Onfray bien fuffé…

August 6th, 2011

On constate souvent, dans le monde de la gauche ((Et je suppose que ça ne doit pas être loin d’être vrai dans d’autres sphères politiques, comme le centre-gauche, le centre-droit ou la droite.)), que c’est avec les personnes avec lesquelles nous pourrions généralement nous retrouver d’accord que nous nous disputons le plus, laissant nos adversaires objectifs -les capitalistes de tous poils- à l’abri de nos ires légitimes.

J’essaie, dans ma modeste contribution à la gauche, de ne pas faire pareil. Lorsque je critique ((Ici.)) Stiglitz, c’est parce que je le distingue bien de la gauche, et il n’y a aucune ambiguïté, pour moi, à cet égard. Et, si je n’ai pas envie de dire du bien d’un allié historique, j’évite d’en dire du mal.

J’ai trop souvent vu des compagnons de lutte s’entredéchirer pour des questions de détails qui, certes, le jour de la sociale, nous amèneront peut-être à un bain de sang, mais qui en attendant ne méritent pas qu’on s’y attarde, car l’urgence, c’est bien la lutte contre le capitalisme, et non de savoir qui des commissaires du peuple ou des coopératives décideront du sort des mines d’argent. J’ai bien mon idée sur les principes léninistes de l’avant-garde, trotskystes de la révolution permanente et post-staliniens de la gestion de la politique étrangère, mais j’estime que cette opinion ne fait pas avancer notre cause. De la même manière qu’en tant qu’anarchiste, je regrette les phases passées qui virent certaines trahisons objectives ensanglanter nos relations, mais ces souffrances individuelles sont passées et celles d’aujourd’hui concernent les vivants, les travailleurs, les exploités, les esclaves de la vie de tous les jours. “Enterrer les morts, réparer les vivants”, disait, je crois, Tchékov, et c’est on ne peut plus juste: nous n’avons pas de pouvoir sur nos aînés, ni sur leurs crimes, ni sur leurs mérites. Inutile de nous déchirer à leur sujet.

Lorsque je faisais partie d’un groupe conséquent d’anarchistes, dont la plupart étaient déjà d’un certain âge, nous perdions beaucoup de temps sur des questions du genre “peut-on faire confiance à untel, qui défend les principes du XXe Congrès?” Certes, nous avons subi au moins une cuisante déception de la part de certains groupes communistes, mais nous ne pouvons que nous féliciter de notre association avec d’autres, et au moins un groupe anarchiste m’a profondément déçu par ses positions sectaires et même machistes.

Passons. Ce n’était que l’introduction à un commentaire que je désirais faire sur ma lecture récente du livre d’Onfray, “Manifeste hédoniste”. Beaucoup a été dit sur Michel Onfray, beaucoup de sucre a été cassé sur son dos, et par moments j’ai l’impression qu’on oublie de le considérer comme il est: un penseur et un militant anarchiste parmi d’autres, sachant que l’anarchie, par essence, ne pourra jamais être monolithique et aucun anarchiste faire l’unanimité. Ce qui serait même dommage.

  • Du bon, du très bon et du moins bon -peu à jeter

Par contre, ce qui me paraît clair, c’est que l’on peut distinguer des lignes claires de son travail, sur lesquelles il est possible de travailler et que nous pouvons avantageusement exploiter et développer. Son travail sur l’athéisme est très intéressant -quoique loin d’être original, il a l’avantage d’offrir des outils élégants au service de sa cause-; son action populaire à Caen ((Voir ici: http://www.michelonfray.fr/.)) est exemplaire et digne d’être reproduite; son caractère militant est au moins honnête, même si l’on peut discuter à la façon d’un Bourdieu, et légitimement, sur la pertinence de ses passages télévisés. Bref, il y a des choses à dire sur Onfray, et pour ma part, si j’y réfléchis, il y a au moins trois ou quatre fois plus de choses positives que de choses négatives dans son oeuvre.

A commencer par son approche critique, pour laquelle j’ai beaucoup de respect, et que j’aimerais avoir le temps d’appliquer pleinement, selon laquelle pour bien connaître un auteur, il faut en connaître le plus de détails possibles, à travers ses écrits privés, les témoignages de ses proches, des gens qui l’ont connu, etc., mais aussi son activité, car on ne saurait limiter quelqu’un à ce qu’il dit sans s’occuper de ce qu’il en fait. Au fond, très sartrienne, quelque part, son approche: la responsabilité des dits et des écrits doit être appuyées par les actions.

Ses visions matérialistes, hédonistes, sont autant de piliers concrets, honnêtes, palpables de sa philosophie, qui en font un anarchiste juste: il n’y a pas de bonne action éthérée, de hauts faits visant à l’au-delà et de mérites dans le martyr transcendantal: le seul sacrifice qui puisse se justifier est celui qui permette un plus grand confort, un meilleur être dans le présent vivant et une diminution générale des douleurs, des souffrances.

Difficile de lui reprocher sa vision artistique, esthétique, même si elle est discutable, amendable, et si de toute façon elle reste hautement subjective. J’ai personnellement une vision artistique que je ne crois pas très différente de la sienne, mais aussi plus de tolérance vis-à-vis des autres, notamment parce que je sais que je suis passé par d’autres stades que j’ai estimés légitimes au cours de ma vie, et que je ne renie pas ce que j’ai été; j’ai simplement dépassé ces stades auxquels je ne me retire pas le droit de revenir, par ailleurs, pour tester d’autres choses si besoin s’en faisait sentir.

Dans le Manifeste hédoniste, l’un des plus beaux chapitres est consacré à l’érotique; son érotique solaire est un concept qui ouvre bien des perspectives aux anarchistes qui ont parfois trop tendance à se réfugier dans des silences divers (honteux? ignorants? ascétiques?) sur la question. Onfray rejoint ici une vision très goldmanienne, en fait, pour autant que j’aie pu comprendre Emma Goldman aussi bien que lui.

  • A contrario moderato cantabile

Restent les deux derniers chapitres, largement plus discutables, celui sur la bioéthique et celui sur la politique. Sa critique du principe de précaution est sommaire, superficielle: un manifeste devrait se montrer, sinon exhaustif dans son argumentation, au moins plus étayé ((Si Onfray nous renvoyait à d’autres écrits, il ne serait pas inutile qu’il les mentionne.)), et Onfray tend à réduire les militants écologistes à des passéistes imbéciles, ce que, pour ceux que je connais, ils ne sont généralement pas. Je n’en connais que peu qui accepteraient de vivre avant l’époque des hygiénistes et guère plus qui vivent sans ordinateur ni télévision. Ce n’est pas parce que nous sommes favorables au principes de précaution que nous refusons la technologie. Au contraire: pour nous, en tout cas pour moi, la technologie est une excellente chose, si elle n’est pas aux mains des entreprises, mais conservée, développée, mise au service des populations sous la surveillance de ces dernières. Nous avons un droit de regard, tous, sur le monde que les scientifiques sont susceptibles de dessiner. Nous ne pouvons surtout laisser ces dessins -et ces desseins- aux mains de personnages guidés par l’intérêt particulier et pour qui les coûts se limitent à ce qu’ils doivent calculer dans leur prix de revient. Bref, la bioéthique d’Onfray, développée dans le “Manifeste”, n’est pas suffisante, mais certaines lignes sont intéressantes.

