Le hérisson révolutionnaire Le monde selon thitho

juin 8, 2009

Dans la série « nos fils de pute »

Filed under: discussions piquantes,la vie comme elle vient — tito @ 8:06 pm

Omar Bongo, représentant de la Françafrique au Gabon, est mort (c’est officiel).

« Bon, on le remplace par qui? » se demande-t-on à Paris…

Voir, s’il était besoin, le petit post ci-inclus.

Aïe am ze law

Filed under: discussions piquantes,politopics — tito @ 5:19 am

Il est assez étrange pour moi de constater un phénomène récurrent auprès de certains de mes familiers. Il semble que j’aie acquis une espèce de figure de juge1, ou de je ne sais trop quelle représentation mythologique. Il suffit que, dans une conversation anodine, je dise:

« Alors tu as accompli ton devoir de citoyen soumis? »

pour que les choses se gâtent.

Il est un fait que je suis un abstentionniste revendiqué et actif et que le vote au sein d’une démocratie parlementaire me rebute de manière aussi automatique qu’une fraude fiscale.

J’ai le devoir citoyen complexe.

Pour moi, le remplir tous les x temps au moyen d’un bulletin, qu’il soit électronique ou papier, et se dédouaner le reste du temps, me rend blet.

On peut certes encore se justifier par des « on ne peut rien y changer » ou des « que veux-tu que je fasse? » ou des « je ne vais quand même pas prendre les armes ». Mais dans ces cas, restez dans votre lit, envoyez un mot d’excuse et ne leur donnez pas la satisfaction de voir leurs nombres de voix augmenter systématiquement et leur auto-satisfecit déborder de nos médias mainstream et bêlants.

Vous êtes lourds: si vous ne croyez pas dans la démocratie parlementaire, ne votez pas!

On me dit aussi « L’extrême-… y gagne chaque fois tu ne votes pas. » Rassurez-vous (si je puis dire), vu les cliques au pouvoir dans la plupart des pays du monde entier, l’extrême y gagne toujours plus, malheureusement ce n’est pas la gauche…

Certains de mes amis me disent aussi: « ne pas voter ne te rend pas plus libre » et « je vote et je fais quelque chose: je participe à telle et telle choses ».

Pour la première affirmation, c’est absolument vrai: je m’en voudrais de me contenter de ne pas voter, ce ne serait absolument pas logique. Ne pas voter n’est en soi rien si l’on ne le complémente pas d’un acte subséquent. Rester dans ses plumes n’est en rien citoyen si vous ne vous manifestez pas les autres jours.

D’un autre côté, voter -c’est-à-dire abdiquer de votre pouvoir citoyen à l’échelon des forces représentatives surpuissantes des démocraties parlementaires- et prétendre ensuite « faire autre chose » en plus me paraît contradictoire. Moins malsain que de ne rien faire, mais contradictoire tout de même.

Coller un copain à la charge de vice-premier-consul de Schaerbeek ne changera rien à la problématique générale et l’idée qu’un Besancenot puisse frôler le deuxième tour des présidentielles dans trois ans me laisse aussi froid que lorsque Le Pen y était, lui, arrivé. Bien que je trouve le premier immensément plus sympathique que le faux borgne, je m’en voudrais d’avoir pu participer à l’envoyer à une quelconque charge représentative, fût-elle celle de conseiller rural2.

Pour autant que je sache -et je prétends en savoir un morceau-, nous ne pouvons pas envisager d’amélioration de la société « à petits pas » ou « par lobbying » ou par toute autre formule naïve de participation à un système qui, par essence, n’accepte de changer que pour que tout reste identique.

« Yes we can », « Ensemble tout est possible » et autres « Ce serait pire sans nous » ne peuvent que vous plonger dans l’illusion systématique que les choses évoluent effectivement par les urnes3.

