Archive for the ‘économie mon amour’ Category

Les cannachiffres

Wednesday, February 4th, 2009

… ou les chiffres qui font rire.
(oui, bon, c’est léger)

Il est intéressant de lire que le PIB mondial (à parité de pouvoir d’achat, ce qui fait toujours du bien de le dire) a pratiquement doublé entre 1995 et 2007, passant de 34,5 mille milliards de dollars, à 65,3 des mêmes unités ((source: FMI)).

Ce qui représente quand même pas mal de pognon ((J’espère que vous le sentez, amis Européens, que vous bénéficiez de deux fois plus de biens et de services qu’il y a quinze ans?))…

Surtout quand on sait que, rien qu’en 2008, les fonds de pension privés aux USA ont perdu 22 pour-cent de leur valeur, c’est-à-dire 5.300 milliards de dollars ((Source: Época, 19 janvier 2009, p. 36.)). Ce qui signifie qu’au début 2008, ils valaient (à vos calculettes) 24 mille milliards de dollars, autrement dit: plus de 35 pour-cent de la valeur du PIB mondial dans le même temps ((Au Royaume-Uni, les fonds de pension s’élevaient, selon un calcul similaire, à près de 5.100 milliards de dollars. Les fonds des deux puissances anglo-saxonnes accumulées totalisaient dont l’équivalent de près de 45 pour-cent du PIB mondial à même époque. Attention: ceci ne signifie pas du tout qu’ils détiennent 45 pour-cent du PIB mondial, puisque les valeurs de ces fonds de pension sont, disons,… voyons,… comment dire,… virtuelles?)).

Bien… Qu’est-ce que ça veut dire ça?…

Comme il a déjà été montré par ailleurs, la spéculation a tellement gonflé ces dernières années, que la valeur des avoirs financiers (boursiers ou non) ne représentait plus que des espérances totalement irrationnelles, qui n’ont plus rien à voir avec l’économie réelle, et même avec cette anomalie de l’esprit qu’est le PIB ((Théoriquement, cette chose représente la somme des valeurs de tous les biens et services finaux produits à l’intérieur d’un espace donné en un an. Bonjour le calcul réaliste, car 1) Il ne comprend que les données chiffrées en argent; 2) Il ne peut qu’évaluer la production clandestine, même chiffrée en argent. Bref, tout ce qui est économie familiale, informelle, conviviale, mais aussi tout ce qui passe par la criminalité (avant lavage d’argent) est exclu du PIB. Par nature ces économies sont difficiles à estimer, mais selon l’International Labor Office, ces chiffres osciellent entre 15 pour-cent pour les pays “developpés” et plus de 60 pour, vous savez, les “autres”.)).

Le problème, c’est que rien que les chiffres de l’économie dite réelle ne permettent plus à personne d’avoir la moindre prise sur ce qu’ils veulent dire. Il n’y a que les astronomes pour voyager avec un tel nombre de zéros avant la virgule. On a l’impression que les sorciers de l’économie tentent de calculer le nombre de fourmis qui colonisent le sous-sol de la planète.

Un autre chiffre absurde? Les USA ont accumulé 4.000 milliards de dollars de déficits commerciaux entre 2002 et 2007 ((source: CartaCapital, 4/2/2009, p. 61.)). Ceci parce que la croissance de leur propre PIB (exemplaire pour nombre des zozos qui commandent l’Europe jusqu’à il y a peu) tenait en grande partie sur une surconsommation basée sur l’endettement personnel.

Il est d’ailleurs amusant de se dire qu’en comparaison avec ces 4.000 unités sidérales, 2.000 autres sont tenues en réserve dans les banques chinoises et que ceux-ci sont les principaux créanciers des amerloques.

Bon, vous n’avez pas encore le vertige?

Vous n’êtes pas sans savoir que les deux paquets d’aide (sous forme de liquidités, garanties, crédits et autres petits cadeaux) aux banques américaines par l’administration Bush-Obama dépasseront les 1.500 milliards de dollars ((700 milliards du plan Paulson, déjà, et on prévoit un petit 800 milliards avec Obama.)). Vous savez sans doute aussi que les aides accumulées de l’ensemble des États accordées à leurs propres dévaliseurs (je veux dire: aux banques) totalisent 7.300 milliards de dollars, soit six fois le PIB du Brésil ((et, vous vous rappelez? l’économie du Brésil fait partie de celles où la moitié est encore dans le gris-noir.)) ou la moitié de celui des USA ((source: Época, op. cit., p. 84.)).