Sur la politique, nous nous retrouvons au moins sur un point: le désir de reconsidérer les utopistes du genre Fourier pour bien plus que ce que les marxistes ont voulu les dire. Etrangement, les lignes générales d’Onfray rejoignent assez bien les miennes en ce qu’il développe une vision politique horizontale, multiple, multiforme. Par contre, sa brosse historique a complètement percuté mes propres conceptions du développement du monde. A commencer par sa vision du capitalisme, le conduisant à dire une grosse absurdité: selon lui, parce que le capitalisme a toujours existé, que ce soit dans l’économie des coquillages ou celui des montages financiers, il est indépassable, il faut vivre avec et en faire un capitalisme libertaire.

Malheureusement pour son raisonnement, le capitalisme n’est pas indépassable, il n’a pas toujours existé, et je dirais même qu’il n’existe pas en majorité dans l’exercice économique planétaire. La plus grande partie des échanges, des productions et des consommations de la planète ne sont pas des échanges capitalistes. Or, l’économie se fonde sur ces trois actions. Le capitalisme, par contre, et là je le rejoins temporairement, existe depuis bien plus longtemps que la période industrielle, ou même que le XVIIe Siècle des enclosures. A preuve que son raisonnement ne tient d’ailleurs pas, c’est que le capitalisme foncier a commencé à exister sous la forme des enclosures en Grande-Bretagne dès le XIIe Siècle, et qu’a contrario il ne commença a faire son apparition dans certaines régions d’Italie qu’au XIXe Siècle. Par contre, il est exact que le capitalisme existe sous l’antiquité gréco-latine, et à l’état embryonnaire dans tous les régimes de cités qui ont vu apparaître l’écriture pour des raisons comptables. C’est précisément ces nécessités comptables qui donnent naissance au capitalisme. Un capitalisme certes encore réduit, mais réel: à partir du moment où l’on commence à pouvoir produire de l’argent avec du temps, mais sans travail, par la location d’un bien, que ce bien soit un terrain, un troupeau ou de l’argent, qu’un travailleur doive en gros payer pour travailler, apparaît le capitalisme. Mais dans la plupart des sociétés traditionnelles, celles qui ne connaissent pas, ou pas encore, la propriété, il n’y a pas de capitalisme, parce que le capitalisme n’est tout simplement pas possible sans propriété. L’écureuil, contrairement à l’imagerie populaire, n’est pas un capitaliste: à aucun moment il ne s’attend à ce qu’accumuler des réserves dans un arbre creux lui rende plus de noisettes qu’il n’en avait la veille. De même que le chef de village qui se retrouve à la tête de la plus grande réserve de pots et qui décide de faire don de la plus grande partie de celle-ci n’est pas du tout un Carnegie local, mais bien le membre d’une société qui ne connaît pas le capitalisme. Onfray se trompe lorsqu’il voit du capitalisme partout dans l’humanité.

Il n’y a pas de capitalisme sans principe de la propriété, et pas de propriété sans garantie de l’Etat ou d’une instance éventuellement privée reconnue par toutes les parties -ce qui, quand on y pense un peu, revient tout à fait au même, l’Etat étant le plus souvent, sinon toujours, aux mains de factions privées, plus ou moins petites.

Bref, c’est le libéralisme économique qui fait les frais de l’ire (légitime) d’Onfray, qui estime donc le capitalisme inamovible mais amendable. Il ne veut pas du marché libre -et qui connaît un peu ce blog sait que je suis pleinement d’accord-, mais il réclame en remplacement un capitalisme libertaire, pour lequel il s’appuie sur Proudhon ((Notons une petite contradiction chez Onfray, mais qui ne mérite pas qu’on s’y attarde: il estime qu’on ne peut s’appuyer sur les penseurs du XIXe Siècle, genre Bakhounine, pour résoudre les problèmes contemporains, mais dans les mêmes paragraphes du chapitre 7, il fait référence à Proudhon, Fourier et même La Boétie, tous auteurs desquels il m’apparaît légitime de se réclamer, quitte à les amender, alors pourquoi cette contradiction?)).

Mais en tout état de cause, Onfray retombe sur ses pattes en revendiquant une “révolution pratiquée”, mettant le convaincu en demeure de faire et d’être ce qu’il dit devoir faire et être. Très justement.

  • Pour terminer sur une note (de) comptable…

Au total, lorsque je pense encore à quelques dits et écrits d’Onfray, notamment sur l’éthique du Condottiere ((Voir ici: http://thitho.allmansland.net/?p=191, par exemple)), ou sur quelques positions politiques concrètes et actuelles, je me vois des distances avec lui, mais beaucoup plus d’affinités et bien du respect pour le travail populaire. Tout comme je me sais plus de rapprochements avec certains copains communistes ou écologistes, même quand j’estime qu’ils déconnent dans certains cas ((Comme sur la guerre en Libye, par exemple.)). Pour autant, si je suis d’accord au trois quarts avec quelqu’un, je ne peux pas me permettre de vouloir le démolir.

De toute façon, je ne m’attends pas à ce qu’un jour (prochain, hehehe), 100% de mon idéal sociétal soit jamais appliqué. Si déjà 50% pouvait l’être, comme disait, paraît-il Ghandi (avec qui je ne dois pas être d’accord à plus de 20 ou 30%) à propos de la civilisation, ce serait une bonne chose…

“L’alibye”: une mauvaise superproduction, une de plus, en attendant la suivante…

July 26th, 2011

J’ai insuffisamment étudié la guerre d’Espagne pour pouvoir l’affirmer comme un historien devrait pouvoir le faire, mais elle reste pour moi un exemple intellectuel d’application dans bien des cas de figures qui occupent le devant de la scène actuelle en matière d’engagement militaire. Les républicains, communistes, anarchistes –et autres, sûrement- qui se lancèrent à l’aide du gouvernement légitime espagnol pour le défendre contre les troupes rebelles d’obédience fasciste ou équivalente, soutenues par les régimes d’extrême-droite, la papauté et le silence radio des relatives démocraties de l’époque, le firent sur base d’une décision volontaire individuelle. Ils auront été motivés, hommes et femmes, par leurs propres convictions, peut-être par leur appartenance à un mouvement ou un parti, en suite d’une campagne de sensibilisation ou un recrutement quelconque, mais personne ne le leur a imposé. Aucun gouvernement, aucune force supérieure, n’a pu les obliger à se rendre en Espagne pour rejoindre les rangs des républicains.

Pas plus d’ailleurs que le moindre “impératif moral” kantien ou cicéronien, d’ailleurs. Et c’est ce qui fait de cet engagement toute sa force, sinon sa beauté (qu’y a-t-il de beau dans une guerre, même menée par les motivations les plus pures?): les individus étrangers qui y prirent part le firent de leur propre chef. D’un autre côté, les Espagnols, sur place, n’avaient pas plus le choix de se retrouver champ de bataille et chair à canon que les Libyens aujourd’hui, ou les Syriens, les Egyptiens, les Irakiens, les Afghans, les Ivoiriens et combien d’autres encore -Palestiniens, Israéliens, Somaliens… La liste est longue de tous ces conflits, révoltes, révolutions, guerres civiles, occupations, qui ouvrent ou ferment nos journaux dans une monotonie qui entraîne chez nous la plupart du temps plus d’indifférence ou de résignation que d’indignation ou de colère, pourtant légitimes.

Des arguments obscurs et occidentalistes

Quand des militants de certaines obédiences tentent de briser un blocus -et l’on aura reconnu le cas israélo-palestinien- ou s’engagent à braver les colères des seigneurs de guerre pour aider une population touchée par la famine -comme en Somalie-, ils le font, pour de bonnes ou de mauvaises raisons selon le jugement des uns et des autres, mais ils le font sur base individuelle, en fonction de choix souvent courageux, mais en tout cas libres, pour autant que cet adjectif puisse signifier quelque chose.

