’exercice de l’État de droit, finalement, a existé. Il y a eu des conflits de voisinage résolus à l’amiable ou avec la médiation d’un juge. Il y a eu des gardes d’enfants réussies, des litiges sociaux correctement résolus, des amendes justifiées… Des magistrats intègres, des policiers humains, ont appliqué une loi plus ancienne que celle des militaires. C’était rare, mais cela a existé. Des militants de gauche sont sortis de prison sous l’effet de procédures judiciaires. Mieux valait tard que jamais. On ne peut même pas attribuer le retour de la démocratie représentative à une révolution: elle est revenue, bancale, petit à petit, et les organisations, partis, journaux d’extrême-gauche s’expriment de nouveau librement.

Alors que jusqu’en 2006 il existait une loi en Italie qui interdisait toute personne de faire l’éloge de la dictature du prolétariat

L’État de droit, c’est surtout un État où la sécurité juridique est assurée à l’investisseur, à l’entrepreneur. Quitte à ce que le travailleur, lui… Et je te parle pas du chômeur, de l’objecteur, du vieux et du sous-consommateur… Pourquoi auraient-ils droit à l’État du même type?

L’État de Droit, c’est surtout celui de la Droite… Qu’on s’en rende compte… (en banque)

Quand un état de droit reconnaît une dictature…

Sunday, November 29th, 2009

… c’est encore un état de droit?

La lutte armée est-elle soluble dans la démocratie bourgeoise?

Saturday, November 28th, 2009


La révolution, la révolte, les mouvements violents, ce n’est pas bien, comme l’a si joliment repris Serge Halimi dans un article de l’édition de mai 2009 du Monde diplo, d’après l’opinion des partisans de la fin de l’histoire de Fukuyama, Francis, idéologue néoconservateur.

La lutte armée, c’est anti-démocratique, surtout si vous habitez le Chiapas ou la Colombie, par exemple. Mais c’était déjà valable au Congo du temps de Mobutu -jusqu’à ce que Kabila père et fils prennent le pouvoir- et au Népal, avant que les maoïstes ne permettent la déposition du régime de “démocratie imparfaite” chère à Loulou Michel. De même que la résistance à l’installation des gouvernements pro-alliés en Irak ou en Afghanistan ne peuvent en rien être légitimés. Ne parlons pas de ces infâmes antisémites que sont les terroristes palestiniens (sémites, eux aussi, au passage).

Bref, la lutte armée est illégitime; elle ne peut en aucun cas amener la démocratie, ni assurer le commer… la liberté, voulais-je dire.

Bon…

Y’a des exceptions, il paraît…

Les Moudjahiddins du peuple se battaient contre les infâmes communistes soviétiques et, eux, ça va… Enfin, ça allait jusqu’à ce que le régime de Moscou se casse la gueule… Maintenant, on aimerait bien qu’ils se calment.

Les Contras, au Nicaragua, c’était pour le bien du peuple qu’ils se battaient, si, si. Du moins, Reagan et consorts les apuyaient-ils.

La déposition armée d’Allende au Chili et du régime Péroniste ((Dont je ne me ferais pas plus le défenseur que de l’actuel en Belgique.)) en Argentine, c’était pour restaurer la démocratie.

Les exemples, d’ailleurs, de “lutte armée pour la démocratie” ne manquent pas en Amérique Latine, soutenue de près ou de loin par l’USAID de sinistre mémoire. Mon pays d’adoption, le Brésil, a subi un coup d’état violent ((Bien que “le sang n’ait pas été versé”, grâce ou à cause de la renonciation de son président légitime de l’époque, le social-démocrate João Goulart.)) dont le but était d’éviter la bolchevisation du plus grand pays de la région. La liberté (d’entreprise et de consommation, sans doute, mais pas du plus grand nombre) était à ce prix.

Il semblerait que la lutte armée ne soit pas toujours illégitime, en dépit des minauderies des défenseurs de l’État de Droit(e) actuel. La violence révolutionnaire, sans laquelle nous nagerions sans doute encore dans les monarchies absolutistes depuis la France jusqu’en Russie, et des colonies américaines à celles d’Asie et d’Afrique, ne trouve grâce auprès des bonnes âmes -comme par exemple Gilles Martin-Chauffier dont la critique de Rouillan, l’ancien d’AD, déborde de “lubies thermidoriennes”, “Révolution, vieille reine tyrannique”, “les Huns de la rue Gay-Lussac”, “bouffonerie tendance juchée sur les échasses de la Commune” ((Paris Match, 14 mai 2009, p. 39.))- que lorsqu’elle défend les “valeurs” (boursières) du Premier Monde.