-Mais oui, mais il faut, thitho, tu comprends pas… Sinon, tu sais, le système… Il va se casser la…

Ah.

Ok.

Bon.
(Même si, personnellement, s’il se casse la gueule, le système, je ne suis pas sûr que je pleurerais…)

Un petit détail, en passant: ce genre de chiffres, ça ne vous donne pas envie de dire que c’est beaucoup de pouvoir dans les mains de pas grand’monde? Hm?

Et puis, dans le même temps, le vice-président du FMI, John Lipsky, a aimablement annoncé, lors du sommet de Davos, que ledit Fonds mettait à la disposition des pays “en voie de développement” 250 milliards de dollars qu’il tenait “en portefeuille”. Le Japon était d’ailleurs prêt à y ajouter 100 milliards ((source: José Fucs.)).

Tout de suite on se sent mieux: c’est le genre de chiffres qu’on comprend. Même si le délégué indien s’est fendu d’une réflexion qu’on pourrait traduire par “tu te fous de notre gueule.”

Ben oui, mais il faut bien rire un peu. En temps de crise, c’est tout ce qu’il nous reste…

Aphorismes -ou mauvaise foi crasse

Tuesday, January 13th, 2009

L’argent ne permet rien. Dans un monde où il existe, il autorise ou interdit. Il limite. Il n’ouvre pas le ciel: il en restreint l’accès. Ce n’est pas lui qui réalise de grandes choses: ce sont les sommes accumulées de travail de ceux qui dépensent de l’énergie après avoir mangé et dormi suffisamment pour la libérer.

Que l’argent ait servi de transmetteur dans ce genre de cas n’est qu’incidentel: nous pourrions fabriquer des lignes de chemin de fer sans argent. Il nous faut de l’acier, du bois, des pierres, des terrains, de l’eau, de l’eau-de-vie, de la bouffe, des tentes, des hommes, des femmes, de la bonne humeur et des chansons, des médecins et des médocs, de la lumière, du feu, un poil d’enthousiasme, de la coordination, quelques connaissances techniques et le moins d’emmerde possible.

Quant à l’argent, il n’a jamais permis au moindre train d’avancer dans la plaine. C’est un non-sens de croire le contraire. C’est aussi injustifié que de croire que le monde a été réalisé en sept jours.

Aphorisme pour la fin de l’année

Wednesday, December 31st, 2008

Le libéralisme est collectiviste, puisqu’il prétend que, par l’application de son système, la moyenne du bien-être de tous augmentera, sans souci des sacrifices endurés par une grande quantité d’individus.

Le communisme est individualiste puisqu’il prétend élever le bien-être de tous les individus de manière égale au détriment de la croissance globale de l’ensemble de la population.

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Quelqu’un pour me contredire?
(ou alors un grand blblblblbl?)

Et si j’en ai le temps et la force, d’ici peu, le premier chapitre sur le capitalisme privé et le capitalisme d’État… Sinon ce sera pour la mi- janvier…

Joyeux bordel, bonne branlée à tous.

économie, mon amour… quel étrange cri…

Monday, December 15th, 2008

Voilà, je vous ai assez bassiné (pour le moment) avec la crise économique.

Vu la quantité de réaction, il était de toute façon temps.

Je me contente de faire un dernier récapitulatif et de placer cet ensemble dans la colonne de droite à titre de référence personnelle.

Alors, pour récapituler, donc, je dois dire que je n’ai pas encore trouvé d’arguments qui me convainquent que les prises en charge des faillites financières par les États pût être autre chose qu’un socialisme pour les riches, autrement dit une socialisation de leurs pertes -et, au bout du compte, une manière de faire payer deux fois au peuple les affres des gros requins, puisque celui-ci en avait déjà souffert une première fois par le jeu classique du libéralisme qui, je vous le rappelle, implique que les plus gros gagnent et les plus petits se prennent des mandales.

À propos, s’il s’agit bien de libéralisme, il s’agit aussi de capitalisme, le premier n’allant pas sans le second, mais ce n’est pas toujours vrai dans l’autre sens, ainsi l’avait déjà fait savoir Deng Xiaoping en son temps. On peut se demander ce que Mao penserait du sauvetage du capitalisme occidental par l’économie chinoise. Mais, bon, en même temps, le grand timonnier, on n’en a rien à fout’.