Non, c’est la rue, c’est la pression, c’est la lutte, c’est la merde qu’on remue, c’est le pouvoir qu’on abolit, c’est la réquisition citoyenne, c’est la contestation de la légitimité des forces en place par leur dénonciation toujours plus originale qui peuvent changer les choses. Qui ont déjà plus d’une fois changé les choses. Qui ont même amené le Suffrage Universel, mais bon…

Consommation responsable, production alternative, grèves, boycott, occupations, livres, articles, même manifestations, et j’en passe, ont toujours fait bien plus pour la cause que de voter rouge (pas rose) ou vert. Il y a encore bien plus à faire, mais je sortirais temporairement de mon sujet.

Maintenant, si ça vous plaît tant que ça d’aller faire la file au printemps pour faire une petite croix dans une case…

Mais par contre, je ne me permettrais pas de juger du comportement de quiconque. Il est ancré dans bien des esprits que l’acte dit civique de se planquer trente secondes dans un isoloir fait partie de la démocratie: je m’en voudrais de vous culpabiliser parce que vous remplissez votre « devoir de citoyen ».

Si vous y croyez vraiment, j’espère que vous remplissez aussi bien votre feuille d’impôt et que vous vous garez toujours à plus de cinq mètres des clous.

Et que vous mettez les patins en entrant…

  1. D’où le titre. J’ai vu récemment un morceau de Judge Dredd qui m’a interloqué. []
  2. Je connais beaucoup de potes qui se présentent aux élections et que je trouve bien, mais je ne leur ferai jamais de promotion, de peur qu’ils soient élus… Ce qui arrive à certains, à mon corps défendant. []
  3. Certaines expériences sud-américaines semblent contredire ce que je dis, mais ce sont des cas spécifiques qui mériteraient une analyse séparée. À la grande rigueur, on pourrait comparer l’émergence démocratique du Vénézuéla ou de la Bolivie avec l’Espagne pré-franquiste, mais c’est à la fois un jeu compliqué et un ensemble de cas de figures totalement en inadéquation avec les démocraties parlementaires classiques et qui ne peut en aucun cas servir de référence pour le « Premier Monde ». []

avril 30, 2009

Priorités mal à droite

Filed under: discussions piquantes,professions protégées — tito @ 6:06 pm

Je n’ai malheureusement pas vu le film de Paul Moreira sur le Dollaristan -entendez l’Afghanistan alimenté par l’héroïne traiditionnelle et la corruption financée par l’Occident-, mais j’en ai lu un petit compte-rendu dans le Canard Enchaîné du 22 avril dernier.

Parmi les nombreux flops rencontrés par le journaliste sur place, on compte celui des écoles prétendument réalisée par l’USAID1 et dont le journaliste a pu vérifier la réalité:

« L’aide? dit le Principal. Ils ont construit un mur d’enceinte. Des toilettes. Les travaux se sont arrêtés là. »

De l’art de poser les priorités en matière scolaire: ce sont les murs qui encerclent l’école que l’on commence par poser, rien avant -et, ici, rien après.

-Maaaaaaiiiiiis, tu ne comprends pas: c’est pour éviter qu’on vole des trucs dans l’école qu’on commencer par les murailles.

Ben tiens: si vraiment on avait l’intention d’y accumuler des objets plus précieux qu’une règle en bois et un pot de craies de couleurs, ce ne sont pas les locaux qui risquaient de se servir sur la bête, mais bien les seigneurs de guerre qui règnent en maîtres absolus sur leurs petites portions de territoires -et, eux, ce ne sont pas des murs d’enceinte qui vont les arrêter.

Non, ceci est symptomatique de ce que, pour les autorités, pour l’idéologie dominante, représente ou doit représenter l’école: un espace clos, délimité, enfermé, détaché, soucieux d’enseigner, aussi bien aux enfants qu’aux parents, que les mondes productifs de savoir doivent être compartimentés, protégés, régulés, comme les mondes productifs de biens et de services, fondés sur la propriété et le profit.

Le parallèle avec l’usine et ses murs, le bureau et son service de sécurité, la prison aussi, est évident: l’école, loin de séparer l’enfant de la société, l’y intègre de force, le plonge dans la réalité de celle-ci, en lui en montrant ce qu’elle a de meilleur: l’enclosure.