Lorsque le Monde Diplomatique de juillet 2011 publie le témoignage d’Ibrahim Al-Koni, lequel nous fait part en réalité d’un de ses amis libyens (tout comme lui), exilé en Tunisie, anonyme, qui, après bien des hésitations, après avoir d’abord aidé les blessés qui quittaient son pays d’origine, décida que son devoir était de rejoindre la révolte contre le régime de Khadafi, le fit et disparut, lorsque le Monde Diplomatique nous présente ce témoignage tout brut, il oublie de le commenter. Car, comment l’interpréter? Le message d’Ibrahim Al-Koni est-il de nous faire part de ses propres hésitations à s’engager jusqu’à ce point dans la révolte? Le fera-t-il jamais? Dès lors, nous invite-t-il à la prudence ? Ou bien nous incite-t-il à approuver l’intervention des forces de l’Otan dans son propre pays? Pour ma part, et dans l’absence de plus de détails ((Qui sait si ce héros n’est pas en fait un infâme opportuniste ? On peut raisonnablement penser que non, mais ni Serge Halimi, rédacteur en chef du Monde Diplomatique, ni moi, ni la toute grande majorité des lecteurs de l’un des meilleurs journaux de langue française, ne peuvent connaître les motivations, ni le passé d’un inconnu, aussi honorable puisse être son garant.)), je salue ici la décision prise par un individu qui estime de son devoir d’intervenir physiquement, en son nom propre, réellement, dans un conflit qui le concerne au premier chef, lui et sans doute une grande partie de ce qu’il aime. Et même s’il ne le concernait pas, son geste rappelle, au fond, à bien des égards, celui des Brigadistes –je veux dire, ceux d’Espagne, ceux de 1936, même si comparaison, en histoire, jamais n’est raison.

Mais il y a un mais.

Les arguments d’Ibrahim Al-Koni –dont la thèse reste donc obscure- sont émaillés de citations qui ne laissent pas d’étonner -sa culture d’origine y transparaît à peine-: Cicéron, Kant et un certain Henri Frédéric Amiel, desquels il tire des principes d’exigences morales, de devoir et même de bonheur dans la mort. Rapidement, il cite aussi Platon et Rousseau, l’un pour évoquer celui que d’être avec un ami, l’autre qui en appelle à la fin de l’histoire avec la disparition des tyrans, des guerres et des conspirateurs –comment ne pas les approuver ? On pourrait cependant trouver chez Platon bien d’autres exemples d’impératifs moraux, liés au devoir envers la cité, et, si étrangement notre auteur le cite ici dans une dimension plus intimiste –et concernant un passage de son œuvre dont je ne me souviens pas et que je ne saurais situer, Ibrahim Al-Koni ne l’ayant pas précisé-, le Prince des Philosophes est bien dans la lignée des éthérés idéalisants qui plaçaient la vie humaine et l’individu bien en dessous –tant qu’il ne s’agissait pas de la vie des philosophes, bien entendu, Socrate s’étant sacrifié pour toute la caste ((Ils sont rares les philosophes de la transcendance qui puissent prétendre au statut de martyr ; Sénèque fut plus la victime de ses intérêts particuliers, Giordano Bruno était devenu un charnel, et qui d’autre ?))- des intérêts supérieurs de ce qu’on appellerait plus tard la nation.

Car beaucoup de ces arguments, dans un ton larmoyant, douçâtre, presque romantique, fleurent bon le patriotisme et les exigences de l’éducation formelle, évoquent sans aucun doute les appels martiaux qui précédèrent, provoquèrent et suivirent la déclaration de guerre de 1914, tout comme de nombreux cas de guerre de manière générale. Ces impératifs moraux, occidentaux et occidentalistes, souvent baignés d’idéaux transcendants, inexpliqués, supérieurs et, pour le moins, discutables si nous gardons la tête froide, sont ceux qui traversent l’histoire des guerres depuis le réveil des nations –et qu’on retrouve plus loin dans le passé à quelques occasions lorsque les armées ne sont pas professionnelles, comme lors des croisades des pauvres, par exemple, mais aussi dans les discours d’exhortations des généraux et des rois en prologue au carnage, justifiant le prétendu péché mortel du meurtre de son prochain anticipativement.

Justes causes et libertés

Si la guerre d’Espagne, la Commune de Paris, Kronstadt, la Makhnovchtchina, et quelques autres exemples résonnent en moi comme autant de défaites, il s’agit aussi des cas trop rares où les troupes qui y furent défaites ((Les victoires militaires émancipatrices, il faut le dire, sont assez rares. Même dans le cas de la révolution mexicaine zapatiste, le résultat est largement discutable, par exemple. Le cas cubain est hautement subjectif, encore qu’il ait une bonne part de ma sympathie, mais là aussi nous avons affaire à un cas bien discutable.)), et surtout traitant des étrangers venus les soutenir -en vain-, avaient la légitimité du choix personnel, individuel, libre -sans doute pas toujours, mais suffisamment souvent pour les démarquer des cas trop nombreux où une entité supérieure décidait pour les troufions envoyés au casse-pipe.

Car, même si dans le cas de la Libye les forces de l’Otan sont suffisamment prudentes -certains diraient lâches- pour éviter de s’exposer aux tirs ennemis, il faut reconnaître que dans la plupart des cas de guerres “justes” initiées ou prises en marche par les forces occidentales un peu partout dans le monde -et l’on peut remonter loin dans le temps, reprendre les cas des guerres coloniales, de l’intervention des « démocraties » en faveur des Tsars en Russie à partir de la fin de la guerre de 14-18, du soutien difficilement explicable de contingents français et belges au Mexique pour soutenir un Empereur européen, et combien d’autres encore-, c’est le roi, le prince, l’Etat qui décide pour les piétons où ils se doivent de poser leurs cantinières et bivouaquer en attendant de se prendre une embuscade sur la tête.

Je ne suis malheureusement pas enclin à pleurer avec les familles lorsque j’entends que tel nombre de soldats professionnels français, belges ou hollandais perdent la vie dans des conflits lointains, parce que je suis encore dans la logique primaire qui prétend que si ces soldats sont des professionnels, la mort fait partie de leur travail, aussi horrible que cela puisse paraître. Je déplore, sincèrement, ces morts, presque autant que je déplore celles de tous les autres combattants, méchants islamistes compris, mais bien moins que toutes celles des civils et des résistants aux régimes envahisseurs -Otan compris- qui, eux, n’ont décidément pas la possibilité de choisir la paix et la tranquillité, comme j’ai moi l’occasion de le faire ((Ou plutôt que je n’ai même pas à devoir le faire, même si, une fois ceci proclamé, quelque part, ayant pris conscience de ma situation, je fais le choix de ne prendre part –temporairement ?- à aucun conflit.)), assis que je suis en ce moment dans un train entre Bruxelles et Paris, pratiquement assuré de mourir dans mon lit ou, au pire, dans un accident quelconque, mais de toute façon avec une espérance de vie remarquable à l’échelle de l’histoire du monde et dans des conditions qui, si elles empirent en ce moment, n’ont jamais été égalées de mémoire d’archéologue. Comme le service militaire a disparu dans les pays que je côtoie le plus -à l’exception du Brésil, dont il serait intéressant de parler aussi-, il devient difficile d’évoquer le sort des troufions qu’on envoie au front à quelques semaines de la quille –il n’y en a plus.