Avant la Chine, nos timonniers des finances à nous ont tenté de montrer comment qu’ils avaient des couilles comme des melons en injectant des milliards et des milliards qui, jusqu’alors, n’existaient pas, puisque les caisses étaient vides ou que le budget était vaguement en équilibre, dans le grand jeu de la finance qui réclamait à corps et à cris des crédits supplémentaires pour continuer à jouer. À Atlantic City, on leur enverrait des psys pour qu’ils freinent un peu sur le bandit manchot. Mais à la corbeille, on les incite à continuer à risquer le boulot de millions de personnes, parce qu'”il faut sauver le système”.

Système dont on nous montre par moments qu’il vit de ses propres crises. Contrairement aux centaines de millions de crève-la-faim, qui, eux, n’auront même pas eu l’occasion de se défendre face aux montées subites des prix de tout ce qui leur permet de survivre.

Que ces crises appauvrissent certains des plus riches ne me paraît d’ailleurs toujours pas évident. Qu’elles révèlent plutôt que de nombreuses fortunes sont assises en partie au moins sur du vent, c’est déjà plus clair.

Enfin, et ça avait été le premier article de la série, il me semblait important de rappeler que capitalisme et libéralisme ne sont pas nécessairement la même chose. Le libéralisme n’est qu’une forme du capitalisme, et le néo-libéralisme une forme du libéralisme. C’est l’ensemble qu’il faut mettre au panier, et le plus rapidement possible.

À cet égard, je me permets également de vous annoncer dans les prochaines semaines (j’espère) un ensemble d’articles sur

la différence entre capitalisme privé et capitalisme d’État

De manière assez ironique, j’étais occupé depuis plusieurs mois sur ce sujet lorsque la crise a montré le bout de son nez fin 2007… J’ai continué en me disant que l’économie était bien sympa d’illustrer ainsi mon propos. L’ensemble est presque prêt, mais comme il fait de l’ordre de quinze ou vingt pages A4, je dois encore le découper en morceaux pour le rendre présentable…

En attendant, je vous bassinerai encore avec d’autres sujets que j’ai sur le feu (ça va déborder).

Et la gauche dans tout ça?

Monday, December 8th, 2008

Non, non, je ne vais pas vous parler d’Elio, de Ségolène ni de Barack…

(Ceci est une suite et pas encore fin des six ou sept posts précédents…)

Je vous parle d’alternative au libéralisme et au capitalisme ((Vous avez sûrement noté que je distingue bien les deux, hein… Voir les pages Essai et Revoilà pour une tentative d’explication de cette distinction. Pages qui d’ailleurs, malgré les circonstances, n’ont pas perdu de leur actualité.))… J’exclus donc de facto ces sinistres zozos.

Emir Sader, d’ailleurs, dans un article paru ce mois de novembre sous le titre “As crises do capitalismo e do neoliberalismo e a esquerda” ((Le Monde Diplomatique Brasil, novembre 2008, Encarta Clacso, VII.)) évoque le problème qui, coïncidence, me tarabustait depuis pas mal de temps. Oui, et si le capitalisme se cassait effectivement la gueule sans notre aide ((Ce qui nous amènera à nous dire que, décidément, nous n’avons pas à nous enorgueillir de quoi que ce soit dans l’affaire.)), où allons-nous tenter d’amener le monde ((Par honnêteté, je précise que Sader ne croit pas du tout qu’il tombera tout seul, mais qu’il faut l’aider. C’est effectivement fort probable. Donnons-lui un coup de main.))?

“Les solutions? Elles existent…”, comme disait Pierre Desproges. Le problème, c’est qu’il n’existe plus une formation un peu structurée pour les appliquer. Un autre problème, terriblement évident, c’est que s’il existe DES solutions, les zouaves les plus déterminer à prendre les rênes à la place des clowns actuels sont persuadés qu’il faut en appliquer UNE. Enfin, dernier bug, c’est qu’une fois de plus, même si j’approuve le fait qu’il faut trouver des alternatives au capitalisme, je fais partie de ces irréductibles emmerdeurs qui estiment que nul n’est légitime pour “assumer le pouvoir” à la place des clowns susnommés.