C’est ainsi, chères têtes blondes, que vous produirez plus, plus vite et pour moins cher…

Ah, et en évitant de se bousculer dans les escaliers, s’il vous plaît…

  1. organisme par ailleurs reconnu d’utilité publique par tous ceux qui ne supportent pas la vue d’un socialiste à moins de deux cent mille kilomètres, il est l’un des principaux organisateurs des troubles préputchistes dans de nombreux pays latino-américains, notamment. []

avril 24, 2009

Dictadouce

Filed under: Brésil,discussions piquantes,politopics — tito @ 4:37 am

La Folha de São Paulo, l’un des plus importants quotidiens du pays, bien à droite au niveau économique, mais qui se marque aussi par une nette préférence pour tout ce qui n’est pas Lula, bronzé, peu éduqué, petit, carrément brun, de gauche, trop intello, et vous avez saisi l’idée, ce quotidien, donc, a sorti récemment de jolies réflexions sur la dictature militaire qui sévit ici entre 1964 et 19881.

C’est au détour d’un article qui critiquait (pour la énième fois) le régime vénézuélien actuel, que la Folha, par l’entremise d’un éditorialiste, s’est permise de comparer les régimes militaires d’Amérique Latine, genre Pinochet, Stroesnner et le brésilien en particulier, avec le gouvernement élu au suffrage universel du président Chávez Fria.

Pour arriver à la conclusion que les généraux du pays de Pelé et de la Samba avaient été finalement assez cools. La preuve, Pelé pouvait y faire de la pub et la samba pouvait être dansée, même mal, par les touristes2.

Et adopter l’expression « Ditabranda », que l’on pourrait traduire par le titre repris ci-dessus…3

Dictadouce…

Plusieurs de ses collègues lui ont emboîté le pas quand les critiques ont commencé à fuser. Mal leur en a pris.

Indignations d’intellos, désabonnements et autres manifestations se sont naturellement succédées. Et de remuer la merde, naturellement, car la Folha et son groupe éditorial, en 1964, avaient clairement pris parti pour la junte putschiste. Elle faisait l’éloge des flingages de résistants (appelés bien sûr terroristes) et se félicitait, à l’instar de la classe entrepreneuriale, du « miracle économique » des annés 71-74, qui fit tout de même dire à l’un des présidents-généraux: « L’économie du Brésil va bien, mais pas le peuple. »

Raison de cette offensive révisionniste4?
On en distingue plusieurs possibles.

La première serait de tenter de diminuer les mérites des résistants qui, depuis 25 ans, se battent (eux ou leurs familles) pour faire reconnaître leurs droits à des indemnisations, trés contestées du côté des nantis, des résistants parmi lesquels on compte aussi la très probable candidate du PT aux prochaines présidentielles, Dilma Rousseff5, qui fut arrêtée, torturée et emprisonnée plusieurs années6.

La seconde pourrait être une tentative d’auto-réhabilitation, puisque la Folha est mouillée jusqu’au cou dans l’entreprise militaro-putschiste de ’64 qui attire ces dernières années les foudres des historiens et des mouvements cherchant à faire comparaître les bourreaux et leurs commanditaires en justice7.

Une troisième motivation possible serait, selon certains, de préparer une éventuelle nouvelle fournée de mini-coups à l’échelon des États où la gauche (modérée, hein) a tendance à trop souvent l’emporter.

Enfin, il existe un lien possible avec la crise économique actuelle: le néo-libéralisme s’en est pris plein les dents. Or, celui-ci était bien sûr collé aux basques des dictatures latino-américaines. Les journaux et revues des milieux conservateurs sont ici en pleine panique et développent des arguments de plus en plus incohérents pour tenter de sauver ce qui peut l’être des théories ultralibérales qu’ils ont défendues depuis des dizaines d’années8. Parmi ces arguments, la défense, même modérée, des régimes qui ont le mieux et le plus contribué à la diffusion de ces théories semble naturelle.

Toujours est-il que ça ne prend pas toujours aussi facilement.