Restent les décideurs politiques, les lobbys dans tous les sens, les intérêts privés et les intérêts d’état qui motivent les mouvements des troupes, des porte-avions et des lance-missiles un peu partout sur la surface encore bleue de notre planète. Je ne comprends toujours pas comment les soit-disantes démocraties peuvent encore autant être peuplées d’hommes et de femmes qui réagissent aussi peu à toutes les déclarations de guerre qu’ils et elles connaissent tout au long de leurs vies. Si Jean, Simon, Lucette ou Redouan décide de rejoindre les rangs de telle ou telle faction, armé de sa pétoire, la fleur au canon, les deux pieds dans ses godillots, en son nom, pour l’honneur, pour la gloire, pour le pognon ou pour sauver des vies, le tout en pleine conscience ou en pleine illusion, aucun gouvernement ne devrait être autorisé à l’en empêcher, pas plus qu’il ne devrait être autorisé à envoyer Georges, Rebecca, Momo ou Camille servir de cible dans les régions les plus invraisemblables.

Qu’on ne s’y trompe pas: je ne suis pas un pacifiste rabique (sic, avec un seul b): il existe de nombreuses causes devenues militaires que j’estime légitimes -souvent après-coup, car nous sommes si mal informés en réalité, même si nous sommes parfois trop informés-, mais j’en estime au moins dix fois plus qui ne le sont pas du tout, même si de nouveau cela n’apparaît clairement qu’aux yeux de l’histoire, un, deux, cinq, dix ou cinquante ans plus tard. Si je crains, sans pouvoir l’affirmer, que beaucoup d’individus sincères se sont lancés et se lancent encore dans un conflit sans en connaître suffisamment tous les tenants et aboutissants, je reconnais que ces individus exercent au moins un droit tout à fait légitime et élémentaire dans notre monde complexe et confus.

La guerre en Libye, en tant qu’individu, ne me montre pas clairement où se trouve le camp des populations opprimées. Si je n’ai aucune sympathie pour Khadafi et que sa disparition me laisserait au mieux froid, je ne suis pas convaincu qu’une rébellion menée par d’anciens dignitaires de son gouvernement, encouragée par une organisation internationale qui ne brille pas par son humanisme -l’Otan, si elle n’avait pas été reconnue-, mérite notre soutien ou notre indulgence quand on apprend les crimes qu’elle a contribué à perpétrer. Certes, tous les hommes et toutes les femmes qui subissent une tyrannie méritent notre soutien, notre sympathie et, au cas par cas, notre aide, mais cette aide doit être spontanée, venir des individus, n’impliquer qu’eux-mêmes et exclure par nature toute intervention émanant d’un organisme supérieur, qu’il soit national ou international.

Aussi, je ne pourrais que reconnaître le courage de qui déciderait demain de se jeter dans l’inconnu d’une bataille –quand bien même je ne serais pas sûr de le ou la comprendre-, mais je me refuse à concéder le droit ou la légitimité, jamais, à un corps législatif ou exécutif d’envoyer un corps de jeunes gens à leur place, au nom de quelque intérêt que ce soit, fût-ce de celui des droits de l’homme.

 

Dans dix mille ans, qui se souviendra de Mozart?

July 21st, 2011

Les Bouddhas d’Afghanistan, explosés par un régime qualifié de médiéval ((Au passage, ce n’est pas sympa pour le Moyen-Âge.));

Les sites archéologiques babyloniens effacés par l’armée étatsunienne;

Les musées du Caire dévalisés, pillés au cours du printemps arabe;

Et maintenant Leptis Magna, ville antique, bombardée par l’Otan… ((http://blog.ilmanifesto.it/arte/2011/06/20/leptis-magna-e-le-bombe-che-la-polverizzano/))

On pourrait difficilement éviter de parler des innombrables villes détruites par le passage des armées, les bombardements, les guerres de tranchée au cours des siècles passés, effaçant nombre de traces importantes du passé dans le même temps.

Certes, en tant qu’historien, je trouve cela triste et désolant, mais cette émotion ne peut éluder deux aspects importants de ces événements.

D’une part, il est toujours plus important de considérer les pertes humaines, les désastres personnels, que de se concentrer sur des reliques de périodes éteintes. Même s’il est pénible de voir disparaître des éléments du “patrimoine culturel” mondial, il est bien plus terrifiant de constater la difficulté à maintenir l’attention du grand public sur les effets de la guerre concernant les victimes civiles.

D’autre part, si des ruines disparaissent, si des artefacts plusieurs fois millénaires sont réduits à rien, volés, confisqués par de richissimes et condamnables collectionneurs, il ne faut pas oublier que toutes ces choses sont vouées à moyen ou à long terme à l’oubli. Tout d’abord à la sélection qui se fera fatalement au cours des siècles à venir, déterminant les lieux qui devront se mettre à nouveau au service de l’homme en dépit de ce qu’ils contiennent de traces anciennes. Qu’on ne s’en offusque pas: ce choix est déjà une réalité tous les jours que les archéologues ou les historiens ont fait ou font. En archéologie, les immeubles, les trains, les aéroports, l’industrie, que sais-je, imposent souvent des fouilles d’urgence qui précèdent la destruction de sites de découvertes parfois très intéressants. Par ailleurs, les choix archéologiques imposent parfois eux-mêmes des sacrifices (qui ne sont pas toujours considérés comme tels au moment même). Ainsi, Schliemann n’a-t-il pas hésité à effacer toutes traces des villes qui surplombaient la Troie de la légende homérique, qui seule l’intéressait. Combien de repères du passé les scientifiques eux-mêmes n’ont-ils pas détruits plus ou moins consciemment? Difficile de leur en faire grief, puisque c’est à eux que l’on doit ce que l’on en sait, finalement.

Mais il y a plus fondamental, quand on veut bien se rappeler que le temps écoulé entre les premières pyramides et l’ère chrétienne représente plus d’un tiers de plus que celui qui s’est écoulé depuis. Considérons ce que l’on a retenu de cette époque, et pas seulement en terme de civilisations, mais de toute l’humanité d’alors. On pourrait probablement taper un recueil plus mince que n’importe quel bottin départemental français de tous les noms connus de la haute antiquité, disons, avant l’an mille avant l’autre ahuri -qui sait s’il a vraiment existé, celui-là, d’ailleurs-, et nous n’avons pour la plupart de ces noms guère plus de renseignements qu’une idée de leurs professions, de leur origine et, éventuellement, du siècle où ils ont vécu.

Pourtant, il devait y avoir de grands artistes parmi eux, des gens éclairés, des savants, des gens de bien, aussi, femmes et hommes…

Du boulot pour les mormons en perspective.

Quand on soupçonne que nous n’avons conservé sans doute de la littérature romaine qu’une fraction difficilement quantifiable (peut-être un dixième de son ensemble), peu de chose de sa sculpture, de son imagerie, de ses arts plastiques, et pratiquement rien de sa musique ou de sa peinture, que l’on compte encore. Que dire des populations vaincues par les Romains? Et plus près de nous par les vaincus des colons européens à l’échelle de la planète, et dont les anthropologues, les archéologues, s’échinent à reconstituer des morceaux d’histoire.

Il existe encore des doutes sur l’endroit où aurait été enterré Mozart. Qui se souviendra de lui dans dix mille ans?