De nouvelles institutions? Non: des cercles concentriques, entrecroisés, horizontaux.
Un monde multipolaire? Non: un monde aux pôles indéterminés, innombrables, sans rapports de force.
Des hommes providentiels? Non: les hommes et les femmes doivent compter sur la capacité de millions, de dizaines de millions -je voudrais dire de milliards- de personnes prêtes à assumer un rôle de soutien de la cause publique sans reconnaissance, sans pérennité de pouvoir ni rétribution particulière.

Se souvient-on que le mot ministre vient d’un terme latin qui signifie “serviteur”? Que celui qui se met au service de la chose publique ne devrait s’attendre à aucun privilège et a pour charge d’améliorer, non le sort de l’État, mais celui des habitants?

Les ministres devraient être des millions et être logés et nourris moins bien que les paysans qui nous nourrissent et fournissent coton, lin, laine, chanvre et autres produits de première nécessité qui nous permettent de pêter dans nos costards à l’abri de nos bagnoles pourries.

La gauche, c’est penser d’abord que chaque goutte de sueur dépensée dans l’intérêt commun vaut bien plus que toutes les heures passées à la Bourse, au Parlement ou sur un terrain de sport… et c’est d’en tirer les conséquences. Notamment concernant toutes les professions inutiles ((un aperçu ici.)) que le système économico-politique a créées.

Fausser la concurrence

Thursday, December 4th, 2008

Des milliers d’emplois en jeu, ce n’est pas nouveau…
Alors, pourquoi aujourd’hui devrait-on sauver telle ou telle entreprise? Ne risque-t-on pas de “fausser” la si jolie et si saine concurrence qui a apporté depuis deux cents belles années cette santé économique dont nos coeurs libéraux se sentent si fiers?

“General Motors demande de nouveau 4 milliards de dollars au Congrès”

Est-ce bien raisonnable?

Les pollueurs européens et japonais (Renault, Toyota et les autres) ne devraient-ils pas s’opposer à cette aide manifeste de l’État qui va leur enlever un nombre considérable de clients potentiels au pays des opportunités?

Je vous l’dis, je ne comprends plus rien à l’économie…

La Crise, c’est normal, nous dit le bon docteur

Wednesday, November 26th, 2008

Suite des posts précédents sur la crise…
Les réflexions de Deng Xiaoping,
Les plan économiques et nous,
Les riches et eux,
Le socialisme et les riches (encore eux),
Le libéralisme et tout ça

Une autre perle : la crise fait partie du système, il s’en nourrit, il s’en sert pour se perfectionner et devenir chaque fois plus fort. Combien de fois ne l’ai-je pas lu, cet autre poncif. Dernièrement, c’est Antonio Delfim Netto, conseiller de Lula, qui nous a sorti cette petite vérité toute faite dans le CartaCapital du 22 octobre ((Et il l’a répétée dans celui du 12 novembre.)). Pour avoir été ministre sous la dictature juste avant la crise de 1973 et pour être parti avant la fin du « miracle économique du Brésil », il sait sans doute de quoi il parle.

Eh quoi ? Selon ce genre de théorie, ce qui ne nous tue pas nous rend plus fort. Serait-ce de nouveau une métaphore du genre vaccin qui nous blinde contre le microbe ? Mais alors, de crise en crise, comment se fait-il que nous ayons toujours un milliard de personnes continuellement menacées par la faim ((Même que selon la FAO, ce repère de gauchistes, évidemment, ça augmente.)) ? Et surtout, comment expliquer que la crise de 1973 nous ait amené à tout déréguler, après que celle de 1929 nous a au contraire incité à tout réguler, et que maintenant on en revienne à des solutions interventionnistes, tout en sachant parfaitement bien que c’est le système qui est malade, et non ses circonstances qui sont difficiles.

Et donc, M. Delfim Netto en est à se réjouir que les crises soient structurelles au système, et de ce qu’elles existent pour renforcer un appareil qui a fait multiplier le PIB des USA 50 fois depuis 1790 -Tout en notant qu’il a bien grimpé sous la guerre civile et la Première guerre mondiale et qu’il a carrément explosé pendant la Deuxième, selon les propres sources de ce personnage. Il faut le faire, évidemment, mais déblatérer ce genre de choses est sans doute plus facile depuis sa retraite dorée que d’un siège d’employé ou d’un poste de soudeur dans une usine

Un autre gugusse, catalogué à gauche (‘fin, au centre-gauche, mais qui est de gauche de nos jours?) par wikipedia, c’est l’économiste français Élie Cohen, qui avait sorti de belles tirades en août 2007.
Parmi lesquelles:

Il faut s’habituer à l’idée qu’elles ne constituent pas des cataclysmes mais des méthodes de régulation d’une économie mondiale que l’on n’arrive pas vraiment à encadrer par des lois ou des politiques.

que l’on peut retrouver à la fois dans le Nouvel Obs et sur Challenges, qui publiaient exactement la même entrevue (comme quoi, on peut se prétendre magazine de gauche et fôlatrer avec l’économie suisse).