Dans un prochain numéro, si je vous ai suffisamment mis l’eau à la bouche, je vous raconterai un peu les aventures des principaux quotidiens et hebdomadaires que l’on rencontre à São Paulo…

  1. Je dis 1988, bien qu’entre 1985 et 1989 ait sévi un président civil, mais clairement du parti des militaires. 1988 marque une rupture avec l’adoption d’une constitution qui promettait beaucoup de choses… à ceux qui y croyaient. []
  2. Y compris Pierre Richard dans le Retour du Grand Blond, pourtant excellent. []
  3. Ou plus précisément, mais ça perd son sel en jeu de mot, dictasouple. []
  4. Le révisionnisme est un mot trop souvent employé de manière péjorative. À l’époque de Dreyfus, les révisionnistes étaient, faut-il le rappeler, ceux qui voulaient revoir le procès du bonhomme. []
  5. À l’époque, franchement communiste. []
  6. Le plus ironique est que le fort probable candidat de la droite est également un ancien résistant de gauche devenu, disons, pragmatique, le très sérieux gouverneur de SP, José Serra. []
  7. La gauche brésilienne se plaint régulièrement du fait que l’Argentine, le Chili et même certains pays d’Amérique centrale, parviennent à confronter les anciens tortionnaires à la justice, alors que Lula et consorts traînent ici les pieds. []
  8. Tout en se parant de l’objectivité et de la neutralité journalistique que l’on devine aisément. []

avril 18, 2009

né noir, mort blanc

Filed under: discussions piquantes,la vie comme elle vient — tito @ 10:27 pm

Machado de Assis est l’une des figures littéraires les plus importantes du Brésil. Un trait de sa vie remarquable est qu’il était considéré comme noir à la naissance (et donc de basse extraction), mais qu’avec la reconnaissance et le succès, il est mort « blanc » -c’est-à-dire qu’il était désormais considéré comme fréquentable.

Détail? Sûrement pas. Étonnante capacité de l’homme à se contredire lui-même dans le discours, dans l’esprit, sans même parfois s’en rendre compte.

Cependant, généralement, ce retournement est conscient. Dans le cas de Machado, c’est le regard de l’autre qui a évolué, il n’en était lui-même pas responsable. Mais, le plus souvent, ce sont les choix personnels qui marquent ce regard.

Exemples?

Pascal Smet, responsable politique « socialiste » flamand de Bruxelles (c’est pas de ma faute si on le définit comme cela) est né petit-fils de résistant (c’est lui, en tout cas, qui s’en vantait, lorsqu’il dirigeait l’administration chargée des expulsions en Belgique pour se défendre des accusations de comportement douteux que nous lui assénions). Il mourra, à nos yeux et à moins d’un acte de repentance genre auto-critique à la chinoise, comme l’un des fonctionnaires les plus zélés de la politique d’éloignement des sans-papiers.

Malraux, mort en 1946, serait resté le héros de la gauche. Il est mort gaulliste…

Une seconde chance est souvent ce qui est refusé à la plupart des hommes. Rares sont ceux qui en bénéficient face à la postérité, à la justice des palais, à « l’histoire-qui-juge », souvent vite…

Curzio Malaparte, s’il était mort avant 1930, aurait été considéré comme un simple pion du fascisme comme des milliers d’autres. Il est décédé bien plus tard, avec la reconnaissance littéraire que l’on sait. De même que Günter Grass, au fond, a eu de la chance de survivre et de dépasser l’horreur d’avoir servi dans les troupes nazies. Et on ne peut que s’en réjouir.

Beigbeder aurait pu mourir jeune et rester le petit con de droite qu’il était. Bon, il ne mourra que petit con de gauche.

Combien d’Albert Speer auraient fini par s’éveiller et rejeter le nazisme s’ils en avaient eu l’occasion, la chance, l’opportunité?

Et combien de membres du MR déchireront-ils leur carte de membre avant de mourir, histoire de se racheter?