 

 

L’oeuvre, indissociable de l’auteur

July 19th, 2011

“Je tiens pour ma part que la philosophie procède du corps d’un philosophe qui tâche de sauver sa peau et prétend à l’universel alors qu’il se contente de mettre au point un dispositif subjectif, une stratégie qui s’apparente à la sotériologie des Anciens. Lire et comprendre un philosophe, une philosophie, suppose une psychanalyse existentielle pour mettre en relation la vie et l’oeuvre, le corps qui pense et le produit de la pensée, la biographie et l’écriture, la construction de soi et l’édification d’une vision du monde. (…)

“Je tiens pour une méthode de lecture et d’investigation qui allie dans un même corpus l’oeuvre complète publiée du vivant de l’auteur, ses correspondances, ses biographies et tous les témoignages concernant cette architecture singulière. (…)” ((M. ONFRAY, Manifeste hédoniste, éd. Autrement, Paris, 2011, p. 11-12.))

 

On ne peut pas distinguer l’oeuvre de son auteur. Que l’on soit touché par l’esthétique d’un travail particulier, peinture, sculpture, musique ou écriture, ne change rien à ce que notre jugement définitif, même subjectif, même susceptible d’évolution, ne peut faire l’économie des intentions de l’artiste ou du philosophe, ni de son bagage, de sa culture, voire de ses crimes.

Dans le même registre d’idée, et je pense que cela rejoint la réflexion d’Onfray à laquelle j’adhère pleinement ici, un spectateur, un observateur, un visiteur, ne peut contempler un tableau, suivre une pièce de théâtre ou écouter un opéra sans se préoccuper des commanditaires, on dirait aujourd’hui des producteurs.

L’intention de l’oeuvre, si elle ne prime pas sur l’oeuvre elle-même, ne s’en détache jamais, et l’oeuvre ne s’émancipe jamais de ce qui l’a motivée, quoi qu’on en dise, quoi qu’il arrive. Si l’histoire de l’art perd la trace de cette intention, de cette motivation, l’oeuvre y reste attachée, et il est de notre devoir de nous en souvenir, et de tenter de les découvrir ou redécouvrir.

Difficile d’oublier le rôle de Céline au cours de la 2e guerre mondiale. Même en imaginant qu’il serait mort au lendemain de l’édition de “Mort à crédit”, son travail y reste attaché. Et s’il était mort avant? Question piquante.

Rimbaud-poète doit-il être distingué de Rimbaud-trafiquant d’armes ((Certains voulaient lui coller l’étiquette de négrier, mais l’histoire indique que cette accusation est plus que probablement fausse.))? Pas évident, même si le poète a de fait disparu vers 21 ou 22 ans et que le trafiquant n’apparaît qu’une dizaine d’années plus tard.

Moins évident encore: lorsque Mozart et son esprit libertin et libéré se mettent au service d’un empereur, fût-il éclairé, tel que Joseph II, comment devons-nous l’accepter? L’histoire a largement consacré Mozart, encense vie et oeuvre, sans doute avec raison, mais il était au service d’un dictateur tout-puissant, qui fit notamment la guerre aux rebelles des Etats Belgiques Unis, agit en despote, ne supportant guère la contradiction, calculant non en fonction du bonheur du peuple, mais de la seule raison d’Etat. L’oeuvre de Mozart n’en serait-elle pas entâchée?

L’indépendance de l’artiste, de l’auteur, sa liberté sont importants, tout autant que son intégrité.

Question subsidiaire: comment reconnaître un artiste d’un artisan -cela dit en passant sans vouloir aucunement dévaloriser le travail de l’artisan-, l’écrivain du publiciste, le poète du rimeur, le peintre du reproducteur, le cinéaste du technicien…

 

L’économie, c’est simple comme une réflexion de chef d’Etat

June 24th, 2011

Selon un rapport Natixis signé de l’économiste Patrick Artus ((Que l’on retrouve ici: http://cib.natixis.com/flushdoc.aspx?id=58440 -j’ai un problème avec mon Java, pour l’instant.)), et contrairement aux assertions imbéciles d’Angela Merkel ((Ici par exemple: http://www.atlantico.fr/pepites/angela-merkel-union-europeenne-trop-vacances-grece-espagne-portugal-101413.html )), les Allemands ne travaillent pas plus que les Grecs, les Italiens, les Espagnols ou les Portugais. Au contraire, on peut même dire qu’en moyenne les Allemands travaillent moins d’heure par an, mais aussi en moyenne dans toute leur vie, et ont -en moyenne toujours plus de vacances… ((Cela nous rappelle l’imbécillité sarkozienne qui réclamait de ses dockers du Havre qu’ils travaillent 4000 heures par an, ce qui représentait une charge horaire de 16h par jour sans férié, sans dimanche, sans vacances.))

 

Et ils ne coûtent pas non plus moins cher à leurs entreprises. Si les charges sociales allemandes sont actuellement en baisse, elles sont encore largement supérieures que dans ces quatre pays.

Alors quels sont les secrets de l’Allemagne pour avoir su maintenir la barque à flot?

Ce n’est pas un miracle: l’Allemagne exporte plus que ses voisins, vit sur son épargne, s’est endetté et s’endette beaucoup moins que la plupart de ses voisins. Ses ressortissants, tout comme ceux de la Belgique et de la France, sont bien formés, et donc sont plus productifs. Les infrastructures en Allemagne ou en Belgique, comme dans d’autres pays comme les Pays-Bas, sont simplement plus performantes et/ou plus modernes que dans la plupart des régions du Sud de l’Europe. En suite de quoi, ils sont également encore plus compétitifs dans bien des secteurs, car, même s’ils coûtent plus chers, ils produisent mieux et plus qu’ailleurs où les salaires creusent des galeries.

Quand un politique ou un économiste vous parle de coûts, de temps de travail, de productivité ou de compétitivité, prêtez l’oreille à ce qu’il ne dit pas. Car s’ils avaient vraiment raison de se plaindre, dans un marché mondial globalisé, il y a longtemps que leur pays n’existerait plus. C’est pas de moi tout ça, c’est simplement une petite adaptation de la théorie des avantages comparés. C’est un certain Adam Smith qui a sorti ça. Au XVIIIe Siècle. Selon lequel chaque nation devrait se concentrer sur ce qu’elle sait faire le mieux, exporter sur ces bases, et acheter ce qu’elle fait mal ou moins bien.

Ce n’est pas ma tasse de thé, personnellement… Non, non… Pas parce que la théorie de Smith serait infondée, incorrecte ou non scientifique, non: elle est fondée, judicieuse et basée sur l’observation des faits. Mais elle ne génère pas de la justice sociale.

En effet, dans un monde où les pouvoirs financiers sont aussi mobiles que des discours de vitrines politiques, les avantages comparés paraissent changer de situation toutes les dix minutes, et l’on ferme des entreprises qui venaient d’être ouvertes quelques années plus tôt sous prétexte qu’on fait mieux/moins cher/plus près du client/avec moins de syndicat/ bref, dans de meilleures conditions patronales ailleurs.

Tout cela resterait bel et bon si derrière cette logique il n’y avait pas chaque fois des individus embarqués -et débarqués- dans l’affaire, si ce n’était pas des familles par paquets de cent ou de mille qui dépendaient des caprices de la rentabilité d’un projet, des profits à deux chiffres, des soucis des fonds de pension et autres lubies de traders fous. Tout cela ne serait rien, donc, si les conditions de travail qui arrangent si bien les investisseurs ne concernaient pas si directement des travailleuses et des travailleurs éparpillés dans le monde, mais qui n’en ont pas moins chacun une vie, souvent une famille, fréquemment des rêves et des désirs de stabilité -ce qui n’est pas du tout du goût de ces personnes qui voient dans la Chine “l’atelier du monde”, dans l’esprit des Coréens un exemple de servitude ou dans l’Afrique Noire un immense terrain d’exploitation dont les habitants sont les bêtes de somme -et dans l’Europe et les Zuessa un immense marché de consommateurs abrutis -ce qui est en train de devenir dans les pays dits émergents, histoire de ne pas faire de jaloux et de bien foutre en l’air tout espoir de stabilité écologique.