Dire que la crise est une bonne chose, c’est rien moins que criminel, surtout pour ceux qui, dans le monde, ont vu le prix des denrées exploser sans alternative, et qui ont été les premiers à se prendre la crise sur la tête, avant les courtiers et les banquiers, qui continuent à vivre gentiment dans des cités dortoires occidentales. Certes, ils devront peut-être revendre l’un de leurs vehicules ou hypothéquer leur seconde résidence. Mais, franchement, je ne vois toujours pas pourquoi j’irais les plaindre. Les moins chanceux d’entre eux devront sans doute renoncer à leur retraite à 45 ans pour la retarder jusqu’à 50. La belle affaire, quand dans le monde la plupart des gens travaillent jusqu’à la mort et ne savent même pas ce que signifie épargner…

Le système se nourrit de la crise et celle-ci le rend plus fort…

On en a décapité pour moins que ça en 1793… On en a fusillé pour bien moins en 1917 et en 1936…

Et si je continue ce post, je serai probablement arrêté pour incitation au crime…

Andrew Li-Peng sauve le Monde

Monday, November 24th, 2008

Ce titre est une référence directe à l’exxxxcelllent feuilleton radiodiffusé “Andrew Li-Peng sauve le monde” dont vous retrouverez le premier épisode ici. Cat a en outre publié les autres épisodes du même feuilleton sur la page que voici.

Bon, mais plus sérieusement, pourquoi ce titre?

Parce que la Chine sauve le monde, Caramba! Tout le monde le dit, ça doit être vrai.

(Cet article est la suite des articles précédents qui illustraient de mon cru la crise économique actuelle pour nous, les humains de l’économie réelle. Parmi lesquels:
Les plan économiques et nous,
Les riches et eux,
Le socialisme et les riches (encore eux),
Le libéralisme et tout ça.

La Chine, selon les uns, est le dernier bastion du communisme (à part la Corée du Nord et Cuba,k c’est dire l’idée qu’ils se font du communisme), et, selon les autres, l’usine du monde qui s’ouvre au capitalisme et va fooooooooooorcément se libéraliser.

Ahlala, qu’est-ce qu’il ne faut pas entendre.

Cela dit, qui a proféré les formules magiques suivantes:

“L’économie planifiée n’est pas synonyme de socialisme, parce que dans le capitalisme existe aussi un plan, et l’économie de marché n’est pas synonyme de capitalisme, car il existe un marché dans le socialisme. ((Il faut comprendre ici par capitalisme une économie reposant sur le capitalisme privé.))”

“La différence essentielle entre l’économie socialiste et l’économie capitaliste ne consiste pas en un peu plus de plan ou un peu plus de marché.
“Elle se trouve dans le système de propriété (publique ou privée) qui exerce le rôle dirigeant dans l’économie.”

“De nos jours, aucun pays n’adopte de forme pure une économie de marché ou une économie planifiée, car, d’une manière ou d’une autre, plan et marché sont toujours combinés dans tous les pays (l’un mettant l’accent sur le plan, l’autre sur le marché compétitif).”

Keynes? Di Rupo? Bernanke? Lance Armstrong? Obama?

Non, c’est Deng Xiaoping (dirigeant chinois de 1979 à 1997, Tienanmen-1989 compris), à qui l’on doit probablement la force actuelle montante de l’Empire du Milieu et son influence directe sur la “résolution de la crise” à venir. Il est en effet le père du capitalisme à la chinoise qui a catapulté le pays parmi les puissances émergentes les plus prometteuses (avec le Brésil, l’Inde et la Russie).