Mais aussi, a contrario, combien de communistes des premiers temps seraient devenus staliniens s’ils avaient survécus? Combien de jeunes anarchistes morts en Espagne seraient devenus Johan Vande Lanotte?

Problématique effleurée par Sartre dans Huis-clos…

avril 16, 2009

Anniversaires, je vous hais

Sir Charles Spencer « Charlie » Chaplin aurait eu 120 ans aujourd’hui.

Ça m’amuse toujours de voir les commémorations effectuées par les médias dominants sur un personnage comme Chaplin qui, de son vivant, fut surtout critiqué pour son engagement politique (ambigu) et ses frasques conjugales et moins conjugales par les défenseurs de la loi et de l’ordre moral.

À nous, qui nous gaussons des anniversaires, de la Fox et des médias-qui-mentent en général, nous reste le souvenir du cinéaste et du résistant aux idées dominantes, d’un personnage hors du commun dans le monde du 7e art et des films parmi les plus importants jamais réalisés et joués.

Et ça nous suffit pour l’installer au sein de notre panthéon de mythes fondateurs…

Ça manque un peu, des rues Charlot, des écoles Charlie Chaplin, tiens. (voir post précédent)

avril 15, 2009

Rue des moustaches tombantes

Filed under: discussions piquantes,la vie comme elle vient — tito @ 9:11 pm

Ça fait un moment que je pense à un truc, trés bête en apparence, mais qui a son importance.

Les noms des rues, les monuments à la gloire des grands esprits.

Ici, à São Paulo, le dernier président de gauche, João Goulart, qui fut renversé par une dictature militaire1, est signalé sur une poignée de ruelles, alors que des dirigeants de la junte, eux, sont répétés inlassablement tous les jours à la radio, parce qu’il y a des bouchons sur les grandes artères. Il n’y a pas eu de révision historique, dans le pays… Et ce n’est pas près de venir.

Il y a même une petite rue Monsanto, juste en face de mon lieu de travail. Je l’emprunte pour aller de l’appartement d’une élève à l’école.

mais bon, elle est petite.

===

Je pense, à Bruxelles, à cette large avenue Charles Woeste, ministre du XIXe Siècle, qui s’opposait au Suffrage Universel, mais pas vraiment pour les même raisons que moi.

Je pense à l’avenue Léopold III, à l’avenue Baudouin; sans parler de la statue de Léopold II à poil près de la Gare centrale…

Il y a aussi les Rogier, Ducpétiaux et autres « révolutionnaires » de 1830, toutes sommités qui mériteraient surtout un beau placard historique.

À la place de l’avenue Charles Woeste, je verrais bien une Allée des Souris de Laboratoire.

Et sur la Place Albert Ier, un Square des Chevaux morts à la guerre.

Puis, à la place de la statue imbécile d’Elizabeth, une évocation de la musique libre, sans entrave et sans concours.

Et plutôt que de donner aux écoles des noms de politiques de deuxième division, on pourrait (à défaut de les détruire) leur donner des noms plus poétiques, ou de personnages un tant soit peu plus intéressants, comme John Lennon, Henry Miller (ce qui serait cocasse), Anaïs Nin (dont l’histoire serait aussi marrante à raconter) ou, à la limite, Marguerite Yourcenar2.

L’esprit de clocher, plus encore que le chauvinisme, le localisme politique de ceux qui espèrent sans doute gagner après leur mort l’octroi à leur nom d’une impasse ou d’une contre-allée, n’est rien moins qu’un réducteur de pensée.

De toute façon, qui se souvient de Dansaert, Dailly, Jacquemin, Max, Bordet3?

Alors une petite suggestion: débaptisez votre avenue et trouvez-lui un nom plus sexy, pour voir.

  1. Largement soutenue par le gouvernement amerloque Kennedy, puis Johnson. []
  2. J’ai bien encore d’autres idées, mais elles vont perdre encore en popularité. []
  3. Pourtant prix Nobel. []

avril 8, 2009

Burger et Milgram

Filed under: discussions piquantes — tito @ 4:25 pm

Qui a vu le film I comme Icare se souvient sans doute mieux de l’expérience de Milgram que d’autres. Au moins superficiellement.