D’un autre côté, nos démocraties (formelles) s’appuient souvent sur des régimes autoritaires sous les prétextes les plus divers. Depuis combien de temps nos beaux gouvernements sont-ils les alliés de l’Arabie Saoudite, du Gabon, de l’Algérie, de la Tunisie, et même de la Birmanie, alors que les dirigeants de ces pays n’admettent aucune opposition? C’est en dizaines d’années, en génération, qu’il faut compter le renoncement des démocraties (formelles) en faveur de régimes dictatoriaux violents parce qu’économiquement et stratégiquement cela leur convient bien.

Cette complicité va parfois jusqu’à la couverture d’assassinats d’opposants (pour ce qui concerne les gouvernements algérien ou russe par exemple). Sans compter les emprisonnements arbitraires ou les tortures, les vexations, les interdictions, les exils…

On ne peut condamner la lutte armée sous prétexte que celle-ci se décrédibilise par son essence violente et faire reposer sa propre pseudo-légitimité sur des choix stratégiques aussi discutables. Pour que nos régimes aient un minimum de cohérence, il faudrait qu’ils n’aient aucune relation commerciale ou diplomatique avec des régimes où les droits qu’ils reconnaissent (et accordent, disons, le plus souvent) à leurs propres ressortissants sont déniés.

Mais ne rêvons pas: alors que les vierges effarouchées de l’Union Européenne se désolaient sur la fin de la licence de la chaîne putschiste de télévision RCTV au Vénézuéla, que les USA se pincent le nez en évoquant une possible fin de l’embargo sur Cuba, que les défenseurs des droits (de propriété) de l’homme se pâment devant les atteintes faites aux latifundiaires de Bolivie, que les médias principaux se refusent à donner la parole aux mouvements les plus émancipateurs parce qu’ils remettent en question leur soumission au capital (via la publicité qui s’étalent entre leurs rubriques économiques et leurs fiches cuisines), il ne saurait être question de reconnaître à un peuple de se libérer par la force des armes.

N’empêche, le t-shirt Che Guevara est probablement le plus vendu dans le monde.

La lutte armée n’est peut-être pas soluble dans la démocratie, mais son marketing est inusable…

“Il y a des signes qui ne trompent pas…”

Tuesday, November 10th, 2009

Vainqueur (au féminin) du prix Goncourt, Marie Ndiaye s’est vue rappeler à l’ordre par un député de la majorité, en France, Eric Raoult. Celui-ci n’a pas apprécié les paroles prononcées par la lauréate (d’origine partiellement sénégalaise):

Je trouve cette France-là (de Sarkozy) monstrueuse. (…) Je trouve détestable cette atmosphère de flicage, de vulgarité… Besson, Hortefeux, tous ces gens-là, je les trouve monstrueux. Je me souviens d’une phrase de Marguerite Duras, qui est au fond un peu bête, mais que j’aime même si je ne la reprendrais pas à mon compte, elle avait dit : “La droite, c’est la mort.” Pour moi, ces gens-là, ils représentent une forme de mort, d’abêtissement de la réflexion, un refus d’une différence possible.

((Dans les inrockuptibles, pourtant gentillets.))

Le sieur Raoult, offusqué, s’est sans doute rappelé les relations artistes-États sous l’Ancien Régime, lorsqu’il a émis la nécessité d’un “devoir de réserve dû aux lauréats du Prix Goncourt” ((Voir le peu révolutionnaire Libération.)).

Pour autant, ceci est loin d’être une nouveauté: les personnalités peu enthousiastes, voire agressives à l’égard du gouvernement de Nicolas Sarkozy ont tendance à avoir certaines difficultés ces derniers temps. Pour preuve le vent qui souffle dans le dos de certains humoristes radio comme Didier Porte ou des Guignols de l’Info qui plaisent de moins en moins à Sa Majesté. Il y a des signes qui ne trompent pas…

Heureusement qu’il a épousé une femme “de gauche”…

L’école en question

Friday, September 18th, 2009

Le but qu’il faut poursuivre, qui est réalisable, c’est d’assurer à tous des possibilités éducatives égales. Confondre cet objectif et la scolarité obligatoire, c’est confondre le salut et l’Eglise.

Réflexion intéressante issue de “Deschooling society” ((La citation, ici, vient de sa traduction, au titre abusif “une société sans école”, parue au Seuil (points), en 1971, p. 27.)), quoique certainement iconoclaste.

L’école est devenue la religion mondiale d’un prolétariat modernisé et elle offre ses vaines promesses de salut aux pauvres de l’ère technologique.