La Chine va déverser des centaines milliards de ses dollars ((586, selon le CartaCapital de la semaine dernière.)) de réserves ((Elle en possède plus ou moins deux mille milliards, il y a de la marge.)) pour soutenir son économie réelle ((Selon toute vraisemblance, elle n’a pas l’intention de soutenir le système financier brinquebalant,… elle.)). Ce qui revient à dire que, si elle va effectivement relancer la croissance mondiale, c’est surtout en grignotant encore du terrain sur les économies réelles des régions du premier monde ((Parmi les mesures envisagées et celles déjà lancées, le gouvernement chinois a décidé de soutenir le secteur de l’industrie textile et de l’agriculture, ce qui est sûrement une bonne nouvelle pour eux, mais qui se rappelle de ces années où nous lisions dans nos journaux que les ôôôdieuses manufactures chinoises plombaient les secteurs textiles en Europe en raison des coûts de production ridicules de leurs produits fabriqués par les petites mains de millions de gamins sous-payés -enfin, c’est ce qu’on m’a appris… Mais maintenant que “le système est en jeu”, je suppose que ça n’a plus d’importance…)).

Bon, et pourquoi je râle, moi?

Ah oui: la démocratie…

On m’a dit que le libéralisme -et donc le capitalisme- drainait la démocratie. Que l’économie de marché était le tremplin de la chute des dictatures…
Hm… N’allez pas croire que j’aie jamais cru une seconde dans ces discours fumeux, mais à moins de me détromper, nous sommes à l’aube d’un sauvetage *possible* du capitalisme, de l’économie de marché -et donc de la démocratie ((Hahaha!))- par sa principale et légendaire plus grande opposition dans le monde.

Pas de quoi se réjouir, mais une sévère leçon pour les zozos qui prétendent réduire l’histoire du monde à une équation économico-politique.

Faut-il souhaiter que les plans Paulson-Brown-Barroso-Merkel-Sarkozy-Reynders (et variantes) fonctionnent ?

Monday, November 17th, 2008

Ceci est la suite des posts précédents:
Les riches vont-ils être moins riches,
Le socialisme pour les riches,
Le libéralisme, le néo-libéralisme et le capitalisme.

(Accessoirement, barrez dans la liste des noms ci-dessus les mentions qui vous font le plus rire)

(accessoirement deux, ça ne fait pas trop mal aux culs des Européens de cette bande d’avoir faussé complètement le jeu de la concurrence cher aux principes de l’Espace Économique ?)

Imaginons les deux situations :

1) les plans fonctionnent et les banques se récupèrent dans un délai considéré comme raisonnable par les acteurs du marché ((Vous me rappelez qui sont ces cons ? Je veux dire : ça ne vous défrise pas que les médias les plus lus et vus ne se bougent même pas un petit peu pour vous dire que la situation de l’économie dépend de zouaves non-identifiés dont les humeurs et les tendances psychotiques influent directement sur notre « employabilité » ?)), ce qui permet, à terme, aux États de revendre leurs participations et de se voir rembourser leurs prêts. Dans ce cas, il nous reste à considérer deux situations : celle où les États récupèrent au moins leur propre mise, avec un profit éventuel qui étonnerait tout de même pas mal ; l’autre, plus vraisemblable, où les États, heureux du retour à la normale ((Faut le dire vite.)) de l’économie de marché libérale, s’affirmeront prêts à renoncer à une partie de leurs mises que les banques ne « parviendront » pas à rendre.
2) Les plans ne fonctionnent pas, et c’est là que ça devient cocasse. Car alors, il faudra envisager une chute de confiance terrible de la part du public, des replis nationaux, voire régionaux, et en tout cas sociaux. Les plus petits s’en prendront plein la gueule et il y a fort à parier que, sur le modèle d’un discours récent de notre futur retraité de la Maison Blanche, sous prétexte de sauver ce qu’il reste du « système économique », tout un tas de barrière sécuritaire vont nous tomber sur la tête –comme si nous n’en avions pas assez.

Personnellement, entre Charybde et Scylla, entre peste et choléra, je n’ai jamais réussi à trancher.