Stanley Milgram est ce psychologue américain qui avait été frappé par la posture tranquille et innocente d’Eichmann, lors de son procès en Israël en 1961-1962, pour avoir été l’un des artisans principaux de l’achemienment des Juifs jusqu’aux camps de concentration et d’extermination, pendant la deuxième guerre mondiale. Eichmann se défendait sobrement, reconnaissant chacun des actes d’acusation, mais refusant de les assumer, prétendant qu’ils n’étaient que l’exécution d’ordres de supérieurs.

Milgram, effrayé par la capacité d’obéissance du bonhomme, mais surtout pas l’insistance avec laquelle il arguait de cette obéissance au « Fürherprinzip » pour justifier de ses actes1, décida de procéder à une expérience pour s’assurer que ses compatriotes ne suivraient pas la voix du nazisme.

En réalité, il constata que près de deux tiers de la population américaine2 étaient capables d’infliger consciemment des blessures mortelles à des personnes étrangères, sous prétexte qu’il s’agissait d’un ordre reçu par une autorité (en la matière, une autorité scientifique).

L’expérience de Milgram bouleversa les convictions sur le modèle démocratique, soit-disant porteur de valeurs humanistes3.

Une expérience de Milgram, édulcorée, à plus petite échelle4, et réalisée par le professeur Burger montre que les choses n’ont malheureusement guère évolué. L’espoir du professeur Burger était que l’éloignement des expériences autoritaires du XXe Siècle aurait assagi la population.

Malheureusement, pour qui fait l’expérience de la gestion par l’Administration des sans-papiers, des chômeurs, des femmes maltraitées, pour ne parler que des cas les plus flagrants en Europe Occidentale ou aux USA, il est évident que ce n’est pas la proximité des régimes autoritaires qui est responsable de cette inclination humaine.

Cependant, il ne peut s’agir de la propre nature humaine, puisque, a contrario, plus de trente pour-cent des cobayes ont refusé de poursuivre l’expérience malgré la pression de l’ordre.

Pour ma part, je blâme l’ensemble des structures sociales et politiques responsables du système éducatif oppressif, répressif, conservateur, concurrentiel et conformiste. Nous y apprenons à nous plier à des comportements aussi idiots que destructeurs, voire auto-destructeurs, valorisant la consommation maladive, la concurrence5, l’obéissance aveugle, l’absence de critique de l’autorité dans la plupart des cas et la crainte de l’autre.

L’apprentissage de l’obéissance aveugle, qu’elle s’exerce à l’armée, dans la rue ou en entreprise, est le fait d’un retard flagrant des conceptions d’éducation de manière générale dans nos sociétés dites civilisées.

La facilité avec laquelle la plupart des gens acceptent la répression de manière générale, les inégalités les plus criantes, tant en fait qu’en droit6, mais aussi un système économique fondé sur la loi du plus-fort-dès-le-départ-même-si-y-a-des-exceptions-qui-la-cautionnent, tout cela me permet d’affirmer sans crainte que, sans un changement complet de conception de la société, l’expérience de Milgram sera toujours d’actualité, et il sera même chaque fois surprenant de trouver 30 pour-cent de personnes qui refuseront d’obéir à des ordres imbéciles.

À la limite, ce sont eux les imbéciles…

  1. Il se glorifiait lui-même d’avoir 5 millions de morts sur la conscience. []
  2. Il étendit ensuite son expérience à d’autres pays, et les résultats ne changèrent guère. []
  3. De mon côté, je pense que le visionnage d’un documentaire sur cette expérience a dû être l’une de mes expériences d’ado les plus importantes et ce fut en tout cas l’un de mes principaux déclics quant à mes convictions politiques. []
  4. Ce qui tend à montrer que les moyens en science humaine tombent en vrille, faute de sponsors… []
  5. Qui n’a pas besoin d’adjectif. []
  6. Comment peut-on admettre de telles différences de traitement en justice, entre le pauvre bougre incapable de comprendre les borborygmes du droit et ‘bénéficiant’ d’un avocat de garde et le fils de bonne famille bardé d’une équipe de bavards uniquement consacrés à son problème. []

mars 30, 2009

C’est pas une surprise

Filed under: économie mon amour,discussions piquantes,politopics — tito @ 9:38 pm

En tout cas, ce n’est pas une surprise pour ceux qui ouvraient les yeux auparavant: les USA vivent comme un immense système Ponzi.