En effet, depuis Condorcet, Ferry et j’en passe, il semble que l’école soit une nécessité de gauche, que l’égalité ne puisse s’atteindre que via les institutions scolaires et que chacun ne puisse avoir sa chance que dans une société où les enfants auront tous l’occasion de suivre les programmes institutionnels le plus tard possible.

Douce illusion.

Non, terrible illusion, puisque en réalité l’école est sise dans une société basée sur des principes dits démocratiques reposant sur la liberté d’entreprise, cette dernière valorisant la diversité d’acquisition culturelle et savante. On ne peut le lui reprocher, ceci étant nécessité par ses autres principes: la concurrence, l’inégalité, la différence sociale. Pas de développement du marché, des technologies, du commerce, de la variété des mouvements économiques sans une grande différence marquée chez les acteurs sociaux.

L’inégalité est donc une nécessité, et donc l’école, aussi démocratique puisse-t-elle se prétendre, ne pourra faire qu’entériner cette soif de différence et ira jusqu’à la favoriser. Une école dans un monde comme celui dans lequel nous vivons ne peut que favoriser l’inégalité. Prétendre le contraire est au mieux ignorance des faits, au plus évident un mensonge (électoral).

Ce n’est pas tout à fait le propos d’ivan Illich, qui veut signifier plus dans son livre que l’insititution école, dans son établissement propre, s’oppose essentiellement à la réalisation de son intention, qui serait l’égalité de l’enseignement dans la perspective d’autonomiser ses apprenants ((Illich n’est pas un révolutionnaire abouti comme un communiste ou un anarchiste; cependant ses idées sont largement novatrices, bouleversantes et peu en accord avec la société de consommation passive dans laquelle il a vécu.)). Voici quelques-unes des idées développées dans le livre cité:

1) Aussi bien de manière interne, au sein d’une nation, on aura beau augmenter le budget de l’enseignement comme on voudra, au total ce seront toujours en moyenne les enfants des classes les plus riches qui en bénéficieront, et les inégalités ne cesseront de se creuser au sein de la société. Il est évident que l’on pourra tenter tant qu’on voudra de rendre les “chances” égales au sein de l’école, cela ne servira à rien, puisque le marché économique (commerce, travail,…) est tel que les parents voudront toujours privilégier leurs ouailles au détriment des autres et tenteront de ce fait de “pallier” au mieux à la prétendue égalitè scolaire. Ils useront d’abord des différences issues de l’institution en privilégiant les meilleures écoles pour leurs enfants, puis, si cela ne suffit plus, si par extraordinaire l’état devait parvenir à niveler le niveau scolaire de toutes les écoles (ce qui est proprement impossible), ils offriront à leurs descendants des conditions supérieures à celles des moins nantis. C’est une mathématique patrimoniale indépassable tant qu’existera la société basée sur la propriété, la famille et la valorisation du succès individuel ((Notons que les développements les plus anti-patrimoniaux de ce texte ne sont pas illichiens, mais miens.)).

2) En outre, on s’apercevra rapidement que le statut du nombre d’années scolaires réalisées se dévalorisera au fur et à mesure que les prétendus progrès dans l’enseignement institutionnel se feront. Il est facile de constater que les huit premières années scolaires qui, jusqu’au début du vingtième siècle, suffisaient en Occident pour se faire une place parmi les intellectuels locaux, représentent aujourd’hui une base non suffisante pour quelqu’un qui cherche tout simplement du travail. Quand un instituteur était autrefois formé à seize ans, il lui faut aujourd’hui attendre un brevet obtenu au mieux vers 21 ans. En outre, dans le passé, ce titre permettait à son porteur d’obtenir, au moins en apparence, une haute considération locale et une influence certaine sur ses concitoyens, aujourd’hui il est peu reconnu, voire déconsidéré. C’est que l’instituteur est devenu une denrée courante, il est directement dévalorisé par ses collègues des niveaux supérieurs et son salaire est d’ailleurs moindre par rapport à celui de ces derniers. En définitive, il devient donc toujours de plus en plus cher et de manière de plus en plus insupportable, de tenter de produire une scolarité gènéralisée et efficiente.

3) Au niveau international, ces deux phénomènes ne pourront que mettre en concurrence directe les états et marqueront de manière encore plus évidente les travers qui en découlent à l’échelon mondial: ce sont les nations les plus riches qui bénéficient avant tout de la valorisation de l’institution scolaire et plus on avance dans le temps, moins l’unité scolaire garde de sa valeur, et plus il faut d’années prestées à l’école pour obtenir une valeur continue: l’inflation scolaire matraque donc d’entrée toute nation qui désire participer au jeu scolaire où elle est condamnée à suivre le rythme des “meilleures” qui, elles, ne désireront jamais se laisser rattraper.