Lorsque le moteur de l’économie est un mélange de recherche de profits et d’ambition politique ((Ce qui, à mes yeux, n’est pas loin d’être la même chose, mais laissons cela.)), elle ne peut se faire fatalement que dans l’intérêt d’une poignée d’illuminés qui se prennent pour des innovateurs, des entrepreneurs, des visionneurs, des enchanteurs, des enlumineurs, ou que sais-je encore, et qui se figurent, comme au bon vieux temps de l’aristocratie, qu’ils doivent rester en charge des décisions importantes en matière politique -vu que les gens, ils ne savent pas ce qu’ils veulent-, et ils ont même inventé un chouette mot pour ça: gouvernance.

C’est ainsi que les Grecs ne peuvent plus décider de leur sort, mais c’est aussi le cas de la plupart des individus et des nations dans le monde: ne nous leurrons pas, dès que les cliques vaguement alternées au pouvoir dans les sphères européennes en auront terminé avec la Grèce, le Portugal et l’Irlande, ils iront niveler un peu “par le haut” dans les autres pays où les syndicats ne peuvent de toute façon plus rien faire depuis qu’ils se sont réduits au rang de partenaires sociaux en charge de négocier le prix de la vaseline, en gros… D’ailleurs, ils nous préparent de temps à la chose, et ce n’est pas pour faire joli dans les canards.

Alors, oui, les Grecs vont devoir travailler plus pour gagner moins… Mais ce n’est pas du tout pour les raisons imbéciles que nous a sorties la non-moins dispensable Merkel ou le guère plus pertinent Sarkozy. C’est simplement parce que les chantres de l’économie qui-refuse-le-nivelage-par-le-bas n’a qu’une seule option: continuer à raser gratis les moins vernis de la planète pour le plus grand profit de ceux qui financent leurs études, leurs campagnes électorales, leurs journaux…

Evkaristo poli…

Les profondeurs

June 17th, 2011

A sa ministre des sports, qui tentait de faire passer l’idée que le monde du sport professionnel n’était pas si exaltant que ça en lui rappelant  qu'”il y a quand même des problèmes d’homophobie”, M. Nicolas Sarkozy, ci-devant président de la république, répondait ((Canard Enchaîné, 15 juin 2011, p. 2.)):

<i>”Je ne le crois pas. Il y a dans ce domaine l’exemple du Stade Français et de mon ami Max Guazzini qui a choisi des maillots roses pour ses joueurs. Je ne voudrais pas qu’on laisse croire qu’il y a des discriminations ou de l’homophobie dans le sport.”</i>

En une intervention, Sarkozy est parvenu à dire trois formidables bêtises du niveau au mieux de la brève de comptoir:

-en discréditant les observations et études faites sur le monde du sport dont Jouanno tentait sûrement de se faire l’écho;

-en se crapahutant sur un cliché sur l’homosexualité qui serait fatalement liée au rose, ou sur le rose qui serait fatalement lié à l’homosexualité -les Italiens apprécieront, eux dont le leader du Giro est vêtu de cette couleur;

-en distinguant l’homophobie des discriminations par un “ou” exclusif.

J’imagine tout de même les levées de sourcils qui ont dû se faire au cours de ce Conseil des Ministres -on ne peut pas penser qu’un Fillon ou un Juppé, par exemple, bien que salauds dans leur genre, ne se soient pas intérieurement effondrés en entendant des imbécillités pareilles.

Sarkozy, avec ou sans Carla, ça reste un exemple de profondeur abyssale…

 

une cravate aux notaires…

June 4th, 2011

C’est pas moi qui le dit, c’est RTL: le monde n’a jamais été aussi riche. Et, en Belgique, 458000 ménages sont millionnaires en dollars… De quoi s’plaint-on, j’vous l’demande! Mais retirez les propriétés terriennes, et ce chiffre tombe à 142000. alors, révolutionnaires, relisez ceci:

Le grain de sable entre les doigts.

Guerres capitales

May 23rd, 2011

Une chose qu’on apprend de la lecture des analystes économiques, c’est l’existence et la violence des luttes entre les différentes factions du capitalisme.

Entre ceux qui exigent un taux d’intérêt de base plus élevé et ceux qui veulent le contraire ((C’est-à-dire un intérêt sur l’argent que les banques empruntent à la Banque Centrale. Par exemple, ce taux est relativement bas aux USA, il y fleurte souvent avec les 0%; chez nous il représente souvent à peu près un pour-cent; au Brésil, ce taux tourne autour de 10%.)) (le saviez-vous? pour déterminer sa politique, la Banque Centrale brésilienne interroge régulièrement 150 personnes, toutes issues du secteur financier); entre ceux qui crient harau sur les chômeurs, et ceux qui en veulent plus ((le plein-emploi, c’est à 0% de chômeurs? Surtout pas, ça tourne entre 1 et 7% suivant les têtes d’oeuf qui décident de ce qui est bien pour vous)); entre ceux qui régulent (surtout pour protéger le marché national, ou plus prosaïquement leurs propres intérêts) et ceux qui dérégulent (où l’on retrouvera plutôt les néo-classiques); etc.

Entre les (faussement) naïfs, genre Stiglitz, et les purs et durs, genre Mieses, Hayek, il y a bien des nuances…

Leur avantage, c’est que, dans tous les cas, ils se battent pour la même chose, donc leurs idées sont toujours gagnantes, quoi qu’il arrive, puisqu’elles se basent sur la concurrence, le rapport de force, la loi du plus fort.

Nous y voilà, sans doute bien: pourquoi ne pouvons-nous pas gagner, nous qui sommes opposés au marché? Parce que pour gagner, il faut participer au rapport de force, c’est-à-dire typiquement au marché. Que les capitaux, en l’occurrence, se comptent en hommes, en moyens de production, en armes, en villes, régions ou pays acquis à notre cause ou à la leur, en matières premières ou en tout autre chose n’importe pas: il s’agit toujours en fin de compte de découvrir sur l’indicateur de la balance le plus lourd des compétiteurs.

Il y a bien une solution, qui consiste à refuser le combat, justement, ou plutôt à le situer là où on ne l’attend pas. C’est toute la problématique de la créativité qu’il nous faut sans cesse développer dans le monde de la militance de gauche, car les boucliers du capital et du libéralisme sont nombreux, et eux aussi s’adaptent rapidement.

Les vieilles luttes syndicales, malheureusement, se placent typiquement dans ce type de combats, où les négociations se réalisent en fonction du rapport de force. Comme les syndicats ne sont plus revendicatifs, ne semblent plus avoir de marge de progression, c’est généralement sur base des régressions voulues par l’État ou le patronat qu’ils réagissent, bien plus remarquablement que sur des revendications positives.

Les grèves, les manifestations, les piquets, et autres manoeuvres classiques syndicales ne surprennent plus et sont régulièrement discréditées par les discours établis -de mauvaise foi- du genre “prise d’otage des usagers”. Il n’empêche que ça fonctionne, terriblement, parce que l’aspect positif de ces actions s’est éloigné de l’esprit des gens avec le corporatisme syndical, la lassitude, le statut de combat d’arrière-garde et l’excellente -et tragique- campagne de discrédit menée par les adversaires des travailleurs.