Car, donc, 1) si les plans fonctionnent, et quelle que soit l’alternative, cela servira de blanc-seing aux « acteurs du marché » pour continuer leurs méfaits comme avant ((C’est d’ailleurs en gros la thèse assumée de certaines autorités économiques comme Antonio Delfim Netto, conseiller de Lula et chroniqueur à CartaCapital, en plus d’être un ancien ministre de l’économie sous la dictature brésilienne. Bonjour la référence.)). Autrement dit, rien ne changera structurellement, et les seules victimes réelles de ce petit incident de parcours qu’on appellera la crise des subprimes dans les livres scolaires seront les quelques centaines de milliers de personnes qui auront perdu leurs maisons, les quelques dizaines de milliers de petits actionnaires qui n’auront pas été informés au bon moment qu’il fallait vendre ou acheter, et surtout les quelques centaines de millions de pauvres qui auront, eux, soufferts de la montée des prix et des fermetures de crédit bien plus que les classes moyennes ou aisées ((Toujours selon Delfim Netto, « la crise est la norme » (CartaCapital des 22 octobre et 12 novembre 2008). Il faut donc considérer ses effets comme normaux. En outre, selon lui, le capitalisme en ressort raffermi car il se guérit de ses défauts au fur et à mesure. Le problème, c’est que s’il guérit, à chaque fois il laisse des millions de victimes, et que, toujours selon le même, il y aura des crises à l’infini. Alors, est-ce la peine de soutenir un tel système, dont en outre la nature se réjouit des guerres et profite des crises ?)).

2) Si les plans ne marchent pas, la situation économique mondiale va encore se crisper. Ce ne serait rien si l’économie virtuelle n’avait pas un pied sur la carotide de l’économie réelle. Certes, dans ce cas-là, un plus grand nombre de vrais responsables économiques vont se casser la gueule. Mais il y en aura toujours assez pour continuer à nous tenir par les bourses ((Jeu de mots horrible)). Et ce ne sera de toute façon qu’une maigre consolation en regard de toutes les compressions, rationalisations, restructurations, limitations, restrictions, de tous les gels de salaire, appels à la raison et au calme, mouvements sécuritaires et autres replis racistes.

Pour autant faut-il espérer que les plans fonctionnent ?

Et puis quoi encore ?

Les riches vont-ils être moins riches ?

Tuesday, November 11th, 2008

Ceci est la suite des deux précédents posts, Le socialisme pour les riches et Le líbéralisme, le néo-libéralisme et le capitalisme.

En voilà encore une grave question ((À part évidemment qu’on s’en fout un peu.)). Elle rappelle –ou plutôt elle devrait rappeler que nous ne comptons pas la fortune d’un roi du pétrole ou d’un prince de la Silicon Valley comme on établit le patrimoine d’un petit médecin de campagne…

Lorsque les journaux jouent à se faire l’écho du magazine Forbes pour nous expliquer que Bill Gates est encore ou n’est plus l’homme le plus riche du monde, celui-ci a-t-il vu son tas d’or diminuer ?

Bien sûr que non, ce qu’il se passe dans ce genre de cas, c’est que Forbes –ou celui ou celle dont il s’inspire- a évalué la fortune du personnage en cumulant les valeurs supposées de tout ce qu’il détient comme propriétés meubles et immeubles. Mais parmi ses propriétés meubles, il y a notamment des avoirs financiers qui fluctuent en fonction des yo-yos de la bourse.

Si le 1er janvier, « la bourse » établit qu’une entreprise vaut un million d’euros et que 100.000 actions représentant cent pour-cent de son capital (ce qui n’est pas la norme) sont détenues par, disons, 100 actionnaires différents, chacun détenant au moins une action, chaque action vaut donc 10 euros et toute personne, Bill Gates compris, qui possède donc x actions est maître d’une fortune s’élevant à dix fois x euros. Si le lendemain, l’entreprise, en raison des mouvements financiers ou d’une nouvelle cotation à la bourse, a gagné dix pour-cent de valeur, l’action se trouve cotée à 11 euros. Le lendemain encore, l’action perd de sa valeur et se retrouve à 9 euros ((les exemples pris ici sont assez extrêmes, mais il faut noter que nous vivons des temps où ces chiffres restent encore en deça des problèmes vécus par certaines institutions bancaires.)). Entre-temps, Bill et les autres actionnaires de l’entreprise, s’ils n’ont cherché ni à vendre leur action, ni à en acheter d’autres, sont toujours détenteurs de la même quantité d’actions. Si ce n’était pas encore une vue de l’esprit, on pourrait dire qu’ils ont le même nombre de titres dans leurs portefeuilles.

Sont-ils plus ou moins riches entre le 1er et le 3 janvier ?