4) Enfin, Illich constate à son époque que l’institution scolaire ne vise absolument pas à valoriser l’autonomie et la capacité de l’apprenant à choisir ses apprentissages et à les réaliser, mais au contraire chercher-t-elle à le réduire le plus possible à un consommateur scolaire, et de la préparer à consommer d’ailleurs passivement toute sa vie.

Quelques passages illustratifs issus de la seule introduction:

Le système de la scolarité obligatoire, s’il conduit inévitablement à une ségrégation au sein de la société, permet également une sorte de classement entre les nations. Ainsi s’établit une véritable hiérarchie internationale, où chaque “caste” fonde sa dignité sur le nombre d’années de scolarité défini par ses lois. Certes, ce chiffre n’est pas sans rapport avec celui du produit national brut per capita, mais si ce dernier demeure pour la plupart des citoyens d’un pays relativement abstrait, le premier suscite au contraire une réaction affective beaucoup plus profonde, voire douloureuse. ((op. cit., p. 25.))

(…) au cours de la scolarité, on confond l’instruction et le r^ole que l’on jouera dans la société. Pourtant, apprendre ne signifie-t-il pas acquérir quelque compétence ou quelque savoir nouveau, tandis que la promotion sociale se fonde sur des opinions que d’autres se font de vous? Ainsi, s’instruire dépend souvent de quelque instruction reòue, mais la sélection pour un r^ole social, pour un emploi sur le marché du travail, dèpend de plus en plus de la seule durée des “études”. ((op. cit., p. 28-29.))

Beaucoup continuent à croire, à tort, que l’école mérite la confiance publique, (…) alors m^eme qu’elle n’est plus que la détentrice d’un monopole et que loin d’égaliser les chances, elle en assure la rèpartition. ((op. cit., p. 29-30.))

Mais, me diront les plus gauchistes d’entre vous ((Pendant que les autres s’empresseront d’aller inscrire leurs blondinets dans ce qu’ils trouveront de meilleurs avec l’appui de leur carte de parti si nécessaire, d’une sainte indulgence ou plus concrètement d’une contribution monétaire.)), ce problème entier aura disparu le jour où notre monde aura basculé dans le saint communisme et où l’institution scolaire sera au service de l’égalité. Rien n’est cependant moins certain, car, comme le dit Illich, l’institution scolaire, par son essence propre, a pour objet la reconnaissance de statuts différents, et non l’égalité de l’enseignement. Les tentatives pour gommer les différences (uniformes, suppression des points, bourses et autres) n’ont d’ailleurs pas réussi à écorner le principe de la promotion sociale inégalitaire et inhérente que l’école entérine -malgré de nombreux enseignants idéealistes, mais aussi avec l’aide de bien d’autres à qui cela correspond exactement.

Ce problème, je l’ai abordé ici le plus brièvement possible; il fait partie des principaux sujets de mes inquiétudes personnelles. Moi, enseignant, je suis en rupture avec la mère de mon travail: l’école. Paradoxale, mais nécessaire remise en question.

les juges y croient.

Friday, September 4th, 2009

En lisant un article sur Todd Willigham, un Texan condamné à mort pour avoir incendié sa maison et causé la mort de ses trois filles, et qui vient d’être disculpé, 5 ans après son exécution, j’ai eu l’occasion de lire cette petite ligne effarante:

dans une récente décision, deux juges de la Cour suprême ont affirmé que l’exécution d’un homme ayant prouvé son innocence restait «valable» dans la mesure où il a bénéficié d’«un procès juste et équitable».

C’est ce qui s’appelle distinguer la vérité de la vérité judiciaire…

En fait, la justice, vue sous cet angle, devient une affaire de foi. Sans devoir m’arrêter au cas Willigham, qui semble avoir jeté un homme en enfer sur des bases frisant l’amateurisme, il appert que le principe de la justice d’État, dans bien des cas, ne repose pas sur la nécessité de faire justice, mais bien sur celle de calmer les masses à n’importe quel prix.

La justice, c’est la religion des États laïques.

Ne l’ont-ils pas confisquée aux curés du passé?

J’ai beau le savoir depuis longtemps, je ne peux pas m’empêcher de lever les sourcils, d’écarquiller les yeux et de me demander comment certaines personnes parviennent à conserver leur confiance dans un monde qui, de fait, ne nous assure même pas un minimum de sécurité juridique

La solution

Monday, August 24th, 2009

Le ministre des communications du Brésil, Hélio Costa, détient la solution à tous les maux de la jeunesse:

“Il faut qu’elle cesse de rester devant internet. Elle doit regarder plus la télévision et écouter la radio.”

Le progrès informatique a effacé les péchés du petit écran…