La lutte électorale est depuis longtemps perdue pour la gauche anti-capitaliste. Nous n’avons plus depuis longtemps, si tant est que nous l’avons jamais eue, l’occasion de gagner réellement des élections, aussi bien en Europe qu’aux Etats-Unis d’Amérique. Dans ce cadre, le rapport de force, et donc l’importance de l’accumulation de capital (humain, financier, relationnel, émotionnel), est sans doute encore plus évident, et il est clair qu’il est à l’avantage des forces libérales, qu’elles soient classiques, modérées, sociales-démocrates ou fascistes: l’électeur a été réduit à choisir entre les différents gestionnaires du capital en fonction principalement de l’alternance des charges voulues par le système qui y trouve ses apparences démocratiques.

Les rares fois où l’extrême-gauche semble l’avoir emporté, à l’échelle d’une ville, d’une région ou d’un pays, on se rend compte assez rapidement que la perspective réelle est le plus souvent populiste, nationaliste ou gentiment sociale-démocrate, et que dans tous les cas elles finissent par servir, directement ou non, le marché. Les exemples récents qui eurent et continuent d’avoir lieu en Amérique Latine confirment largement cette observation: en aucun cas, la propriété privée, la liberté d’entreprise ou la privatisation des moyens de production n’ont été réellement menacées dans aucune des régions du monde où ‘la gauche’ a pu l’emporter, contrairement aux campagnes haineuses des presses conservatrices européennes ou américaines ((Américaines dans le sens du continent américain, et non étatsuien.)). Le marché, régulé ou non, y est sauf; les actionnaires y sont heureux.

Toutes les fois où le capital s’est trouvé déstabilisé, dans son acception politique ou entrepreneurial, ce fut à chaque fois sous l’effet de la surprise. Lorsque les mouvements populaires créent des événements inattendus, préparés ou spontanés, il se forge un espace, temporairement, dans lequel les effets de ces actions peuvent s’avérer concluantes, positives, réellement intéressantes. Le problème réside dans la durée. Quelques exemples peuvent venir des mouvements alter-mondialistes, de Via Campesina, des campagnes de conscientisation des voyageurs qui accompagnent malgré eux des sans-papiers en avion, des destructions de chantier de centres fermés, des radios alternatives, des blogs activistes. Il y a des milliers d’exemples. Des millions à travers l’histoire. Même les grèves et les manifestations, à l’origine, surprirent la réaction aristocrate ou bourgeoise. La Commune de Paris ou la révolte de Kronstadt furent autant de surprises pour le pouvoir en place. Mais chaque surprise devient ensuite prévisible, chaque événement nouveau devient vieux et en fin de compte, chaque espace gagné, s’il n’est pas alimenté par une nouveauté très rapidement, se perd rapidement. La réaction s’organise, le pouvoir cherche, puis trouve une parade, récupère ou détruit l’intrusion, et l’intègre finalement au marché, au rapport de forces. Où elle sait qu’elle est plus forte.

Ma réflexion me mène cependant à estimer que c’est bien sur ces terrains de la surprise, de la nouveauté, mais aussi de la joie, de l’enthousiasme, que nous devons toujours plus travailler. Les nébuleuses, myriades, mouvances, coopérations, coopératives, collectivités, communautés, équipes, cellules, concentriques, horizontales, locales, interlocales, etc. doivent multiplier les idées d’action, peut-être surtout dans l’esprit d’éviter, d’éluder la lutte, de séduire le plus de monde possible par la joie et la conscientisation de ce que nous sommes capables de faire, pour nous, ensemble, des milliers de choses, sans demander la permission, sans nous confronter directement aux forces réactionnaires, en trouvant des espaces auxquels elles n’avaient pas pensés, qu’elles avaient laissés libres parce qu’elles ne les avaient pas envisagés.

Paradoxalement, on pourrait penser que cette idée s’inspire du principe libéral qui veut que l’innovation soit récompensée par la création de nouveaux marchés et la promesse de succès basés sur le fait que l’on est le premier à avoir pensé à la disposition d’un produit ou d’un service. En réalité, ce n’est pas le cas. Toute prétendue innovation découverte sur le marché n’est généralement qu’une reconsidération d’un ancien besoin déjà assouvi, que l’on prétend satisfaire mieux, plus, plus vite ou moins cher. Quant à nous, il ne s’agit pas de satisfaire un besoin, mais de contourner les limites imposantes forgées par la réaction depuis des milliers d’années pour empêcher, freiner, le progrès social, sous quelque forme qu’il soit.

Je suis conscient de n’avoir rien écrit ici de bien nouveau, que beaucoup d’entre vous auront l’impression, simplement, de ne lire que ce qu’ils pensaient déjà. Mais je ne vois pas très bien où cette idée simple a pu déjà être formulée par écrit, ni théorisée, ce dont elle aurait peut-être besoin.

Nouveau paradoxe, d’ailleurs, dans cette perspective: l’écrire, la théoriser, ne l’expose-t-elle pas à la fragilisation?

Et comme je ne suis pas soc-dem…

May 13th, 2011

Ce matin, sur une radio écoutée au hasard -j’crois bien qu’c’était RTL, à l’écoute de la p’tite nimatrice, j’entendais deux économistes défendre avec leurs petits ongles du FMI et de l’OCDE une réforme de la pension “comme on la connaît” afin de la conserver, parce qu’on n’a jamais eu, paraît-il, autant besoin de la solidarité… ((J’ai découvert après-coup qu’il s’agissait de Jean Hindriks et Ivan van de Cloot, de l’Itinera Institute.))

Je n’avais pas souvent entendu défendre une réforme de droite, conservatrice, avec autant d’aplomb comme si c’était une mesure de gauche… En définitive, l’idée était d’étendre la solidarité dans le temps, en insistant sur la longueur de la carrière plutôt que sur l’âge, tout en considérant la pénibilité de certaines professions, possibilisant mi-temps de travail et demi-pension, et blablabla, et blablabla… Tout pour éviter, disaient-ils, la pension individuelle -sans les avoir nommés, les fonds de pension privés, je suppose…

Ça, on ne peut pas le leur reprocher, sans doute… Mais, blème, comme chaque fois que j’entends ce genre de truc, j’ai la même réaction -ah merde, un truc primaire-: encore un combat d’arrière-garde qui ne fera qu’alimenter la course en arrière.

Un véritable programme de gauche, je veux dire, balisé sur la solidarité, devrait reprendre les choses dans le bon ordre, c’est-à-dire complètement à l’envers. Ce n’est pas en terme de gngngn, tirage de corde pour freiner la chute du bidule, qu’il faut réfléchir à la société solidaire et libertaire, mais bien en termes d’égalité et de liberté.

Je peux me tromper, mais je vois au moins cinq éléments qui doivent figurer comme les préoccupations principales d’un individu de gauche, a fortiori un politicien. Et ce dans le plus grand réalisme, sans du tout estimer qu’il doive s’agir d’un voeu pieux, d’une jolie intention, d’une douce utopie, mais au contraire d’une nécessité de base, à imposer comme le socle même de toute idée de gauche.

En dehors de ces cinq points (sans préjugé de ce que j’aurais par ailleurs oublié), pas de gauche possible.

Il s’agit de:

1) la garantie du droit aux soins de santé selon les principes du choix du soin par le patient, ses médecins et/ou ses proches -s’il fallait le préciser, sans que des préoccupations d’ordre financier n’en soient des barrières;

2) une véritable liberté et une égalité intégrale de l’enseignement, prolongé tout au long de la vie, co-organisé du bas vers le haut;

3) une éradication de l’hypocrisie du “nivellement par le bas” dans toutes les matières, en particulier le droit au logement qui devrait supplanter la liberté d’accumuler des résidences et des espaces résidentiels égoïstes;

4) une reconsidération du droit à l’alimentation centrée sur un équilibre qualitatif, une réappropriation des espaces productifs, un retour aux coopératives, une revalorisation d’une économie participative;

5) la simple considération de la sécurité de ces droits en dehors de toute considération circonstancielle, comme, tiens, pris au hasard, une crise, par exemple, ou, tiens, un autre exemple, une baisse des profits des maîtres des forges.