Non, mais il vaut mieux que vous croyiez le contraire. Pourquoi ? Parce que la valorisation des entreprises en bourse, surtout quand il s’agit d’entreprises financières ou d’activités virtuelles, ont de plus en plus tendance à prendre des valeurs en fonction de facteurs irrationnels, tels que la confiance même de leurs actionnaires ou des acteurs du marché, comme les banques elles-mêmes (qui sont souvent leurs créditeurs et qui ont intérêt à ne pas les voir se planter), les courtiers qui servent d’intermédiaires entre les investisseurs et ces entreprises, ou les fameuses agences de cotation dont on a pas mal parlé ces derniers temps et qui ont de sacrés problèmes pour continuer à nous faire croire qu’elles sont indépendantes.

Ces valorisations sont devenues tellement irrationnelles ((Et pour une bonne raison, c’est qu’il est nécessaire qu’elles augmentent toujours et toujours plus rapidement, pour éviter de paniquer l’un quelconque de ces fameux acteurs qui ont une facheuse tendance à la crise d’épilepsie et à la frilosité au moindre fléchissement d’une courbe harmonieuse.)), que les chiffres accumulés de toutes les bourses mises ensemble ont permis récemment d’estimer que les mouvements financiers dépassent annuellement le PIB mondial, non pas, comme en 1980, de quelques unités, mais de 600 ou 700 pour-cent ((J’adore ce genre de précision. En fait, on ne sait pas très bien. Selon le Monde Diplomatique Brésil de ce mois de novembre, les « Produits dérivés » de spéculation, ces saloperies qui sont paraît-il responsables de la crise (comme si c’était eux et pas leurs créateurs et profiteurs) dépassent le trilliard de dollars. Donc quinze zéros après le 1… Bonjour l’astronomie.)) …

En clair : les traders jouent avec des avoirs qui n’existent pas –bon, ça on le savait-, mais ce sont des avoirs qui sextuplent ou septuplent les chiffres de l’économie dite « réelle » ((D’après Martine Bullard, dans le Monde Diplomatique Brésil de novembre, les seuls « Produits dérivés » financiers à qui on attribue tous les maux du capitalisme ces derniers temps totalisent l’équivalent de vingt années de production mondiale, ou plus d’un trilliard de dollars.)). Autrement dit, les sphères financières s’endettent et endettent le bon peuple qui s’amuse aussi à jouer en bourse de telle manière que pour parvenir à rembourser, ils sont obligés de continuer à faire grimper ces chiffres abstraits de pognon qui ne reflète absolument pas l’état d’une économie réelle dans des proportions telles que, le jour où on (mais qui ?) s’aperçoit que tout va péter, seuls les premiers qui auront tout vendu pourront encore gagner quelque chose. Mais même cela, ce n’est pas évident, car que vont-ils pouvoir gagner, si ce n’est de l’argent qui se retrouvera dans des banques totalement insolvables ?

En définitive, pour reprendre ce bon vieux petit poncif anar, le capitalisme est bien malade, parce que, tel un requin ((Et la comparaison n’est pas sympa pour les requins.)), il ne peut s’arrêter un instant sous peine de mourir suffoqué, mais, s’il continue de bouffer comme il bouffe, il finira par exploser, ce qu’il menace de faire de plus en plus régulièrement. Ce qu’ont fait les administrations des États en intervenant dans la crise, c’est cacher le plus possible la situation sous le tapis. Mais l’accumulation devient impossible à gérer. Les paraboles ne sont même plus nécessaires ici, pour rappeler que le monde est fini, que la croissance ne peut se poursuivre ad vitam aeternam, que les déchets vont nous étouffer, que les poissons disparaissent progressivement des océans, que l’énergie fossile produite par la Terre en plusieurs centaines de millions d’années a été en toute grande partie brûlée par la communauté humaine en moins de deux cents ans… Quoi d’étonnant à ce que, tels des consommateurs irrationnels d’antibiotiques, les acteurs financiers se retrouvent acculés à toujours avaler plus de médicaments pour éviter que la maladie ne les emporte, mais en sachant qu’elle finira par enlever leurs successeurs… Et c’est le même raisonnement que suivent nos dirigeants démocratiques, qui savent qu’ils ne seront plus là dans quelques années, et qui espèrent donc que la catastrophe retombera sur ceux qui les suivront.

C’est à se demander parfois s’ils ne le font pas exprès, par jalousie pour qui prendra leur place…

Doit y avoir du Freud, là-dessous…