Ce n’est même pas un immonde gauchiste qui le dit, mais un très keynésien, stiglitzien économiste, le seul réputé avoir anticipé la crise qui est tombée sur la tronche des amerloques (et sur la nôtre ensuite) avec plusieurs années d’avance: Nouriel Roubini.

Cet économiste (dont je lis les chroniques avec assiduité, non par sympathie, mais parce que le gars est compétent) a montré dans un article du Carta Capital1 que les USA vivent bien au-dessus de leurs moyens depuis trop longtemps. Appelé « Mr. Doom » jusqu’à l’année dernière parce qu’il prévoyait la catastrophe qui est finalement tombée sur la tronche à tout le monde, il a un petit côté mythe de Cassandre2.

Les banques et les fonds de pension se sont vendus des titres pourris (et pas seulement dans l’immobilier) comme dans une légende médiévale où le prix d’un truc maudit qui apporte du profit est de plus en plus grand et nécessite un investissement toujours plus important, pour finalement arriver à une somme trop grande et c’est le dernier qui se prend la malédiction; ou comme dans ces entreprises de vente de produits diététiques où, pour être accepté, vous devez vendre dix boîtes à dix types, qui vont devoir faire pareil pour être acceptés, à leur tour, et ceci pour arriver aux derniers de la chaîne qui se retrouveront marron.

Sauf qu’ici, c’est ceux du début de la chaîne qui ont marroné tout le monde. C’est parti d’en haut, mais ceux du bas ont tout pris aussi3.

Mais ce ne sont pas que les banques, les fonds d’investissement et les joyeux traders qui ont joué aux Ponzi.

Parallèlement, les ménages se sont surendettés pour pouvoir payer leurs dettes; le budget des administrations est en négatif depuis une génération; la balance commerciale est négative depuis bien plus longtemps; le tout faisant que l’économie étatsunienne dépend, et bien trop, d’une croissance artificiellement montée en neige par une surconsommation dont les bénéficiaires indirects sont leurs producteurs établis à l’extérieur, aux premiers rangs desquels la Chine et le Japon, dont les états sont également les créditeurs principaux de la « première puissance mondiale ». Tout cela, je l’avais montré dans un article écrit début 2006 et qui se trouve encore ici. Ça ne me rend pas spécialement fier: je ne l’ai pas sucé de mon pouce, mais de nombreuses analyses de gens plus compétents que moi et pas spécialement de gauche, de données accessibles à tout le monde, d’informations que chacun peut lire tous les jours. Ce qui me rend furax, c’est le côté autruche de la plupart des gens, y compris à gauche, et surtout dans des cénacles d’extrême-gauche. Mais bon…

Passages de l’article de Roubini:

« Madoff n’est que le miroir de notre économie. »

« Nous sommes4 un château de cartes qui s’appuie de manière démesurée sur des fonds de pension, des entreprises financières et des entreprises qui font aujourd’hui banqueroute. »

« Un pays qui a dépensé pendant plus de 25 ans plus qu’il n’a reçu, et qui affronte un déficit en compte courant, qui devient le plus grand détenteur de dette externe du monde, est un pays Ponzi… »5

Le système Ponzi, pour ceux qui ont la flemme d’aller voir la page wiki que j’ai mise en référence, est une arnaque fondée sur la confiance en un gugusse qui vous vend un papier avec promesse de vous faire part de bénéfices qu’il ne trouvera qu’en continuant à vendre les mêmes papelards à d’autres. Au début, tout va bien, mais dès qu’un premier zouave commence à se poser des questions, le magicien d’Oz apparaît… Et on s’aperçoit qu’il n’y a rien derrière le rideau de fumée…

Nourini fait le parallèle avec la société américaine qui achète trop, qui dépense trop et qui, pour rembourser, continue de dépenser, de s’endetter, d’acheter… (sans compter, mais ça Nourini ne le dit pas, c’est un économiste de droite, pas un samaritain, que les USA se sont servis sur le monde pour enrichir leur classe moyenne, comme d’ailleurs les sociétés européennes en même temps qu’eux).