Tout le reste, transport, liberté de déplacement, d’expression, temps de travail raisonnable, ben, ça devrait venir en suite de ça. Je veux parier que des populations qui puissent disposer de ces cinq constantes pourront assurer le reste.

Si j’étais soc-dem’…

April 14th, 2011

… (encore eût-il fallu que je le fusse)… ((En hommage à Ingrid A., qui me réclamait quelque chose de constructif, positif, et toute cette sorte de chose.))

Voilà quel serait mon programme – trash (attention, ça enrhume):

-sortie de la monarchie et installation d’une république fédérative menée par un collège présidentiel sans pouvoir, mais pour la galerie internationale; le pouvoir étant tenu entre les mains de collèges locaux, genre cantons helvétiques, mais en moins bancaires;

Sortie de l’Otan et diminution des frais et dépenses militaires – concentrations d’iceux à la défense civile, la neutralisation des armes d’attaque – exclusion des bureaux et des armes de l’Otan du territoire (s’il fallait encore le préciser) – on leur accordera un délai d’expulsion, allez, disons de 6 mois, ils auront tout l’été pour évacuer chez Sarko;

reconversion des militaires dans l’aide civile, en Belgique ou ailleurs (après tout qui peut le pire, peut parfois le meilleur) – promotion des jeux genre paintball pour les ultrafanatiques qui n’en peuvent mie de flinguer leurs voisins, il faut bien que crétinerie se passe;

reconversion des usines d’armement nationales, notamment dans les systèmes de contre-mesures, mais aussi dans des domaines qui exploitent l’expertise de nos travailleurs de ces domaines dans des directions humanistes – en matière de transition, un an de salaire sera accordé à l’ensemble des travailleurs de ces entreprises en vue d’un vaste chantier de réflexion quant à la conversion;

-réactivation des programmes de transport public (train, tram, bus), mais alors vraiment public, sur base de coopératives locales et régionales, avec une large autonomie accordée aux municipalités dans le domaine – oups, j’ai oublié les avions -ah ben tant pis;

-promotion du travail à domicile, dans des conditions favorables aux travailleurs, et non pas seulement aux entrepreneurs, qui économiseront en terme de surfaces utiles, frais de mobiliers, etc. – promotion de toutes les activités diminuant les déplacements par véhicules individuels à moteur – promotion de toutes celles incluant des déplacements à vélo (C’est Gérard qui va être content);

-taxes et imposition sur le lieu de travail, non sur le lieu d’habitation, sauf en ce qui concerne les frais de voiries, de services locaux, etc. – histoire de remettre les villes à la campagne et les campagnes à la ville;

-augmentation des taxes sur les résidences secondaires et sur les revenus locatifs cumulés – réduction des taxes sur les premières résidences – on peut être sérieux deux minutes;

-décriminalisation de l’usage de toutes les drogues, production nationale pour certaines d’entre elles (à déterminer par un conseil de sages incluant les héritiers spirituels de Timothy Leary et mon pote Stéphane), liberté de production à petite échelle, régulation de leur circulation, suivi libre et déculpabilisation des consommateurs durs – taxation sur des bases sanitaires – ;

-fixation des loyers sur l’index, à partir de deux ans avant l’introduction de la proposition – concrètement: gel des loyers – concrètement: frein à l’augmentation de la pauvreté, si vous n’aviez pas compris l’idée;

-aides à la valorisation des logements de tailles modestes, familiaux – aides à la restauration des biens susceptibles de continuer à servir d’alternative viable aux immeubles à appartement, notamment sur le plan de la réduction des dépenses énergétiques, etc.;

-rachat d’immeubles de rapport, multiplication des logements de type sociaux, extension du marché locatif afin de faire pression sur les loyers et réduire la motivation des grands propriétaires – sprotch;

-élaboration d’un revenu de base universel pour tous les habitants (y compris étrangers), individuel et lié à une inscription localisée et une visite régulière et individuelle (pas familiale) – dans le même cadre, promotion des milieux communautaires, des initiatives de quartier, des ententes de rues, etc., dans le but de réduire les contrôles officiels et augmenter les esprits de solidarité;

-les enfants de moins de, disons, douze ans, seront accompagnés par des tuteurs sociaux plus ou moins informels – ce travail de tutorat devrait être exercé par la plus grande partie des adultes, sur base de quelques heures par semaine, considérées comme une forme de rétribution à la société pour le revenu universel (même s’il n’est pas question de le lier formellement à celui-ci) – ce point est à discuter furieusement, parce que je me plante peut-être royalement;

-promotion des échanges interlocaux des jeunes, de manière libre;

-suppression des cours “philosophiques” à l’école – pour les francophones non belges, ça veut dire fin des cours de religion dans l’enceinte scolaire;

-contrôle des cours “philosophiques” dans les temples et autres offices religieux – faut bien que je manifeste ma fibre autoritaire sur quelque chose;

-cours scientifiques sur les religions – je veux bien établir le programme, c’est mon rayon;

-instauration de centres d’études des différentes langues pratiquées dans le pays, formation de fonctionnaires à l’aide individuelle qualifiée pour faciliter les relations entre l’administration (puisqu’il en faut) et les usagers;

abolition du terme “client” dans les rapports entre les services publics et les cli… les usagers;

-inclusion (ou réinclusion, ou confirmation, ou ce que vous voulez qui en finisse avec l’hypocrisie actuelle) de la médecine et de l’expertise judiciaire dans les services publics – plafond de revenus pour les adorateurs d’Hippocrate – les autres iront exercer aux USA;

-responsabilisation des autorités locales (puisqu’il en faut) quant à l’accueil diversifié;

-traduction des textes importants dans un maximum de langues – ça me fera du boulot, tiens – faut bien que j’y gagne aussi;

-cours de la ou des langues officielles – initiation à l’auto-apprentissage – promotion des enseignements mutuels – récupération des canaux médiatiques (télévision, radio) en ce sens;

promotion de l’économie participative – soyons sérieux deux minutes;

-démilitarisation de la police – on a le droit de rire;

interdiction des armes à feu en dehors des stands de tir (les armes ne peuvent en sortir, sous peine de confiscation et d’interdiction de possession ultérieure) – pour les incurables, paintball;

vote sur des mesures, non sur des personnes – interdiction des slogans et photos électorales;

exercices collégiaux d’exécution de ces mesures;

-renforcement des polices financières et fiscales – réorientation de la police criminelle – extension de la police de proximité aux citoyens, exercices de services civils en ce sens;

-réhabilitation des revenus non-liquides et de leur légitimation, ainsi que des assurances-chômages;

-réétalement des revenus en fonction des diplômes, revalorisation des emplois réputés peu ou pas qualifiés, mais souvent aussi, sinon plus utiles que les autres;

-international: réciprocité des lois des pays étrangers: tout ce qui est autorisé à un Belge dans un pays étranger sera autorisé à un étranger en Belgique – et vice versa (pas trop sûr de ce principe, À réfléchir);

-identification des droits du résident et des droits du national.

Et si tout ça ne nous rend pas le Congo, je ne sais pas ce qu’il faut qu’on foute.