À force, ça a donc fini par se voir.

« L’explosion de la bulle immobilière, actionnaire, des fonds à risque et des opérations de ‘private equity’6 a montré que beaucoup de la « richesse » qui a soutenu l’accélération massive de l’économie et les super-dépenses des agents de celle-ci était fausse. »

Comme je vous le disais: on n’est pas vraiment étonnés, à condition qu’on ait évité de garder pendant toutes ces années le nez dans le caca comme, malheureusement, trop de gens l’ont fait.

« Madoff pourra rester le restant de ses jours en taule. Le gouvernement et les entreprises financières et non-financières peuvent passer la prochaine génération dans la prison de leurs dettes. Ils devront se serrer la ceinture pour payer les pertes encourues pendant une décennie et plus d’accélération irresponsable (de l’économie), sans considérer les risques.
« Américains, regardons-nous nous-mêmes dans le miroir: Madoff7 et Ponzi, c’est nous. »

Européens, n’hésitez pas à vous poser la question: ne sommes-nous pas un peu nous-mêmes des Ponzi, à avoir voulu deuxième voiture, écran géant, frigidaire américain et autres gadgets?

En septembre 2001, beaucoup chantaient « Nous sommes tous américains. »

Et bien ils peuvent danser, maintenant.

  1. Daté, c’est pas de ma faute, du premier avril 2009. Ils anticipent un peu, au CC. []
  2. Le plus drôle, c’est qu’il est originaire de Turquie, et que Cassandre vient de là-bas aussi. []
  3. J’ai déjà eu l’occasion de dire -sans être très original- que les premières victimes de cette crise ne sont pas les riches comme ils cherchent à nous le faire croire, mais les plus pauvres. C’était notamment ici. []
  4. Il ne dit même pas « Notre économie », mais bien « Nous ». []
  5. Le problème, c’est que l’économie européenne et d’une bonne partie du monde repose sur cet état de surconsommation des Zuessa. []
  6. J’adoire ces expressions à la mords-moi-le-truc. []
  7. Bouquet Mystére. []

mars 25, 2009

Références

Filed under: discussions piquantes,politopics — tito @ 1:23 pm

Nicolas Sarkozy avait sorti, alors candidat, une jolie formule à l’attention des immigrés, fils d’immigrés, petits-fils d’immigrés qui ne respectaient pas les lois de la République suffisamment à son goût.

« La France, on l’aime ou on la quitte. »

Certains avaient osé le comparer alors à Le Pen.

D’autres avaient alors hurlé à la relativisation du leader d’extrême-droite. Sarkozy, bien sûr, étant de droite, et non d’extrême-quoi que ce soit…

Cette formule savamment distillée, a cependant une origine amusante. Son créateur est un Brésilien. Un certain Médici. Pas Laurent, Catherine, Julien ou Marie, non: Emilio Garrastazu. Le bonhomme fut président du Brésil de 1969 à 1974, lors de ce qu’il est convenu d’appeler « la dictature brésilienne ». Emilio était le « général de planton », autrement dit le président de garde de la révolution d’extrême-droite qui sévissait alors1. Il avait prononcé à l’encontre des résistants à la junte militaire cette formule: « Le Brésil, tu l’aimes ou tu le quittes. »

Sarkozy n’aime pas la Princesse de Clèves, mais il a des références quand même.

  1. Cinq généraux vont se succéder pour assurer la garde de la république contre le bolchevisme entre 1964 et 1985, avant qu’un zozo civil prenne le relais jusqu’en 1988. []
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